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Grippe avaire : Nouveau fléau, nouvelle polémique

Publié le jeudi 16 février 2006 à 05h13min

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Les prouesses des nouvelles technologies de l’information et de la communication ont fini de consacrer l’avènement du village planétaire qu’est devenu le monde. En effet, des quatre coins du globe, les hommes ont la possibilité de communier ou de vivre en temps réel l’actualité politique, sportive, culturelle ou scientifique, etc.

Quant à la modernisation des moyens de transport, elle facilite et accélère le brassage des populations. Le bout du monde se trouve aujourd’hui à un jet de pierre.

Malgré ces avancées, l’homme reste à la traîne par rapport aux animaux qui, eux, depuis des millénaires, rallient les différentes parties du monde au rythme des saisons. C’est le cas des oiseaux migrateurs qui volent de continent en continent. Mais cela n’est pas sans conséquence.

A preuve, et pour coller avec l’actualité, l’Afrique, qui croyait que la grippe aviaire était une affaire des Asiatiques et des Européens, vient d’être frappée de plein fouet par cette épizootie, précisément au Nigeria, qui, avec ses quelque 120 millions d’habitants, reste sans aucun doute le pays le plus peuplé du continent noir.

C’est dire que le virus responsable de ce mal a, grâce à ses agents vecteurs que sont les oiseaux migrateurs, vaincu les distances. Depuis, c’est l’hécatombe aviaire au pays d’Obasanjo, où les éleveurs vivent des cauchemars, avec en filigrane un véritable désastre économique et social.

Au-delà de ce pays, c’est tout le continent qui est aujourd’hui fortement menacé, car avec la porosité des frontières, une volaille infectée peut facilement se trouver dans un Etat voisin.

C’est conscient de cela que les pays limitrophes ont tous décrété un embargo sur la volaille nigériane. Une mesure somme toute bonne, mais qui se révèle dérisoire quand on sait que cette grippe ne concerne pas seulement les poulets, les dindons, les canards ou les pintades, mais toute la gent ailée.

En Afrique, l’élevage extensif est presque la norme. Cela expose davantage la volaille, qui, le plus souvent, vit avec les humains dans les mêmes cours. C’est courant sous nos cieux de voir une poule picolant dans l’eau de boisson ou dans le repas qu’un enfant est en train de manger.

Le contact étant le mode de transmission de cette grippe, il est clair que les Africains y sont exposés, dans leur écrasante majorité, puisqu’il est rare de voir en campagne, et même en ville, une famille qui n’élève pas de poule, de canard ou de pigeon.

Le berceau de l’humanité est donc en danger et la communauté internationale devrait s’en inquiéter et lui venir massivement en aide. Mais encore faut-il que les Etats acceptent cette assistance ! Sur ce point, l’unanimité est loin d’être un acquis.

L’exemple type nous vient du Niger de Mamadou Tandja, où des cas suspects de mort de volaille ont été signalés par le représentant de l’Organisation des Nations unies pour l’agriculture et l’alimentation (FAO), et Niamey, comme à son habitude, a vite fait de ruer dans les brancards pour démentir vigoureusement cette information.

Il se pourrait que les autorités nigériennes aient raison, mais quand on sait le volume du trafic à la frontière entre le pays de Tandja et le Nigeria, il est clair que le Niger est à haut risque. Niamey aurait pu faire montre de prudence plutôt que de nier énergiquement ces allégations de la FAO.

Parce que même si aucun test n’a confirmé la présence de cette épizootie au pays du kilichi (viande séchée), rien ne dit qu’elle n’y est pas non plus. On peut comprendre que les autorités ne veuillent pas laisser la panique s’instaurer dans le pays, mais tout de même !

Il faut savoir faire des déclarations prudentes face à un mal aussi incontrôlable que la grippe aviaire, surtout qu’il est de notoriété publique que Niamey ne dispose aucunement de moyens pour venir, seul, à bout de ce mal qui est à sa porte, sans l’aide de la communauté internationale.

On se rappelle, comme si c’était hier, l’inopportun débat sémantique qui a eu cours dans ce pays lorsque la faim décimait ses populations. Les autorités, le président Tandja en tête, déclaraient à qui voulait les entendre que leur pays vivait non pas les affres de la famine, mais une crise alimentaire.

Cette querelle sémantique n’a en rien soulagé les pauvres hères qui, eux, n’attendaient que l’aide internationale pour pouvoir se mettre quelque chose sous la dent.

A l’image de N’Djamena, Niamey aurait dû faire preuve d’humilité, de prudence, et appeler la communauté internationale à l’aider à se prémunir contre cette grippe, si d’aventure elle gagnait son territoire.

San Evariste Barro

Observateur Paalga

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