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La jeunesse de Thyou à son préfet : "Rendez-nous notre maison"

Publié le jeudi 9 février 2006 à 03h42min

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Le message ci-après est une lettre ouverte de la jeunesse du département de Thyou au haut-commissaire du Boulkiemdé. Elle invite ce dernier à l’aider à récupérer sa maison des loisirs, à laquelle le préfet l’empêche d’accéder.

Monsieur le Haut-Commissaire,

nous avons l’honneur de venir très respectueusement, par la présente, porter à votre connaissance ce qui suit : voilà 2 (deux) ans que Mme Sangaré/Ouédraogo Justine est affectée comme préfet du département de Thyou, province du Boulkiemdé.

A son arrivée à Thyou, toute la population, particulièrement nous, les jeunes, était très contente parce que la préfecture est restée longtemps sans titulaire suite au départ de son prédécesseur pour raison de service.

Mais à notre grand étonnement, madame le préfet nous a pris pour cible pour mieux asseoir son autorité par des faits qui se résument comme ci-dessous et qui nous laissent pantois et perplexes :

Le village a été doté d’une maison des jeunes par le ministère en charge des jeunes, et comme son nom l’indique, mise à la disposition de ceux-ci.

En attendant sa remise officielle, la maison a été placée sous la responsabilité des jeunes par la remise des clés à ces derniers. Il en est de même du matériel qui y était.

Quelque temps seulement après son arrivée, madame le préfet, sans chercher à s’approcher de nous pour comprendre les faits et après une visite des lieux, accompagnée de l’agent forestier, d’un comptable communal à la retraite, a procédé à un inventaire exhaustif du matériel et exigé que nous lui remettions les clés, séance tenante.

Nous avons expliqué que la maison étant sous notre responsabilité, nous ne pouvions pas pour le moment lui remettre les clés, surtout qu’elle nous demande, par ailleurs, d’en assurer la garde sans les clés.

Nos démarches infructueuses

Nous pensons que c’est à partir de là qu’a commencé notre calvaire. Comme tout le monde le sait, l’homme s’épanouit à travers le travail et les loisirs.

Ayant adressé une demande d’autorisation de danser dans notre maison, nous nous sommes heurtés à un refus de madame le préfet, avec cette réserve que le refus pouvait être levé à condition que la soirée dansante se tienne dans un bar géré par un particulier, qui loue à 5000 F ses locaux.

Alors que nous pouvions le faire au sein de notre maison à moindre coût, tout en engrangeant des recettes pour l’amortissement du matériel mis gracieusement à notre disposition par le ministère de tutelle !

Nous avons alors refusé la proposition de madame le préfet ; ce qui l’a conduit à convoquer une assemblée qui, outre les jeunes, comprenait le chef du village, le comité des sages et la population dans ses différentes composantes.

Au cours de cette assemblée et après les explications et les débats qui s’en sont suivis, la décision a été prise que les jeunes avaient le droit d’utiliser leur maison. Nous pensons que cette décision n’a pas été du goût de madame le préfet, à en juger par les relations conflictuelles qui ont suivi cette décision. En témoignent

la note circulaire restrictive des autorisations de soirées dansantes. Son refus de nous signer une autorisation de danser le 23 décembre 2005 sous prétexte que le Responsable administratif villageois (RAV) n’ayant pas accepté de nous signer l’autorisation, elle refuse en conséquence, elle aussi, de la signer.

Etonnés, nous en avons informé la Brigade de la gendarmerie de Sabou qui, à notre grande surprise, nous a informés qu’un conseil des ministres a décidé depuis belle lurette la suppression de la fonction de responsable administratif villageois. Pourquoi alors, madame le préfet nous fait des noises pour un RAV fantôme ?

Nous nous sommes alors sentis floués et exploités depuis très longtemps, car il fallait, pour chaque demande d’autorisation de danser, et sur recommandation de madame le préfet, verser 300 à 500 F à ce RAV juridiquement inexistant.

Notre révolte était telle que nous avons décidé de danser ce jour malgré le refus de madame le préfet commandant le cercle de Thyou.

Informés de notre décision de danser, une délégation de quatre (4) personnes âgées est allée à notre insu rencontrer madame le préfet pour lui demander de nous autoriser, à titre exceptionnel, de danser.

Madame le préfet, de façon catégorique, a dit non. Nous avons néanmoins dansé.

