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Lotissements à Zaghtouli : Mise au point de Naaba Saaga

Publié le vendredi 10 février 2006 à 07h48min

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Comme un peu partout, les lotissements à Zaghtouli ont défrayé la chronique en son temps et continuent même d’alimenter les conversations dans certains cercles. Sur le sujet, nous avons reçu du chef dudit village la mise au point qui suit.

Suite à un écrit paru dans la presse ces derniers temps, je me dois de donner des éclaircissements pour rassurer toute la population de Zaghtouli, mais aussi tous ceux qui se sentent concernés par le processus de développement de notre village. En ma qualité de chef traditionnel et m’estimant garant de l’ordre social, j’ai convoqué cette assemblée générale pour faire la lumière sur l’écrit intitulé « Lotissement de Zaghtouli : des expulsés en colère ».

Rejet de la paternité de l’écrit

La population de Zaghtouli, les vieux et les vieilles, sont témoins, les jeunes sont présents et rejettent systématiquement la paternité de l’écrit. Par ma voix, la population présente ses excuses à Madame le maire de Boulmiougou et à toutes les autorités qui se sont senties touchées par lesdits propos. Jamais, la "vaillante population" de Zaghtouli ne volera aussi bas !

En tant que chef du village, la population réunie très nombreuse (environ 600 personnes) ce jour 5 février, me demande de réaffirmer notre engagement à poursuivre les efforts pour l’extension du lotissement. Aussi, la population rejette toute vision étriquée qui consisterait à haïr les « étrangers ». Cela ouvrira la porte à la xénophobie et en tant que garant de l’ordre social, nous ne pouvons admettre cela. Pris dans sa définition pure, le terme n’aura pas de terrain d’application au Burkina Faso, tant le Pays des hommes intègres est réputé être la terre d’une hospitalité légendaire.

Les faits

Après le lotissement commencé en 1995, nous avons approché les autorités compétentes pour signifier la nécessité d’une extension. Cela pour les raisons suivantes :
répondre aux sollicitations de la population ;
poursuivre le processus d’urbanisation ;
satisfaire les manquements du lotissement passé.

La présence de cette foule témoigne de l’intérêt de la première raison. Que faut-il à un jeune pour s’épanouir ? A notre sens, c’est l’emploi et l’habitat.

On peut donc se passer de commentaires à ce niveau. Nous avons le devoir d’encourager et d’accompagner les activités de renforcement des droits humains, d’amélioration du cadre de vie des citoyens et de création des conditions objectives de l’épanouissement de toutes les couches sociales. Des enquêtes y relatives ont été faites par les structures compétentes pour vérifier la réelle nécessité de l’extension.

Des résultats lisibles et visibles sont là. Pour le processus de développement, les yeux francs, les âmes pures peuvent accepter que parmi les quatre (04) villages que comptent l’arrondissement de Boulmiougou, Zaghtouli poursuit sa marche audacieuse, lentement mais sûrement, vers une urbanisation grandissante : eau, électricité, cadre de vie, cités, centres d’enseignement professionnel, sièges de grandes associations, présence de l’usine Diamond Cément... Bref, ce n’est pas suffisant, mais ce sont des signes d’un décollage. Avec la prochaine inauguration de la Maison des jeunes, construite par Diamond Cément, et l’installation du site de la SONABEL, nous estimons que des éléments ne manquent pas pour regarder positivement l’avenir de notre localité. Il n’en demeure pas que les critiques constructives sont nécessaires. La pluralité des points de vue accouche d’une excellente feuille de route.

Mais le "chien aboie contre son propriétaire, il ne le mord pas". Seul le dialogue rapproche les hommes puisque nous sommes doués de raison. Que nous ayons le désir de guérir à travers notre "médicament", c’est bien mais attention, cela ne doit pas emporter le malade, car ce sera criminel.

La réalité des faits

Les travaux de l’homme sont toujours critiquables. La perfection n’est qu’un rêve. Elle n’existe nulle part à l’absolu. Mais il faut toujours instaurer un dialogue constructif, transcendant notre moi souvent honteusement subjectif. Il y a toujours du chemin à faire, mais la petite distance déjà parcourue, loin d’être un modèle dans toute la zone périurbaine de Ouagadougou, n’est pas pire que partout ailleurs.

