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Moussa Michel Tapsoba : "Les listes non conformes au Code seront rejetées"

Publié le jeudi 26 janvier 2006 à 08h00min

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C’est le 12 mars prochain que se tiennent les 3e élections
municipales de la IVe République du Burkina. A un mois et demi
de l’événement, nous sommes allés à la rencontre du président
de la Commission électorale nationale indépendante (CENI),
chargée de l’organisation du scrutin.

Avec Moussa Michel
Tapsoba, nous avons échangé sur les préparatifs et les
difficultés que rencontre l’institution. Le président de la CENI
s’est également prononcé sur un certain nombre de questions.

Il s’agit, entre autres, des conditions de dépôt des listes et le
problème relatif à leurs affichages. Sur le premier sujet Moussa
Michel Tapsoba est formel : toute liste de parti politique non
conforme aux dispositions du code électoral est irrecevable.

Le Pays : Nous sommes à quelque 47 jours des élections
municipales que votre structure est chargée d’organiser. Où en
êtes-vous avec les préparatifs ?

Moussa Michel Tapsoba : Conformément à notre
chronogramme, les commissaires sont en ce moment dans les
provinces pour superviser l’opération de validation des listes
électorales déposées par les partis politiques. Nous avons
donné le 26 janvier 2006 comme dernier délai de validation.
C’est à l’issue de cette date que les différentes candidatures
seront publiées.

Quelles dispositions entendez-vous prendre par rapport aux
erreurs constatées sur le fichier électoral pendant l’élection
présidentielle pour qu’elles ne se reproduisent plus dans le
cadre du présent scrutin ?

Bien que cela ne figure pas explicitement dans le
chronogramme, nos deux équipes d’informaticiens sont, depuis
le 15 décembre dernier, à pied d’oeuvre pour prendre en compte
toutes les erreurs découvertes ou en notre connaissance.

Ce
travail est donc actuellement en cours et avance très bien. Nous
pensons qu’avec toutes ces mesures, nous serons prêts pour
affronter les municipales avec un fichier meilleur à celui de
l’élection présidentielle. C’est aussi cela un fichier électoral,
c’est-à-dire qu’il doit pouvoir s’enrichir des différents scrutins qui
passent.

Il y a eu une polémique par rapport aux exigences qu’il faut
remplir en matière de dépôt des candidatures par les partis
politiques. Pouvez-vous nous éclairer sur ces conditions ?

Il s’agit en fait, ici, de ce que les partis invoquent de pouvoir
présenter des candidatures seulement dans quelques secteurs
ou villages dans une commune.

Cela n’est pas l’esprit de la loi.
Les gens lisent simplement un article, notamment l’article 246
qui dit que les partis politiques ne sont pas obligés de déposer
des listes dans toutes les communes du Burkina Faso. Cela
me paraît tout à fait évident. Mais quand ils sont dans une
commune ou dans un arrondissement, ils sont obligés de
présenter des listes dans tous les secteurs de la commune ou
de l’arrondissement. Cela, en ne parlant pas de villages.

Mais,
vous vous rappelez que dans l’une des moutures de la
décentralisation, il était question seulement de faire les
élections dans les chefs-lieux de communes et que les
communes rurales concernaient uniquement les chefs-lieux
des départements.

Comme l’idée a évolué et que l’élection se
passe maintenant dans tous les départements devenus
communes rurales, l’on a simplement oublié d’ajouter d’être
présent dans les secteurs et villages. Mais l’esprit de la loi, c’est
d’être dans toute la commune. Il faut rappeler au moins un
certain nombre d’articles pour mieux comprendre. Prenez
l’article 75 du code électoral, qui dit que les bulletins pour les
élections municipales sont établis par commune ou par
arrondissement.

L’article 236 stipule que, si un parti n’est pas
représenté dans une commune, l’on ne peut pas avoir son logo
sur le bulletin. Or, la commune aujourd’hui, c’est l’ensemble du
département. Et un parti ne peut pas être dans l’ensemble du
département s’il n’est pas dans tous des villages du
département.

Sinon le bulletin qui va être fait par commune
portera son logo, or il y a des villages où il n’est pas et son logo
va y être. Cela, comme vous le constatez, est en contradiction
avec l’article 236 du code électoral. Il faut donc lire l’ensemble du
code pour comprendre la position que la CENI a adoptée par
rapport à cette situation.

