LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Nous sommes lents à croire ce qui fait mаl à сrοirе. ” Ovide

Sommet de Yamoussoukro : Banny imprime sa marque

Publié le samedi 4 mars 2006 à 07h13min

PARTAGER :                          

Charles Konan Banny

Qui aurait cru qu’il réussirait à inverser une tendance aussi défavorable ? Sa proposition de sommet ivoiro-ivoirien à Yamoussoukro avait pris l’allure d’un vœu pieux, lundi dans l’après-midi, après que l’un des principaux protagonistes, Guillaume Soro a décliné l’invitation pour raison de sécurité.

Mais avec sa volonté bien trempée, Charles Konan Banny a réussi à prendre le dessus sur un Laurent Gbagbo, dont les exigences de ses services de sécurité ont failli faire capoter la rencontre. Avec ce Premier ministre, Laurent Gbagbo voit au fur et à mesure sa marge de manœuvre se rétrécir comme peau de chagrin. Lundi dernier avec l’échec du sommet de Yamoussoukro, tout le monde voyait revenir en surface les vieux démons. En effet, l’irrédentisme de l’armée loyale, qui voulait contrôler l’intégralité du périmètre réservé au sommet était une provocation qui ne dit pas son nom.

Cette revendication maximaliste, Laurent Gbagbo en est coutumier parce qu’il veut à chaque pas, contrôler le rythme, les tenants et aboutissants du processus de paix.

Cette fois-ci, il aura trouvé à qui parler, quelques heures seulement ayant suffi à Banny pour imposer ses vues quant à la sécurité des lieux et de faire dégager "vite fait" les hommes en armes de Gbagbo du périmètre.

Les vieux réflexes et la roublardise n’ont, cette fois-ci, pas eu raison d’un chef de l’exécutif qui entend aller au bout de sa mission. La vue d’un Laurent Gbagbo, assis sagement aux côtés de Konan Bédié, Alassane Ouattara et Guillaume Soro pour écouter la lecture du communiqué final avait quelque chose de surréaliste.

Pour ce coup en tout cas, il n’était ni au marteau, ni au soufflet. Il était un observateur passif comme les autres.

Révolution en marche

En 2000, Laurent Gbagbo a été élu par défaut, puisque deux majors de la scène politique, le PDCI et le RDR avaient été disqualifiés. En l’absence de choix réel pour l’électeur, son élection ne fut qu’un pis-aller. Seulement, cette mise à l’écart ne pouvait durablement pas tenir la route. Désormais, il doit apprendre à composer avec d’autres présidentiables en puissance.

La révolution ainsi amorcée et conduite par Charles Konan Banny, permettre à plusieurs poids lourds de cohabiter sont le vrai défi lancé au processus de paix.

En effet, le FPI s’était inscrit dans une logique d’élimination physique de tous ceux censés être une menace à son pouvoir. C’est cette logique qui a conduit le truculent Guillaume Soro à décliner la rencontre de lundi, afin de voir plus clair dans la question cruciale de la sécurité.

Le Premier ministre a donc cette tâche de surtout créer un environnement où chaque leader se sentira à l’aise, autrement dit de pouvoir se mouvoir et se déployer dans la restauration de la démocratie en Côte d’Ivoire.

Le terrorisme aveugle imposé par le FPI par le truchement des jeunes patriotes pèse encore sur les mentalités. La confiance passe par la mise sous embargo de ces adeptes de la violence gratuite.

L’espoir renaît

Pas d’observateurs venus d’ailleurs, quatre heures à huis clos entre les leaders respectifs désignés, le sommet de Yamoussoukro fait enfin avancer les choses. Après tant d’obstacles, les frères ennemis semblent comprendre qu’ils n’ont d’autre choix que de s’asseoir et de se parler. Le temps presse, la communauté internationale veut les signaux positifs et le peuple attend la fin de la crise. Charles Konan Banny apparaît donc en dernier recours, l’homme en somme qui ne doit pas échouer. La feuille de route sortie de ce sommet, avec un listing des tâches à accomplir est de nature à instaurer le débat républicain, celui qui permettra de se pencher enfin sur des sujets aussi cruciaux que le désarmement, le cantonnement et l’organisation des élections.

Il est connu qu’un conflit quelle que soit sa durée finit toujours par un règlement. Avec Charles Konan Banny, on a l’impression d’être au commencement des choses parce qu’il est le premier à conduire le processus de paix dans un cadre qui met en scène exclusivement les Ivoiriens. C’est pourquoi, il faut taire les rancœurs, les roublardises et les coups tordus. Si on ne demande à personne d’être amnésique et d’oublier le passé, avec ce qu’il charrie comme horreurs, il y a lieu que chaque protagoniste s’inscrive dans la logique du pardon.

Le sommet de Yamoussoukro, d’abord avorté, puis remis magistralement en scelle grâce au savoir-faire du Premier ministre est un début de vraie sortie de crise. Dans cette lancée, à Banny de se montrer tenace, persévérant et de ne pas abdiquer à la première haie, lui qui a comparé son mandat à une course d’obstacles. Les haies, c’est une question de volonté, lorsqu’on hésite on bute inévitablement sur l’une ou l’autre.

Souleymane KONE

L’Hebdo

PARTAGER :                              
 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique