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Carlo Santarelli (“Enfants du monde”) : “C’est à travers un effort concerté que nous pourrons améliorer la santé”

Publié le samedi 25 mars 2006 à 08h08min

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Carlo Santarelli

L’Organisation non gouvernementale “Enfants du monde” Suisse est une organisation d’aide à l’enfance dont le siège est à Genève. Créée en 1968, elle œuvre pour le bien-être des enfants sans distinction quelconque dans plusieurs régions du monde.

Présent à Ouagadougou dans le cadre d’un atelier, le secrétaire général Carlo Santarelli situe, dans cet entretien, les actions de l’ONG, les domaines d’intervention, les difficultés rencontrées quant à la mise en œuvre de leurs activités, la lutte pour la réduction de la mortalité maternelle et néonatale.

Sidwaya plus (S.P.) : Quelle est votre approche pour améliorer la santé de la mère et du nouveau-né ?

Carlo Santarelli (C.S.) : Au niveau de “Enfant du monde” l’approche préconisée par l’OMS consiste à collaborer avec les individus, les familles et les communautés pour améliorer la santé maternelle et néonatale.

Le but principal de cette approche est de créer des liens, des réseaux sociaux, des complémentarités et des collaborations entre les services de santé, les individus, les familles et les communautés.

Une série d’interventions, qui sont positives au niveau communautaire ont été identifiées sur la base d’un certain nombre d’expériences à travers le monde qui ont démontré leur efficacité pour améliorer la situation des mères et des enfants.

S.P. : En quoi cette approche est plus innovante que celles qui ont été pratiquées jusque-là ?

C.S. : Je crois que l’aspect intéressant de cette approche proposée par l’OMS est son caractère systématique. Elle reprend un certain nombre d’expériences, les organise dans un cadre de travail et permet donc aux différents intervenants, à travers un certain nombre d’étapes définies, d’intervenir de manière organisée et efficace pour améliorer la santé des mères et des enfants.

S.P. : Que faites-vous en tant qu’ONG pour le bien-être de la mère et de l’enfant ?

C.S. : Nous avons une série d’interventions dans les domaines de l’éducation et de la santé. Ces interventions sont des approches qui permettent de travailler tant au niveau communautaire qu’au niveau des relations et des contacts avec les services de santé.

Cela consiste à améliorer les compétences du personnel de santé, les relations entre la communauté et le personnel de santé, le système de transport, l’accès économique à travers la mise en place de mutuelles de santé ainsi que toute une série d’autres interventions. Il y a une douzaine qui ont été identifiées et qui permettent aux individus, aux familles et aux communautés de jouer leur rôle dans l’amélioration de la santé maternelle et néonatale. Il est important de considérer que les individus, les familles et les communautés ont des compétences, des ressources.

C’est dans la mise en réseau de ces ressources avec celles des services de santé que nous pourrons être plus efficaces et mieux répondre aux situations qui se présentent aux mères et aux nouveau-nés. Je crois que le diagnostic principal des causes de mortalité, de morbidité est connu. Un certain nombre d’interventions également sont connues. Il s’agit maintenant, à travers un effort concerté des différents acteurs, ONG, organisations internationales, ministère de la Santé, groupes communautaires, et bien entendu, les familles et les communautés, de contribuer à améliorer la santé.

S.P. : Comment procédez-vous sur le terrain pour mener à bien vos activités ?

C.S. : A l’ONG “Enfants du monde”, c’est essentiellement l’éducation et la santé qui entrent en ligne de compte. Dans ces deux domaines, on essaie d’améliorer la qualité des prestations de santé, des relations entre les prestataires de santé, les familles et les communautés. En ce qui concerne la qualité de l’éducation on a des approches ou des interventions de formation des formateurs qui permettent d’améliorer l’approche pédagogique et l’enseignement au sein des classes. Ainsi, on essaie d’aborder la question de la scolarisation de deux façons. D’une part, en donnant une deuxième chance (et d’ailleurs, il y a un programme qu’on soutient au Niger et qui s’appelle précisément “Ecole de la deuxième chance”) à des enfants, soit qui n’ont pas été scolarisés, soit qui ont été déscolarisés de manière précoce.