Est-ce à dire que tous les partis qui ne respecteront pas ces
conditions verront leurs listes rejetées ?

Leurs listes ne seront même pas reçues, parce que, si dans
une commune rurale ou urbaine un parti ne présente pas des
listes dans tous les villages ou secteurs de la commune, ses
listes ne sont pas recevables et n’atteindront donc pas le stade
de validation.

Il y a un décret présidentiel datant du 25 août 2005 et portant
affichage des listes électorales qui a suscité une réaction, dans
les médias, du leader d’un parti politique de l’opposition.
Celui-ci conteste la régularité de ce décret par rapport à l’article
47 du code électoral. Quelle est votre opinion sur la question ?

Il faut dire que lors de notre dernière rencontre avec les partis
politiques, le représentant de ce parti a laissé entendre que la
CENI ne respectait pas le code électoral parce qu’elle n’affichait
pas les listes dans tous les bureaux de vote, alors que le code
électoral était clair là-dessus. Nous avons tout simplement
demandé à l’intéressé de nous produire les documents qui
prouvent que la CENI a l’obligation d’afficher les listes
électorales dans les bureaux de vote. Bien sûr, il n’en avait pas.

Par contre, nous avions le décret concernant la publication et
l’affichage des listes. Dans ce décret, il est dit que l’affichage se
fait au siège des démembrements de la CENI, parce que les
démembrements ont aussi la responsabilité de protéger ces
listes. Les bureaux de vote sont dans les villages, et les
responsables des démembrements ne pourraient évidemment
pas assurer la sécurité des listes si elles y étaient affichées.

Ce
sont là les dispositions d’un texte. La lettre du leader politique a
été adressée au président du Faso, président du conseil des
ministres. S’il y a un autre texte qui en résulte, nous
l’appliquerons.

Avez-vous des difficultés par rapport à ces municipales ?

Pour une élection, il y a toujours des difficultés. Il ne faut surtout
pas croire qu’on a organisé une élection précédente et que l’on
a maintenant une expérience pour organiser une autre
facilement. Chaque scrutin comporte ses propres difficultés.
Pour les municipales, il y a d’abord le nombre très élevé des
candidatures que nous allons recevoir. L’on ne peut cependant
pas encore dire aujourd’hui le nombre exact puisque les listes
ne sont pas encore publiées.

Cela constitue un énorme travail à
abattre au niveau de nos démembrements qui comportent
aujourd’hui beaucoup d’insuffisances. La première insuffisance,
c’est la qualité des hommes, du point de vue du niveau
d’instruction, et quelquefois de moralité, cela malgré nos efforts
de sensibilisation au moment de la désignation des personnes
pour faire partie de ces structures.

La deuxième difficulté, c’est
que de nombreux membres de nos démembrements ont
démissionné pour être candidats. Nos démembrements sont
donc amputés de beaucoup d’éléments. La plupart de ces
derniers étaient ceux-là mêmes qui étaient en mesure de fournir
un certain travail.

Il y a aussi que la réception, la validation des
candidatures exigent beaucoup plus de savoir-faire que n’en ont
très souvent nos démembrements. Nous sommes alors
obligés d’être permanemment sur le terrain. Mais nous ne
pouvons pas être partout à la fois, si bien que des difficultés
nous sont signalées. Elles concernent notamment la mauvaise
compréhension des dispositions légales ou réglementaires.

Mais, à chaque fois que nous avons connaissance de quelque
chose qui ne serait pas bien fait dans l’un de nos
démembrements, nous intervenons tout de suite pour faire
rectifier le tir. Compte tenu du fait que ces municipales se
passent en début d’année, il y a également des problèmes au
niveau de l’Etat, quand il s’agit surtout d’engager de grandes
dépenses comme celles des présentes élections, cela se
chiffrant en milliards.

Et les recettes de l’Etat en début d’année
n’arrivent pas à couvrir forcément les charges auxquelles il doit
faire face. Si l’élection est importante dans la vie du pays, elle
n’est pas plus importante que les autres charges de l’Etat, tel le
paiement des salaires des fonctionnaires.

