En effet, partout où elle a été sollicitée, elle a réussi à maintenir le statu quo dans le meilleur des cas et envenimer la situation pour la plupart. En regard de son envergure et des moyens d’action dont elle dispose, ses succès sont peu nombreux et par-dessus tout, son goût exagéré pour les discussions byzantines contribue de plus en plus à faire de cette organisation une coquille vide. Dernière illustration en date, les sanctions prises dans le cadre de la résolution de la crise ivoirienne ont fait tiquer plus d’un et pour cause !

Les acteurs politiques et institutionnels qui font tourner la Côte d’Ivoire en rond depuis septembre 2002 sont connus depuis cette date fatidique. Les protagonistes de la crise ne dissimulent ni leurs actions ni leurs intentions et même le plus benêt des observateurs est capable de montrer du doigt les têtes qu’il faut réduire et la manière de le faire si on veut véritablement sortir la Côte d’Ivoire de ce bourbier. Pas l’ONU.

Après avoir annoncé solennellement des sanctions contre les responsables du blocage de la situation, elle est passée aux actes et décidé l’interdiction de voyager et le gel de leurs avoirs à trois exécutants dont deux dans le camp du président Gbagbo et un dans celui des Forces nouvelles, le plus connu des trois étant Charles Blé Goudé surnommé "général de la rue" où effectivement avec l’appui d’une bande de chômeurs et de délinquants qui se disent patriotes, il met régulièrement à mal toute tentative de gestion diplomatique et raisonnée de la crise.

Connu surtout pour ses frasques et son irrévérence envers toute autre personne physique ou morale que le président Gbagbo, Blé Goudé n’occupe aucune fonction officielle connue et pouvant faire de lui une autorité susceptible de servir d’interlocuteur crédible. Il ne doit sa popularité qu’au seul Laurent Gbagbo dont on est en droit de penser aussi que c’est de lui qu’il reçoit toute directive lorsqu’il entreprend les actions intempestives par lesquelles il s’est illustré jusque-là. Les deux autres sanctionnés sont de parfaits inconnus dont le public n’a entendu parler que lors des déclarations onusiennes.

De quels avoirs disposent ces messieurs et dans quelle institution accessible aux Nations unies ?

Quelle envergure politique et quel charisme personnel ont-ils quant à la résolution de la crise ivoirienne pour qu’une interdiction de voyager les frappant influe même de façon minime sur la situation d’ensemble du pays ? Les leaders d’opinion responsables de cette crise sont connus et les destructions et autres manœuvres contre le processus de paix émanent de sources identifiables. Pourquoi alors laisser la proie pour l’ombre ?

A vouloir ménager la chèvre et le chou, l’ONU montre à la limite une incapacité manifeste de mener à bien la pacification de la Côte d’Ivoire. En sanctionnant de vulgaires marionnettes, l’ONU, par cette déhontée façon de sévir, laisse intacte une certaine capacité de nuire à cause de laquelle aucune sortie véritable de la crise n’est envisageable. Venant d’un organe de cette envergure, cette attitude est pour le moins surprenante et on ne sait pas s’il faut en rire ou en pleurer.

Luc NANA

L’Hebdo