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Irak : Va-t-on regretter Saddam ?

Publié le lundi 27 février 2006 à 07h47min

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Au moment où la convocation, ce jour à Yamoussoukro, en terre éburnéenne donc, et sans témoin, d’une grand-messe de tous les protagonistes (Gabgbo et Soro en tête) de la crise ivoirienne donne à espérer qu’une paix des braves finira bien par être signée après quelque quatre années d’errements, en Irak, la situation est moins reluisante,
les héritiers du régime défunt de Saddam Hussein semblant s’être abonnés de nouveau à la violence ces jours-ci.

C’est vrai que depuis l’invasion américaine le pays traverse une interminable zone de turbulences, mais tout le monde voulait se convaincre qu’on n’en arriverait pas là nonobstant quelques coups de semonce qui faisaient chaque fois craindre le pire. Et le pire est peut-être à venir, l’attentat commis mercredi dernier contre la mosquée d’or de Samara, sanctuaire des chiites, faisant redouter désormais une guerre interconfessionnelle ou, si vous préférez, une "libanisation" de l’Irak.

Tout cela pour quelques barils de pétrole négociés sur la base de grossiers mensonges et de grotesques armes de distraction massive. Déjà, en l’espace d’un week-end de représailles, les morts se comptent par centaines aussi bien dans les rangs des chiites que des sunnites et autres Kurdes. Devant ce spectacle désolant, les soldats de Bush restent interdits, leur capacité à ramener la paix dans ce pays qu’ils occupent depuis maintenant trois ans s’étant révélée nulle. On pouvait tout reprocher à Saddam Hussein, sauf de ne pas maîtriser les enragés de Bagdad, Bassorah, Kirkouk et nous en oublions.

Si le raïs était toujours sur son piédestal ! A cette exclamation légitime des nostalgiques du règne du clan Saddam, il faut tout de suite opposer la lucidité des chefs religieux qui multiplient ces dernières heures les appels au calme afin d’éloigner le spectre de la guerre religieuse. "Nous ne sommes pas des ennemis, mais des frères. Quiconque attaque un musulman n’est pas un musulman, et celui qui attaque les sacrements et les mosquées reçoit sa juste punition".

Mais cette sortie du jeune et fougueux chef religieux chiite, Moktada al Sadr, qui se voulait un avertissement, mais aussi une main tendue vers les autres communautés religieuses, a eu les effets qu’on connaît. Et pourtant, du côté des sunnites, on ne manque pas de tact pour déclarer que "ce qui s’est passé mercredi au sanctuaire chiite est une tentative pour diviser les musulmans". Les différentes milices qui infestent les rues de Bagdad sauront-elles raison garder ?

Rien n’est moins sûr. En tout cas, l’évangile du cow-boy texan qui prêche dans le désert irakien n’a point varier quand bien même il y aurait eu la formation d’un gouvernement d’unité nationale pour permettre au pays de renaître de ses cendres. Un appel auquel le président iranien, le chiite enragé Mahmoud Ahmadinejad, a tout de suite répondu en renouvelant ses véhémentes protestations contre l’occupation américaine. "Tous nos problèmes viennent des occupants", a-t-il martelé.

Non loin de là, en Arabie Saoudite, le chef religieux sunnite Salah al Kaaïd a, quant à lui, dit à ses fidèles "qu’il n’est pas dans l’intérêt de l’Irak de se précipiter pour accuser quelqu’un, ou pour se venger". Mais sera-t-il seulement entendu ? Au jour d’aujourd’hui, seul le couvre-feu imposé à Bagdad et dans les provinces environnantes jusqu’à 13 h GMT permet d’atténuer la vive tension de ces derniers jours. Osons croire que ce calme, si précaire soit-il, présage de lendemains heureux pour les Irakiens qui, depuis la nuit des temps, n’ont cessé de conjuguer le verbe mourir au présent.

En tout état de cause, l’histoire retiendra que l’Amérique des Bush est pour beaucoup dans la décadence irakienne. Le gendarme du monde y est, en effet, allé à l’aventure. Certes il est parvenu à terrasser l’ogre et raser l’édifice irakien, mais c’était sans compter avec la mauvaise volonté des architectes et autres ouvriers du nouveau chantier. Après avoir ouvert la boîte de Pandore, libérant ainsi tous les malheurs de l’Irak, les yankees peuvent-ils encore rêver d’une issue heureuse de cette crise sous leur houlette ?

En tout cas, le vin est tiré, et ils devraient le boire. Le seul défi qui reste à Bush pour honorer son dernier mandat à la maison blanche, c’est de pouvoir ramener intact ses boys au bercail et restaurer la paix en Irak. Sûr que, même du fond de sa geôle, Saddam Hussein boit actuellement son petit lait.

Car si son pays devait sombrer définitivement dans le chaos d’une guerre politico-religieuse aux conséquences dévastatrices, ses compatriotes en viendraient presqu’à le regretter, malgré la chape de plomb qui pesait sur l’Irak durant son long règne, le gazage des Kurdes ou la répression des chiites.

L’Observateur Paalga

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