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Situation de la nation : Un devoir de vérité pour le Premier ministre

Publié le jeudi 23 mars 2006 à 07h33min

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Paramanga Ernest Yonli

Aujourd’hui, 23 mars 2006, le chef du gouvernement, Paramanga Ernest
Yonli, sacrifie à un rituel dicté par la Constitution en son article 109. Face à la
représentation nationale, il fera en effet l’état de la situation de la Nation.

L’exposé fera ensuite place aux questions des députés. Car, contrairement
au discours de déclaration de politique générale, qui n’est pas suivi de
débats, celui sur la situation de la Nation, lui, donne lieu à des discussions.

Toutefois, l’exposé sur l’état de la Nation n’est sanctionné par aucun vote des
parlementaires. Donc, un examen de passage sans risques, face à un jury
qui n’a pas pour vocation de distribuer des points. Comment le contenu du
discours du chef du gouvernement sera-t-il apprécié ? Laissera-t-il les
Burkinabè sur leur faim ?

Au sein de l’hémicycle en tout cas, il est presque certain qu’il se trouvera
des voix (dans les rangs de la majorité parlementaire, surtout) pour
approuver, sans réserve, le bilan écoulé.

Probablement, certains députés en
effet n’y trouveront aucune zone d’ombre et se montreront plutôt laudatifs à
l’égard de l’action du Premier ministre.
La présentation de la situation de la Nation que dressera le chef du
gouvernement fera, sans doute, et une fois encore, ressortir que les efforts
continus se heurtent à des conjonctures tant nationales, sous-régionales
qu’internationales.

Mais que, dans l’ensemble, tout baigne. Libre à chacun de
ne pas partager ce constat. L’opposition, elle, sera dans son rôle. Elle se fera
fort de relever quelques inquiétudes, comme à son habitude. Mieux, elle ne
manquera certainement pas d’émettre des critiques acerbes, plus ou moins
fondées.

Reste à savoir si, en ce qui le concerne, Paramanga Ernest Yonli saura
servir à ses concitoyens un discours qui ne soit pas en déphasage total avec
les réalités quotidiennes des Burkinabè des classes moyennes et de ceux du
bas de l’échelle sociale. Puisqu’il n’est plus à son premier exercice du genre,
on peut espérer que Paramanga Ernest Yonli placera cette nouvelle
"convocation" devant l’Assemblée nationale sous le sceau de la maturité.

En
d’autres termes, qu’il optera pour un discours hautement empreint de vérité et
de sincérité, qui fasse un diagnostic rigoureux et sans complaisance des
nombreuses entraves au développement de la Nation ; un discours qui ne
s’embarrasse pas de considérations politiciennes, électoralistes, et qui ne
soit pas surtout destiné à la consommation extérieure.
Affirmer que le Burkina se porte bien, que les indicateurs sont au beau fixe
alors que, dans les faits, la réalité est tout autre, c’est manifestement vouloir
faire prendre des vessies pour des lanternes.

Si parler de l’état de la Nation
peut paraître, à certains égards, le côté jardin de la situation nationale, le côté
cour de cette situation, c’est bien l’état réel du peuple burkinabè dans son
ensemble.
Un état caractérisé par une fracture sociale béante et alarmante, par des
aspirations profondes des populations dont la prise en compte par les
gouvernants ne semble pas avoir atteint le seuil de satisfaction souhaité, par
un dialogue social qui bat de l’aile, etc.

Au cours du discours, les Burkinabè ne seront pas encore surpris d’entendre
que les indicateurs macro-économiques sont au vert, qu’il y a des avancées
dans bien des domaines, notamment en ce qui concerne la lutte contre la
pauvreté, la bonne gouvernance, les acquis démocratiques.

Auditeurs et
téléspectateurs seront amenés à consommer un discours dont l’idée
générale pourrait se résumer en ceci : au Faso, tout va comme dans le
meilleur des mondes. Seulement, des expressions tels "indicateurs
macro-économiques au beau fixe", ça ne se mange pas, et cela n’est pas
ressenti, jusqu’à ce jour, dans le panier de la ménagère.

Et puis, comment
parler de tels indicateurs quand les maux qui minent l’économie burkinabè
(corruption et fraude), connus et maintes fois dénoncés, n’ont jusqu’à présent
pas été efficacement combattus, alors qu’ils constituent pourtant de sérieux
freins au moteur du développement ?
Au juste, que demandent les Burkinabè ? Que leur quotidien soit moins
pesant et angoissé, qu’il soit amélioré. Qu’ils aient au moins le sentiment
qu’ils sont tous égaux devant la loi.

Pauvreté et injustice sociale, ce sont là des vecteurs qui engendrent bien des
maux dans notre société. Un équilibre social est possible, si tant est qu’on ait
vraiment la volonté de l’acquérir. La politique menée par le gouvernement
doit être, dans les faits, la recherche permanente d’une juste solution aux
préoccupations du peuple burkinabè.

Tant que certaines réalités seront
survolées, il ne faut pas s’étonner que le couvercle de la marmite des
frustrations et des jacqueries saute un jour. Et les premiers signes sont déjà
visibles. Il suffit d’y prêter attention. Ils se manifestent par le fait que de plus
en plus de Burkinabè, fatigués d’attendre que les nuages de leur avenir se
dissipent, en font à leur tête et s’adonnent finalement à des actes très peu
recommandables.

Le Pays

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