En un mot, nous sommes conscients que cela est un symptôme de la situation qu’il faut améliorer. De ce fait, on travaille également dans un certain nombre de pays à améliorer l’éducation formelle. Notamment dans la scolarisation primaire, en améliorant la formation des enseignants, les conditions de travail des élèves, en ayant du matériel didactique plus proche des réalités des communautés et des familles. Cela consiste aussi à mener des recherches pour identifier les différentes connaissances et compétences qu’ont les communautés, de partir toujours des connaissances et des ressources qu’à la communauté. Dans le domaine de la santé, c’est à peu près la même chose.

L’approche préconisée est celle fondée sur les connaissances des communautés en matière de santé tout en essayant de dépasser et d’améliorer ces connaissances. Dans les domaines de la santé et de l’éducation, nous mettons l’accent sur la collaboration avec les ministères. La résolution des problèmes de la santé et de l’éducation relève de la responsabilité des ministères. Notre rôle, c’est de collaborer avec les ministères de la Santé et de l’éducation.

S.P. : Quels sont les objectifs visés par l’ONG “Enfants du monde” et dans quelle partie du monde évoluez-vous ?

C.S. : En Amérique centrale (le Guatemala et le Salvador), dans les Caraïbes, (Haïti et la République Dominicaine), dans le Sahel, (le Niger et le Burkina Faso), en Asie du Sud, (le Bengladesh essentiellement) sont nos champs d’actions. Les objectifs visés sont d’améliorer l’accès à l’éducation et la qualité de l’éducation. Nous travaillons sur les deux niveaux. Améliorer l’accès, c’est essentiellement à travers un travail de plaidoyer, et là, on essaie toujours de passer par des plates-formes qui existent dans le domaine de l’éducation ou dans le domaine de la santé et des plates-formes d’ONG locales. Concernant la qualité, c’est essentiellement à travers la formation qu’on intervient pour améliorer la qualité des prestations.

S.P. : En Afrique, il y a des phénomènes auxquels les enfants font face. Notamment celui des enfants de rue, des trafics d’enfants. Quelles sont vos actions à l’endroit des enfants victimes de ces pratiques ?

C.S. : Dans ces cas de figure, on joue réellement la complémentarité avec les organisations qui interviennent de façon beaucoup directe sur cette problématique. Que ce soit les organisations avec lesquelles on est en contact en Suisse ou ici sur le terrain. Cependant, ce n’est pas notre population cible privilégiée, même si nous sommes conscient que c’est un problème majeur. On essaie, à travers nos démarches, de résoudre cette problématique plutôt en amont, en essayant d’éviter que les enfants se retrouvent dans ces situations.

S.P. : Quelles sont les difficultés rencontrées sur le terrain ?

C.S. : Les difficultés sont de plusieurs ordres, mais elles sont toutes à analyser dans le cadre d’une perspective de coopération au développement. Au niveau de “Enfants du monde” notre perspective s’inscrit dans le moyen et long terme. Les processus de changement et d’amélioration dans les domaines de l’éducation et de la santé, sont des processus lents. Donc les différentes difficultés rencontrées sont évaluées avant d’essayer de trouver des solutions.

Avec des partenaires locaux, nous essayons, au fur et à mesure d’améliorer la qualité de nos projets, et leur impact sur les communautés. Il faut se situer, dans cette vision du verre, soit à moitié vide, soit à moitié plein. Nous avons plutôt tendance à le considérer à moitié plein et à toujours essayer de le remplir un peu plus, plutôt que de s’auto-censurer ou de s’auto-limiter. Au lieu d’identifier toutes les difficultés, on identifie plutôt les potentiels, les ressources.

