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Municipales 2006 : Des recours “ vicieux ” en annulation de candidatures rejetés à Bobo

Publié le lundi 6 février 2006 à 08h14min

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Le tribunal administratif de Bobo-Dioulasso, sis au secteur 6 (Bolomakoté) a vécu une ambiance bien particulière ce 3 février 2006. Il avait en effet à son rôle des requêtes aux fins d’annulation de candidatures aux élections municipales du 12 mars 2006 formulées par plusieurs personnes physiques au nom de partis politiques en lice pour ce scrutin.

Au regard des enjeux contenus dans ces requêtes, on peut dire que le verdict a accouché d’une souris. La déception a été à la hauteur des illusions caressées par les uns et les autres même si la longueur de l’audience (de 9 h à 18 h 30) et les débats laissaient penser à un “ cataclysme ”.

Depuis sa délocalisation, pour cause de travaux de réfection des bâtiments, c’est bien la première fois que le tribunal administratif de Bobo-Dioulasso a accueilli autant de monde. Dehors, automobiles, engins à deux roues donnaient une idée du nombre de personnes à l’intérieur. Au regard des enjeux politiques en présence, des éléments de la Compagnie républicaine de sécurité (CRS) étaient là pour donner un coup de main à leurs collègues de la Garde de sécurité pénitentiaire (GSP) et contenir tout débordement éventuel. A l’intérieur, la salle d’audience s’est avérée exiguë pour le public.

La configuration de cette salle en disait long sur les forces en présence. La première rangée était majoritairement occupée par les partis opposés au Congrès pour la démocratie (CDP). On y notait la présence du vice-président de l’Alliance pour la démocratie et la fédération/ Rassemblement démocratique africain (ADF/RDA), Mamadou Koné, du secrétaire général de l’ADF/RDA pour les Hauts-Bassins, Balamine Diané, du président de l’Union pour la république (UPR), Albert Sanou, d’Amadou Traoré, également de l’UPR.

A l’opposé de cette rangée, celle du fond rassemblait les hommes du CDP et plus précisément ceux proches du député Salia Sanou. Il s’agit notamment du député Alfred Sanou, d’Ardjouma Sanou dit Dutronc et de Sidi Sanogo. Quant à la rangée du milieu, elle était d’une coloration plus neutre et apparaissait comme une “ zone tampon ” circonstancielle. Elle était en effet occupée en grande majorité par les membres des structures de la Commission électorale nationale indépendante (CENI), des journalistes venus en grand nombre et quelques curieux.

Des enjeux politiques de taille

Le jeu en valait bien la chandelle puisque parmi ces requêtes figuraient celles de l’UPR qui voulaient que le tribunal (présidé par le juge Edilbert Somé) annule les candidatures de Balamine Ouattara (DG du BBDA), candidat inscrit au secteur 1 (Dioulasso-bâ) dans l’arrondissement de Konsa et Thomas Sanou (président du CES) inscrit au secteur 23 (Kiri) dans l’arrondissement de Dô.

De telles annulations, si elles s’avéraient effectives éliminaient d’office le CDP de la course aux municipales dans ces deux arrondissements au regard de l’alinéa 3 de l’article 246 du code électoral. Il y est stipulé en effet que : “ Les partis ou regroupements de formations politiques ne sont pas tenus de présenter des listes dans toutes les communes ou dans tous les arrondissements. Toutefois, ils sont tenus de présenter des listes dans les secteurs d’une même commune ou d’un même arrondissement ”.

Par ailleurs, le CDP, à travers Salia Sanou, Alfred Sanou et Michel Ouédraogo réclamait “ la tête ” de Issouf Ouattara parce que ce dernier a démissionné de l’ADF/RDA pour devenir un de ses militants tout en restant candidat du parti de l’éléphant. Il est à noter ici que ce dernier est le 2e sur la liste ADF/RDA du secteur 9 (Accart-ville) emmenée par Célestin Koussoubé, maire de la commune de Bobo-Dioulasso. Si sa candidature était annulée, cela invaliderait du même coup la liste ADF/RDA du secteur 9 et éliminerait de manière subséquente ce parti dans l’arrondissement de Konsa.