Plaise à 2006 de nous aider à prendre plus conscience du bien collectif et de l’intérêt général plutôt que de cracher du venin sur les acquis de l’autre. _Pourtant, l’autre existe, cet autre moi, différent de moi, sourit ou rougit selon le climat du moment. Débarrassons nos cœurs des perfides épines de la médisance, de la nuissance et de la jalousie.

Nous_ restons toujours dans la même dynamique, celle qui exclut le mensonge flatteur et qui fait de la critique honnête et constructive son ferment. Puissent les forces cosmiques de 2006, sous la baguette sacrée du Tout-Puissant, amener l’humanité à faire un pas supplémentaire en direction du bien, dans toute l’acception de ce terme. Le tout n’est pas de vieillir d’un an tous les ans, le plus gros des efforts serait de s’assagir tous les ans, pour notre bien et pour l’intérêt de la postérité.

Cet écrit ne peut émaner de politiciens

Si cet écrit émane de politiciens, la population estime qu’il reste du chemin à faire pour ces individus. C’est dommage que certains estiment que la politique est un vaste champ où l’on sème à volonté le mensonge, la calomnie et la traîtrise.

A notre humble avis, il n’y a pas de mauvais parti politique, il n’y a que de mauvais politiciens. Ce n’est pas mal de lire "Jacques le Fataliste et son maître", roman de Didérot publié en 1796, mais à côté, pour équilibrer votre vue, il vous aurait fallu lire aussi "Comment donner à vos enfants une intelligence supérieure" de Seigfried et Thérèse Engelman, collection Marabout, 1978, pour que vos jugements soient assez équilibrés, dénués d’imagination stérile.

Car nous pouvons nous tromper par les mirages de l’imagination, cette « maîtresse d’erreur », selon Pascal. Nous sommes certains que des politiciens ne peuvent rejeter le lotissement pour ces jeunes et ces vaillantes femmes qui n’ont pas, leur chez soi, car la politique devrait être un schéma de développement et non de destruction.

Ne soyez pas l’antithèse de notre développement local ! Et tenez-vous pour dit, la terre appartient à l’Etat, au sens moderne. Au sens traditionnel, n’importe qui ne fait pas de dispute au sujet de la terre, surtout quand c’est pour accuser des défunts ou défendre des causes injustes. Ne portez pas un fardeau qui vous dépasse !

Renseignez-vous sur le prix d’une maison de 6 tôles. Recensez parmi la population résidente les expulsés de Côte d’Ivoire et vous militerez pour l’extension du lotissement. A côté de votre liberté d’opinion, vous devez apprendre à bien installer votre devoir de ne pas porter atteinte à l’intérêt de toute la population.

Je ne puis me taire ! S’il y avait eu des erreurs lors du lotissement passé, sachez que l’erreur n’annule pas la valeur de l’acte. C’est donc dire que la « vaillante population » de Zaghtouli considère comme analphabète politique, tout politicien qui croit convaincre par le mensonge, la division et l’exclusion !

Ces politiciens-là, nous les considérons comme des pyromanes de la démocratie. Or, dans ce siècle où la science et la technologie permettent à toutes les frontières de s’estomper et où la connaissance et l’expertise deviennent les seuls critères de compétence, la « vaillante population » de Zaghtouli s’étonne qu’on en soit encore à des considérations aussi primitives et grégaires.

Avant de donner des leçons de morale aux autres, il faut être soi-même moral, et se regarder dans le miroir social pour que les yeux ne soient pas plus gros que le ventre. Il y a eu un audit sur le lotissement passé et les résultats sont là, et tout esprit honnête peut aller vérifier. Pour les lacunes, même au sein de nos familles, il y a quelquefois des imperfections. Mais je refuse de céder à l’envie de dire avec les participants que "la tritesse du mouton n’enlève rien à la fête au village". Je suis un rassembleur. Et mon âme ne voit et n’évalue une offense que pour mieux pardonner.

Je sais être ferme comme Kennedy, l’ancien président américain, dans la crise de fusée qui l’opposait à la Russie en 1962, mais je m’oblige à être pacifiste comme Martin Lutter King, prix Nobel de la paix en 1964. Comme le déclare l’Ecriture sainte : "Il doit en être ainsi". Je ne saurai terminer mon propos sans réitérer mes vœux à tous les journalistes et à tous les Burkinabé, et je vous invite à l’inauguration de notre Maison des jeunes le 11 février prochain, à partir de 9 heures.

Recevez tous mes respects.

Bonne année 2006 !

Le chef de Zaghtouli

Observateur Paalga

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