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Grippe aviaire, SIDA, paludisme : Et si on combattait aussi le "virus" de la corruption ?

Publié le mercredi 22 février 2006 à 07h41min

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Le rapport 2006 de l’ONG Transparency International met à nu
des pratiques de corruption dans le domaine de la santé. Le
Réseau national de lutte anti-corruption tire, lui aussi, la
sonnette d’alarme dans cet écrit.

Dans son rapport annuel 2004 sur l’état de la corruption, le
Réseau National de Lutte Anti-Corruption (REN-LAC) tirait la
sonnette d’alarme sur "le développement exponentiel de la
corruption dans le secteur de la santé au Burkina". Par le même
exercice, à un niveau mondial, « Tansparency International »
confirme que les ravages du phénomène ont passé toutes les
bornes.

Le rapport 2006 de l’organisation non gouvernementale
martèle en substance et sans ambages que "la corruption prive
de nombreuses personnes de soins médicaux dont elles ont
besoin ; elle encourage la propagation de maladies résistantes
aux médicaments existants à cause des contrefaçons. Ce qui
crée un cycle d’aggravation toujours plus forte des conditions
sanitaires. Au moment où le monde est terrifié par une menace
de grippe aviaire à nos portes, ne faut-il pas non plus parler du
"virus" de la corruption ?

Classé respectivement comme 4e secteur miné par la petite
corruption, 8e par la grande corruption et 5e secteur le plus
corrompu à l’issue du sondage réalisé par le REN-LAC en
2004, le secteur de la santé est devenu, au niveau mondial, un
nid de corruption qui compromet dangereusement la vie des
populations, principalement celles à faible revenu.

Les
différentes formes du fléau recensées au Burkina Faso ont pour
noms : rackets, pots-de-vin, ventes illicites de médicaments,
spéculations sur les lits d’hôpital, absentéisme, surfacturations,
passations de marchés truqués, détournements et vols de
biens médicaux, rétributions financières autres que les salaires
et avantages prévus, ... Selon le rapport 2006 de "Tansparency
International" rendu public le 1er février à Berlin, en Allemagne, il
existe une corrélation entre la corruption et l’offre des services
de santé.

Des enquêtes diligentées dans 45 pays du monde
montrent par exemple qu’aux Philippes, l’aggravation de 10% du
fléau de la corruption a entraîné la diminution de 20% du taux de
vaccination des enfants. Au Cambodge, le détournement des
fonds alloués à la santé publique joue négativement sur les
indicateurs de santé. Au Costa Rica, près de 20 % d’un crédit
international de 40 millions de dollars US destinés à
l’équipement sanitaire se sont volatilisés pour alimenter des
coffres privés.

A l’origine du phénomène, le manque de
scrupules de certains agents de santé. Tout en reconnaissant
que la majorité des employés remplissent leurs fonctions avec
diligence et intégrité, le rapport lève le voile sur des preuves de
fraude et de corruption dans les arcanes du système sanitaire.

"Des honoraires pour des services en fait gratuits"

Il souligne notamment que :
Les budgets publics pour la santé sont manipulés par des
fonctionnaires véreux.
Des hôpitaux sont transformés en self-services pour
l’enrichissement illicite de certains, avec des systèmes de
distribution, d’achat et d’approvisionnements peu transparents,
mais aussi avec plusieurs employés fantômes figurant sur les
listes de paie.
Des employés du secteur de la santé exigent des honoraires
pour des services qui sont en fait gratuits.

Au-delà des formations sanitaires publiques et privées, la
gangrène se niche surtout dans l’industrie pharmaceutique,
surtout dans la contrefaçon. Des investigations de
"Transparency International" signalent qu’à cause des
techniques agressives de commercialisation de plus en plus
développées par les lobbying de firmes pharmaceutiques, les
médecins sont poussés vers une préférence indue à certains
superflus au détriment des remèdes essentiels.

Ce qui
entraîne une augmentation de prescriptions qui ne sont pas
toujours basées sur les besoins réels des malades.
Conséquence : les chiffres d’affaires de l’industrie
pharmaceutique augmentent alors que diminuent les dépenses
de recherche indispensables au développement de nouveaux
médicaments qui pourraient sauver des vies dans les pays
pauvres.

A propos des contrefaçons pharmaceutiques,
"Transparency International" incrimine les paiements illicites qui
facilitent l’acheminement de médicaments contrefaits de leur
source au consommateur trompé. La lutte contre le VIH/Sida est
devenue une "poule aux œufs d’or", comme au Kenya où "des
hauts fonctionnaires ont créé des organisations fantoches pour
détourner les ressources vitales destinées à prendre en charge
les personnes infectées et affectées".

Fort de ce constat peu reluisant, "Transparency International" tire
la sonnette d’alarme sur la menace que la corruption fait peser
sur les Objectifs du Millénaire des Nations unies. Trois des
objectifs de cet engagement mondial étant liés au secteur de la
santé, l’ONG pense qu’aussi longtemps qu’on laissera se
développer impunément les germes de la corruption, les
progrès réalisés jusque-là pour lutter contre la "mortalité
infantile et néo-natale, le Sida et autres maladies" seront
compromis.

Le REN-LAC se propose de publier vos réactions, vos
suggestions, vos dénonciations (si cela est conforme à la
déontologie et à l’éthique professionnelle). Vos critiques et
suggestions sont les bienvenues. Pour toutes informations et
suggestions, contactez-nous à l’adresse suivante : Réseau
National de Lutte Anti-Corruption (REN-LAC) 01 BP : 2056
Ouagadougou 01, Tél. : 50 -33- 04- 73, Email : info@renlac.org,
site : http: //www.renlac.org Tél. vert : 80-00-11-22 (gratuit). Le
REN-LAC


6 recommandations contre la corruption

Pour plus de transparence, "Transparency International" fait 6
recommandations. Elle invite à :
1- Exiger des bailleurs de fonds et des gouvernements de
faciliter l’accès aux informations clés afférentes aux projets,
budgets et politiques sanitaires. Pour ce faire, les informations
relatives aux budgets doivent être disponibles sur Internet et
soumises à des audits indépendants.

2 -Adopter et mettre en application des codes de conduite pour
le personnel de santé et les entreprises du secteur privé ainsi
que l’organisation de stages de formation sur la corruption.

3 -Appliquer des règles de gestion des conflits d’intérêts dans le
cadre de la certification des médicaments et la délivrance des
licences pour les médecins.

4 - Soumettre à un contrôle indépendant et ouvrir à l’examen
minutieux du public les projets et les politiques relatifs à la
santé au niveau national et international.

5 - Rendre compétitives, ouvertes, transparentes et conformes
aux normes minimales de Transparency International les
procédures d’attribution des marchés publics. Pour ce faire, les
règles en matière de gestion des conflits d’intérêts doivent être
mises en application, et les entreprises impliquées dans des
actes de corruption doivent être mises en quarantaine. Par
ailleurs, les acteurs de ce secteur devraient également
s’engager à ne pas verser de pots-de-vin tels que stipulés dans
le Pacte d’intégrité de "Transparency International", et ce afin de
garantir l’égalité des chances pour tous les soumissionnaires.

6 -Engager des poursuites judiciaires rigoureuses contre les
corrompus et les corrupteurs afin de donner un signal fort pour
une tolérance zéro à l’égard de la corruption dans le secteur de
la santé. A cet effet, il est important de mettre en place des
mécanismes de contrôle pour assurer la protection des
dénonciateurs des actes de corruption au sein du
gouvernement, dans l’industrie pharmaceutique et au niveau
des industries biotechniques.

Le Pays

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