S.P. : Que comptez-vous faire pour améliorer la santé maternelle et néonatale, quand on sait que dans des villages très reculés, l’accouchement se fait toujours de façon traditionnelle ?

C.S. : Des interventions sont prévues à différents niveaux. Du côté du service de santé, il y a des améliorations qu’il faut apporter, notamment en terme de disponibilité mais aussi en terme d’aptitudes. Les relations interpersonnelles sont à améliorer dans la façon de traiter le patient, dans la façon de s’adresser à lui, dans le respect de sa culture et de ses particularités. Mais il y a aussi des actions qui doivent être réalisées au niveau communautaire, d’où l’amélioration du système de transport pour que les femmes et les enfants puissent accéder aux services de santé. Au niveau des pratiques traditionnelles, je crois qu’il y a un travail d’éducation à faire sur le moyen et long terme. Il ne faut pas aussi considérer que toutes les pratiques traditionnelles sont mauvaises.

Certaines peuvent être utilisées de manière positive. Cependant un travail de réflexion de changement sur le long terme dans les relations, avec les accoucheuses traditionnelles, est nécessaire. Elles ont un rôle à jouer et il faut peut-être le redéfinir et surtout, les mettre en lien avec les services de santé, et avec elles, préciser que peut être leur rôle.

S.P. : Comment bénéficie-t-on des services de l’ONG “Enfants du monde” ?

C.S. : La démarche mise en place, que ce soit dans le domaine de la santé que de l’éducation, c’est une démarche de diagnostic. Donc nous essayons d’identifier quels sont les programmes existants, les partenaires, la politique de l’Etat en matière de santé et de l’éducation.

Par exemple lors d’un atelier, nous entrons en contact avec un certain nombre d’organisations. Nous essayons de voir quelles sont les interventions et les collaborations qu’on peut mettre en place par la suite.

C’est par le biais de notre bureau de coordination dont le siège est à Ouagadougou que l’on peut entrer en contact avec l’ONG “Enfants du monde”. A travers ces contacts, il peut se construire ou ne pas se construire une collaboration.

S.P. : Vous êtes auteur d’une publication intitulée “Collaborer avec les individus, les familles et les communautés pour améliorer la santé maternelle et néonatale”. De quoi parle cette publication ?

C.S. : Dans cette publication qui est une publication de l’OMS, j’ai été mandaté en 2002 pour faire un travail d’élaboration d’une approche, dont le titre, d’ailleurs est “collaborer avec les individus, les familles et les communautés pour améliorer la santé maternelle et néonatale”. Donc c’est dans le cadre de cette publication, qu’a été élaborée une approche générale, et proposé un certain nombre de stratégies. Mais je dirai surtout, qu’il a été proposé un certain nombre d’interventions qui sont des interventions qui ont été validées dans un certain nombre de programmes.

Il y en a douze interventions concrètement qui ont été identifiés et qui permettent aux individus, aux familles et aux communautés, de participer à l’amélioration de la santé, et qui permettent aussi, aux services de santé d’entrer dans une relation différente avec les individus, les familles et les communautés.

S.P. : Pour ce faire, quels sont les axes des solutions proposée ?

C.S. : Il y a 4 domaines d’interventions prioritaires qui sont identifiés : l’amélioration des aptitudes, des capacités des personnes à répondre à un certain nombre de situations, le renforcement des connaissances en matière de santé maternelle et néonatale qui a des besoins spécifiques qu’il faut connaître, le renforcement des liens entre les familles, les individus et les communautés, mais aussi entre ceux-ci et les services de santé ce qui implique l’amélioration des systèmes de transport, et l’accessibilité économique ; et enfin, l’amélioration de la qualité des prestations sanitaires.

Daouda Emile OUEDRAOGO (ouedro1@yahoo.fr)
Ladji BAMA (Stagiaire)
Sidwaya

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