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Municipales 2006 : Mots fléchés pour maux croisés

Publié le samedi 11 février 2006 à 07h02min

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Quelqu’un soulignait que ’’les personnes, comme les sociétés, changent souvent leurs buts et leurs chemins, peuvent revenir sur leurs pas et repartir dans une direction nouvelle, s’ils pensent s’être engagés dans un mauvais chemin ou dans un cul-de sac’’. N’est-ce pas ce à quoi on assiste en ce moment au sein des différentes formations politiques les plus en vue ?

Avec le dépôt des listes des candidats pour les municipales prochaines, le jeu de massacre à huis clos s’est effectué au niveau de certains partis, en attendant la troisième mi-temps. Le constat est qu’un grand parti n’est pas seulement et toujours une machine à gagner des élections, c’est aussi et souvent celui-là où se concentrent le plus de nostalgies antagonistes, mettant à rude épreuve son fonctionnement lui-même : les querelles de personnes n’y étant pas rares.

Dans certaines formations, on a semble-t-il si mal manuvré que l’on en est arrivé au constat effectué lors des tempêtes maritimes : les flots mettent les choses légères à fleur d’eau. Où aura-t-on mis l’influence, l’expérience et, surtout, les capacités réelles de mobilisation des uns et des autres ? Beaucoup pensent que par leurs façons d’agir des partis ont porté un coup dur à leur crédibilité au grand dam de leurs dirigeants qui s’y attendaient le moins.

La plus forte illustration du phénomène se retrouve au niveau du parti majoritaire : l’hypothèse d’une saignée dans leurs rangs ne semblait pas avoir traversé l’esprit de nombre de militants du CDP, ce qui explique cet étonnement parfois teinté de rancurs que l’on entend ici et là : on pousse même la note à l’indignité au motif que le parti aura tout donné à ces ’’transfuges’’. Cette vision simpliste du phénomène, en même temps qu’elle n’apporte absolument rien au débat de fond qui devrait s’instaurer, n’est pas pour apaiser les frustrations futures. Du reste, ceux qui s’intéressent à ce grand jeu d’équilibristes savent bien qu’en politique la moitié des bonnes actions militantes sont des spéculations et l’autre moitié des ingratitudes et des vengeances.

Ici et là l’on entend dire que ceux qui sont partis n’étaient pas forcément les meilleurs ! Il y en a qui ont parlé, et continuent d’évoquer la nécessité historique inhérente à tout parti de se soumettre au principe de la décantation. Cependant, cette nécessité semble dissimuler assez mal certaines querelles de clochers, voire de clans à une échelle supérieure.

Qu’on l’admette ou pas, ceux qui sont partis jettent un peu sur le parti majoritaire une tache d’incompréhensions, une de plus quand on sait ce que militer au sein de ce parti signifiait aux yeux de l’homme de la rue, il y a peu de temps encore : le soutien de nombre de partis politiques à la candidature du président Compaoré aura constitué une véritable cure de jouvence pour le parti majoritaire ; une cure qui, selon certains observateurs, gagnerait à être renouvelée au vu de ce qui se passe : longtemps dominant, peu habitué aux remous et, conséquemment mal équipé pour, l’étonnement constaté au sein de ce parti n’est en fait qu’une suite logique des choses. En effet, en économie, on sait que le monopole est aussi mauvais à la longue pour celui qui le détient que pour ceux qui sont exploités. En politique aussi...

Plus que jamais, le terme « campagne de proximité » est en train d’acquérir pleinement ses lettres de noblesse après ces « fugues » constatées au sein du parti majoritaire. Ici et là, dans le silence des villas et des chaumières, des actions seraient menées, visant, semble-t-il, à exorciser le fantôme de la peur d’autres coups de théâtre, notamment la perte de certaines municipalités jugées suffisamment importantes.

Car au-delà de leur caractère local, les municipales prochaines représentent aux yeux de tous les acteurs politiques le test majeur qu’il faut réussir à tout prix, la voie débouchant sur les législatives de l’année prochaine. C’est sans doute la raison pour laquelle ces municipales font tant de bruit !

Mais les ragots qui s’y attachent sont plus révélateurs de passions et convictions militantes de ceux qui les diffusent que des réalités et de la profondeur du débat concernant la discipline au sein des formations politiques quand on sait que dans une structure qu’on croit monolithique, la moindre fêlure peut être dangereuse...

Pour l’heure, les partis ayant accru leur capital en militants se frottent les mains mais ne devraient pas oublier que les engouements sont aussi rapides que sont subites ses lassitudes et, comme l’on dit, ’’quand il neige sur les montagnes, il fait froid dans les vallées’’. Dès lors, on pourrait se poser la question de savoir si en changeant d’étendard, ceux qui sont partis vers d’autres bataillons n’auront-ils pas simplement joué la mouche du coche ! Il n’y a plus que trente et un jours à attendre pour voir se dessiner ce véritable ’’patchwork’’ dans le paysage politique du Faso.

A. Pazoté

Journal du jeudi

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