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Côte d’Ivoire : Les leçons d’un procès

Publié le jeudi 29 janvier 2004 à 05h26min

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Vendredi 22 janvier, le meurtrier du journaliste Jean Hélène a été condamné en première instance à 17 ans de prison et à 500 000 F CFA de dommages-intérêts. L’Etat ivoirien a par ailleurs été condamné à payer plus de 30 millions à la famille du défunt journaliste. Un verdict " satisfaisant " pour les parties civiles, mais à l’issu duquel on reste dans l’expectative quant au retour d’une situation " normale " en Côte d’Ivoire .

Les conditions dans lesquelles le procès du sergent Sery Dago s’est déroulé ainsi que la ligne de défense de celui-ci amènent à dire que la bête immonde qui ronge le tissu social ivoirien (l’ivoirité pour ne pas la nommer) n’est pas encore totalement morte.

En effet, une escouade de " supporters " du policier meurtrier, avait envahi la salle d’audience, polluant l’atmosphère par des slogans hostiles aux étrangers en général et à la France en particulier. Fort de ce soutien " populaire ", Sery Dago a clamé son innocence, en affirmant haut et fort qu’il n’avait pas tiré à bout portant sur le journaliste. Or, le rapport balistique et les témoignages concordent pour affirmer le contraire. Mieux, le sergent Dago avait auparavant reconnu sa culpabilité.

L’ivoirité à la " vie dure ".

En fait, toute cette " ambiance " et ce retournement de veste, sont la conséquence logique d’un climat entretenu dans tout le pays et qui consiste à voir dans les étrangers la source des maux du pays. Le " problème " c’est que les dits " étrangers " réclament leur appartenance citoyenne à la Côte d’Ivoire, ce qui a fait du pays une " poudrière identitaire ". A Marcoussis, il y a un an, les protagonistes de cette crise socio-politique qui a " tourné " à la guerre civile, avaient semble-t-il trouvé le " remède " pour guérir leurs maux.

L’usage qui sera fait de cette " potion " contribuera plutôt à alimenter la crise. On est mémorarif que le président de l’Assemblée nationale Mamadou Koulibaly les avaient déclarés " anticonstitutionnels " ce qui avaient donné prétexte aux " jeunes patriotes " pour manifester bruyamment contre Marcoussis. Le discours du président ivoirien les a confortés dans leur position en clamant qu’il n’avait pas " signé " les Accords. Derrière cette bronca se cachait la volonté de ne pas partager le pouvoir avec des " étrangers ", encore moins de se laisser diriger par l’un de leurs " proches " (?) le Premier ministre Seydou Elimane Diarra.

Et justement, lorsque des Forces nouvelles, qui avaient quitté le gouvernement (pour protester contre la non-application de Marcoussis), ont voulu reprendre leur place, le dernier quarteron des ivoiritaires a organisé un pseudo-mouvement syndical pour contrarier l’action du ministre de la Communication, Guillaume Soro.

C’est dire qu’un an après Marcoussis, l’échéance de 2005 ressemble plus que jamais à une ligne d’horizon. Avec le " saccage " des municipalités de Bouaké, Korogho, Man..... le recensement des Ivoiriens ( prévu par Marcoussis) sera très difficile. Déjà que les ressortissants de ces localités étaient taxés " d’étrangers ", la démarche du recensement sera " trouble et complexe ".

Autre difficulté, l’insistance du président Gbagbo à faire adopter le nouveau code foncier par référendum. Les autres forces politiques refusent, préfèrant le recours à l’Assemblée nationale. Derrière cette " guéguerre " se cache la volonté des Forces nouvelles de faire pièce à cette loi scélérate. C’est dire qu’il y a toujours un déficit de confiance entre les protagonistes de la crise et la communauté internationale doit user de tout son poids pour empêcher le " train " ivoirien de dérailler.

Kofi Annan a posé des conditions d’une implication plus poussée de l’ONU, lesquelles se résument à l’application stricte de Marcoussis. Le camp présidentiel qui y oppose un refus " soft " et souvent musclé doit virer sa cuti, pour revenir à des meilleurs sentiments. Les leçons du procès Dago Sery incitent pour l’heure à la réserve.

Boubakar SY
Sidwaya

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