Vous avez tantôt évoqué l’amputation de certains de vos
démembrements avec le départ de nombreux membres, créant
de ce fait des insuffisances en leur sein. Quelles mesures
envisagez-vous pour pallier ces départs massifs ?

En son temps, nous avons mené des actions de sensibilisation
auprès des organisations de la société civile et des partis
politiques, par rapport à la nécessité de désigner comme
représentants dans les démembrements de la CENI, des
personnes disponibles et de bonne moralité, comme le
commande le code électoral. Cela n’a pas été pris en compte.

Malheureusement, compte tenu du court temps dont nous
disposons à l’heure actuelle, il n’est plus possible de remplacer
les membres démissionnaires, étant donné que la loi fait
obligation à toute personne devant faire partie des
démembrements, de prêter serment. Nous sommes donc
obligés de travailler avec cette contrainte.

Il y a la CEPI de Ouahigouya qui a connu un incendie. Quel est
l’état de la situation dans cette ville ?

Le siège de la CEPI du Yatenga a effectivement connu un
sinistre par incendie. Nous avons très rapidement fait établir un
devis et le bâtiment est aujourd’hui refectionné. Par rapport aux
données, on n’a pas perdu sur toute la ligne. Il y avait dans le
bâtiment incendié les anciennes listes électorales qui sont
brûlées.

Mais nous avons eu plus de chance avec les cartes
électorales, gardées dans le bureau du président, qui n’a pas
été touché par l’incendie. Ce n’était donc pas de grands
dommages, puisque les listes ont été copiées ici et les cartes
électorales épargnées. Quant aux enquêtes pour situer les
causes du sinistre, elles suivent leur cours.

Monsieur le président, qu’est-ce qui changera dans ce scrutin
par rapport au précédent ?

Les cartes qui ont été tirées en double vont être détruites. De
même, des mesures sont envisagées pour traiter le problème
de tous ceux qui disaient ne pas avoir de cartes, alors qu’ils
étaient inscrits sur les listes. Ceux qui sont effectivement inscrits
auront leurs cartes.

Il y aura donc un mieux par rapport à la présidentielle, parce que
tous ceux qui ont connu des problèmes pour voter, ne les
connaîtront plus. Ainsi, nous allons prendre en compte les cas
de transfert résultant de l’affectation d’agents. La situation des
personnes qui rentrent de l’extérieur avec des pièces
justificatives sera également réglée.

Quels commentaires faites-vous des difficultés rencontrées par
des partis par rapport à la désignation de leurs candidats pour
ces municipales ?

Nous évitons de commenter la vie des formations politiques,
puisque nous sommes chargés de gérer leurs intérêts. Nous
devons poser les actes qui confortent la confiance qui existe
entre les partis politiques et nous ; si bien que nous regrettons
qu’il y ait ces difficultés. Nous ne pouvons donc pas émettre des
commentaires sur leur mode de gestion interne.

Auriez-vous quelque chose à dire aux acteurs politiques, y
compris les électeurs ?

Je voudrais simplement dire que les élections municipales sont
très importantes, contrairement à ce que l’on peut penser. Bien
sûr que l’élection présidentielle est très importante, car il est
question de désigner un homme pour conduire tout un pays
pendant un certain nombre d’années (cinq ans pour ce qui est
du Burkina).

Mais les municipales sont des élections de
proximité qui portent véritablement la démocratie jusque dans
les villages. Dans ce sens, nous ne dressons pas uniquement
les listes des candidatures, mais nous travaillons également à
ce que les candidats perçoivent l’importance du travail qui va
leur être assigné s’ils sont élus.

Dans tous les cas, chaque parti
qui a été retenu dispose d’un relais jusque dans les villages
pour faire mon seulement la mobilisation, mais surtout pour
mieux faire connaître la démocratie aux populations. Aux
électeurs, je demande de faire le bon choix, parce qu’il s’agit
pour eux de désigner ceux qui vont gérer leur vie au quotidien.
C’est donc important pour chacun de se prononcer, c’est-à-dire
d’aller voter.

Propos recueillis par Grégoire B. BAZIE et Awa Ouédraogo (Collaboratrice)
Le Pays

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