D’un autre côté, il y avait le recours en annulation contre la candidature d’Amadou Traoré de l’UPR au secteur 25 (Kua). Si la requête était acceptée par le tribunal administratif cela signifierait que ce parti serait déclaré “ non partant ” dans l’arrondissement de Dafra. Inutile donc de dire que c’était des combats de titans que se livraient les partis politiques les plus en vue à Bobo pour l’ “ équilibre de la terreur ”.

Ainsi, à lui seul, le CDP Houet avait introduit des recours contre vingt et une (21) personnes parce que soit, ces candidats ne remplissaient pas à ses yeux les conditions d’âge, soit parce qu’ils se sont inscrits sur plusieurs listes électorales, ou parce que ces personnes, paradoxalement, ne sont même pas affiliées aux partis politiques qui les présentent. En outre, ce parti jugeait certaines personnes inéligibles pour cause d’incompatibilité ou bien déclarait des listes irrecevables pour forclusion. Quant à l’UPR, elle dénonçait les candidatures de Balamine Ouattara et Thomas Sanou pour cause d’incompatibilité et pour non existence d’intérêts économiques et sociaux au secteur 23.

Un verdict à “ valeur pédagogique ”

A l’issue des débats qui ont révélé les coups parfois tordus que les partis politiques se sont donnés ou les montages orchestrés pour nuire à un candidat, le tribunal a débouté les requérants dans la majorité des cas. Ainsi, en dehors des listes PDP/PS de Padéma et de Koundougou, des candidatures d’Evelyne Nakoulma (au titre du PAI à Logofoursso), de Mamadou Sanou (candidat sur les deux listes de l’UPR et de l’ADF/RDA dans le village de Dafinso), toutes les listes et candidatures ont été validées par le tribunal administratif de Bobo-Dioulasso, qui visiblement, n’a pas voulu “ taper dans la termitière ”.

La montagne a donc accouché d’une souris. Ce qui donne une “ valeur pédagogique et d’avertissement ” aux audiences du 03 février dernier. Et comme le dit l’adage. “ Un homme averti en vaut deux ”, a moins de vouloir se faire hara-kiri, nous avons la conviction que les partis politiques seront davantage regardants sur l’élaboration de leurs listes de candidatures pour les échéances électorales après les municipales.

L’exemple a été éloquemment donné par l’ADF/RDA qui s’est entouré de biens de précautions. Aussi, son secrétaire général, Balamine Diané a-t-il pris le soin d’apporter des actes notariés qu’il glissait à bon escient aux commissaires du gouvernement.Du côté du CDP, bien que des requêtes aient été jugées fondées, il a parfois laissé le tribunal perplexe.

C’était le cas pour des lettres de démissions internes à d’autres partis censées être adressées aux responsables de ces partis tiers, mais dont les copies originales sur lesquelles étaient quelquefois apposés des empreintes digitales se trouvaient par devers les plaignants du CDP. En outre, l’article 16 de sa directive N°2005/002/CDP/CN/BPN/BEN relative à la désignation des candidats sur les listes CDP lui a parfois plus desservi que servi devant le tribunal. Cet article stipule que : “ Tout militant non retenu sur la liste du CDP, qui viendrait à s’inscrire sur la liste d’un autre parti ou à soutenir des candidats autres que ceux investis par le parti s’exclut de fait du parti ”.

Joint au téléphone, le député Salia Sanou, l’un des plaignants pour le compte du CDP a clairement fait savoir que ses camarades et lui faisaient appel du verdict du tribunal administratif. Ce recours se fera auprès de la chambre du contentieux du Conseil d’Etat. Dans la même veine, on apprenait que l’UPR entendait aussi faire appel.

Urbain KABORE
Sidwaya

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