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Administration de la Justice : « Ceux qui ne sont pas avec nous sont contre nous... »

Publié le mercredi 8 février 2006 à 07h36min

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Comme on peut le constater, les commentaires sur l’Administration judiciaire de notre pays ne sont pas prêts de finir. Le président écrit, suite à la mise au point du ministre de la Justice, Garde des sceaux, témoigne de la passion qui empreind ce débat.

Opinion apparemment largement partagée, à la lecture de la mise au point du Garde des sceaux parue dans L’Observateur du 27 janvier.

Notre ministre de la Justice, Garde des sceaux de l’Etat, réplique aux déclarations « tendancieuses et haineuses de monsieur Guy Hervé Rommel Kam » parues, semble-t-il, dans le numéro 6562 du même journal ;

Auquel, pour me faire une idée, je me reporte.

Pour y lire, à la page indiquée, non un écrit de monsieur Kam, mais une déclaration du Conseil Syndical du Syndicat burkinabé des magistrats.

Monsieur Kam n’est tout de même pas, à lui tout seul, le Conseil syndical... Ce petit juge qui nous défie...

Résumons. Le SBM publie une déclaration dans laquelle il dénonce la nomination jugée par lui irrégulière d’un magistrat au Conseil constitutionnel.

Admettons, comme le suggère le ministre de la Justice, que le SBM ait fait une mauvaise analyse des faits et du droit. Et que le ministre souhaite le relever. A-t-il besoin pour cela de se servir d’injures et d’attaques personnelles ?

C’est vrai que le ministre a publiquement et clairement expliqué sa conception de la hiérarchie dans la magistrature : « comme dans l’armée ». Par conséquent, on peut comprendre que la contradiction l’insupporte.

Au point de ne plus pouvoir réagir avec sérénité ? Pourtant, même dans l’Armée, on sait que celui qui a vraiment de l’autorité n’a pas besoin d’être autoritaire... Mais de quoi s’agit-il donc ?

Le point de Droit :
la Chambre constitutionnelle rend un arrêt déclarant une disposition de la loi du 27 avril 2000 inconstitutionnelle uniquement en ce qu’elle « ajoute une condition non prévue par la Constitution » .

Dans le même temps, la même Chambre affirme que le rôle de la loi organique est de « compléter ou d’expliciter la Constitution ».

Sauf qu’entre ces deux affirmations, les hauts magistrats ont oublié de nous expliquer comment on peut compléter sans ajouter ;

Du moment ou le législateur reste dans l’esprit du Constituant, et précise en les détaillant le sens des dispositions constitutionnelles, il serait bien qu’on nous précise en quoi il viole la Constitution. Peut-on apprécier la conformité d’une loi à la Constitution sans rechercher quelle était la volonté du Constituant ?

De l’indépendance et de l’efficacité du Conseil constitutionnel Or, il est clair que le Constituant de 1991 a voulu instituer un Conseil constitutionnel à la fois indépendant et efficace.

Pour ce faire, il a voulu un Conseil de 9 membres, en conférant au chef de chaque pouvoir le droit d’en nommer 3 :

3 personnalités nommées par le président du Faso, chef de l’exécutif ;

3 magistrats nommés par le Président du Faso, chef du Pouvoir judiciaire (dont il préside la plus haute instance, le Conseil supérieur de la magistrature) ;

3 personnalités nommées par le président de l’Assemblée, chef du pouvoir législatif.

Si tel n’avait pas été l’intention du Constituant, il lui aurait été plus simple d’édicter que le Président du Faso nomme 6 conseillers dont 3 magistrats, et le président de l’Assemblée 3 personnalités.

A mon humble avis, les députés, dont plusieurs ont été les rédacteurs de la Constitution, ne l’ont en rien violé. Autre problème : Pourquoi le Président du Faso promulgue-t-il la loi avec la disposition déclarée inconstitutionnelle ? En a-t-il le droit ? Pas à ma lecture de la Constitution.

Mais s’il choisit de le faire, la disposition, même déclarée inconstitutionnelle, doit s’appliquer. Par conséquent, l’avis du CSM aurait dû, n’en déplaise au ministre Badini, être requis.

Troisième problème, il est vrai plus politique que juridique : lorsqu’une disposition légale est déclarée inconstitutionnelle, le Président du Faso ne peut promulguer la loi que sans la disposition déclarée inconstitutionnelle, et à la condition que celle-ci soit séparable du reste du texte. Sinon, il doit renvoyer le texte à l’Assemblée pour y être relue.

Mais comme le ministre lui-même avoue disposer de juges acquis, on court le risque très grave que toute disposition légale qui ne lui plaît pas soit expurgée de la loi par les soins du Conseil constitutionnel, puis le reste de la loi promulguée en toute légalité.

C’est là une très grave question politique, mais comme les politiciens censés être de l’Opposition eux-mêmes ne semblent pas s’en émouvoir, je ne vais pas me fatiguer outre mesure...

Dernière chose. Un conseil. A Kam Guy Hervé Rommel et aux juges pas ou insuffisamment acquis : laisser le ministre tranquille. C’est le seul qui ait le droit de se contempler dans le lac.

Dans la transparence et la légalité. Si vous ignorez mon conseil, alors c’est clair : vous êtes manipulés.

Par qui ? Vous avez le choix : le Pcrv, Hermann, Gbagbo... N’oubliez jamais : Ceux qui ne sont pas avec nous sont contre nous.

B. Tienfola Traoré 01 BP : 7029 Ouaga 01

L’Observateur

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Vos commentaires

  • Le 8 février 2006 à 22:24, par Kéré, Nancy En réponse à : > Administration de la Justice : « Ceux qui ne sont pas avec nous sont contre nous... »

    Monsieur TRAORE,

    Le titre de votre article est tendancieux. A mon humble avis, seul le Conseil Constitutionnel demeure compétent pour censurer les dispositions qui ne sont pas conformes à la Constitution. Et dans l’hypothèse querellée, la Constitution me semble d’une clarté limpide à l’instar de l’eau de roche. Pour le reste, il s’agit d’un mauvais procès que vous faites au Garde des Sceaux qui doit également, à l’instar des autres concitoyens, avoir une opinion sur le respect des règles constitutionnelles. En évoquant l’idée des "juges acquis" il me semble que le Garde des Sceaux a voulu simplement préciser la qualité des juges qui partagent cette idée du respect des règles constitutionnelles. C’est mon humble avis et je pense que l’interprétation qui est faite de ces propos me semble excessive. Il n’y a pas de "juges acquis" à la cause d’un pouvoir ou d’un Ministre de la justice, mais, au contraire, des juges qui jugent en conformité des lois votées par les Représentants du peuple, les députés. A défaut, on prépare de futurs "Burgauds" en puissance qui jetteront des accusés innocents en prison sans ménagement.
    Alors Cher TRAORE, en dépit de la liberté d’expression, chère aux journalistes et à tous, aménagez, autant que faire se peut, les modalités des titres tonitruants de vos articles, car, notre démocratie est encore fragile et en constance construction. C’est mon avis et je l’assume. Kéré, Nancy

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