Le lendemain matin, le président de la jeunesse et les 4 médiateurs dont nous avons parlé ci-dessus ont reçu chacun une convocation à se présenter à la Brigade de gendarmerie de Sabou dès réception.

A la gendarmerie, le commandant de brigade, après avoir entendu le président et les médiateurs, a tenté une conciliation entre les deux parties, en demandant à madame le préfet, par l’intermédiaire des médiateurs, de se rendre à la brigade.

Les médiateurs sont ainsi repartis à Thyou. De 14 heures à 17 heures ils ont fait le pied de grue devant la résidence de madame le préfet, qui ne les a point reçus. Motif : madame le préfet dormait.

Découragés, les médiateurs ont téléphoné au commandant de brigade pour lui signifier l’impossibilité d’entrer en contact avec madame le préfet.

Le commandant de brigade, informé par ailleurs de l’excitation des autres jeunes restés au village du fait de la rétention de leur président à la brigade de gendarmerie, a pris la responsabilité de libérer le président et les médiateurs.

Rendez-vous a été pris pour le 27/12/05 en vue de la résolution définitive du problème. Comme convenu, à la date du 27 décembre, les concernés se sont rendus à la gendarmerie pour répondre à l’invite du commandant de brigade. Sur les lieux, le commandant les a tous libérés parce que madame le préfet avait besoin de la maison des jeunes pour une conférence qui devait se tenir du 27 au 28 décembre inclus.

C’est ainsi que retournés à Thyou, les jeunes ont pris toutes les dispositions nécessaires pour la tenue de cette conférence.

Son refus (encore) de signer une demande de danser le 10 janvier 2006 à l’occasion de la fête de la Tabaski, et cela, pour des raisons, dit-elle, de sécurité.

A notre grand étonnement, une autre demande, adressée à madame le préfet pour danser le 10 janvier 2006, fut autorisée, et s’est effectivement tenue dans un bar, à quelque 200 m de notre maison.

Nonobstant ces refus, nous avons encore introduit une dernière demande pour le vendredi 13 janvier 2006, jour de marché. Cette demande a reçu un avis défavorable encore pour raisons de sécurité.

Difficiles d’avoir un timbre à la préfecture de Thyou

Monsieur le Haut-Commissaire, comprenez notre interrogation devant ces refus. Sommes-nous menacés ou sommes-nous une menace ?

Monsieur le Haut-Commissaire, sans entrer dans la délation, pour votre information objective, des problèmes autres que ceux de la jeunesse ne manquent pas :

obtenir un timbre départemental à la préfecture de Thyou est un véritable parcours du combattant parce que ces timbres sont détenus par un agent bénévole qui est très rarement au bureau et qui se ballade en tous lieux et en tous temps avec les timbres.

S’il y a urgence, on est obligé de rechercher ce dernier partout dans le village, et à défaut, on est obligé de se rendre à Sabou (13 km) pour en acquérir.

On en est à se demander si c’est l’affaire d’un particulier ou celle de la préfecture, et aussi si la volonté politique de nos autorités de rapprocher l’administration de l’administré n’est pas un leurre à Thyou.

Les animaux en fourrière : à Thyou, les animaux en divagation qui étaient saisis sur ordre de madame le préfet étaient aussitôt vendus ou tués sans aucune publication ou information officielles.

Pour ne citer que quelques exemples, il y a le cas patent d’un citoyen qui, s’étant rendu à la préfecture à la recherche de son animal, n’a trouvé de celui-ci que la peau.

Madame le préfet, après avoir reconnu les faits, a néanmoins dit qu’il n’est pas question de parler de remboursement.

Un autre citoyen, après avoir payé 1500 F de taxes de fourrière, a réclamé en vain un reçu de paiement. Monsieur le Haut-Commissaire, face à cette situation qui nous préoccupe et qui ne permet pas une collaboration avec madame le préfet, nous vous prions de bien vouloir trouver une solution pour que la jeunesse puisse s’épanouir et apporter sa contribution, si modeste soit-elle, dans le village.

Dans l’espoir d’une suite favorable à notre requête, nous vous prions d’agréer, Monsieur le Haut-Commissaire, l’expression de nos sentiments très respectueux.

Ont signé :

Le Président Koala Victor

Président du COGES Zongo Tasséré

Observateur Paalga

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