LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Soyez un repère de qualité. Certaines personnes ne sont pas habituées à un environnement où on s’attend à l’excellence.” Steve jobs

Pascal Kaboré : de "Silmandé" à "Boin ben bala", la maturité et le professionnalisme au rendez-vous

Publié le lundi 26 janvier 2004 à 07h24min

PARTAGER :                          

En 1999-2000, un opus. : "Silmandé" a fait danser tout le Burkina. Sur le marché du disque, il s’est révélé une œuvre de belle facture et a valu de nombreuses dividendes à son auteur. Meilleure vente, meilleure réalisation de clip vidéo, artiste le plus joué en discothèque. En somme, Pascal Kaboré a été la révélation de l’année 2001-2002. Cependant, quelques temps après ce succès, l’artiste était comme déterminé avec en prime, un nouvel album (fruit de cette "retraite") prochainement disponible. Sidwaya l’a rencontré pour en savoir davantage. Lisez plutôt.

Sidwaya (S). : Il y a assez longtemps que Pascal Kaboré s’est quelque peu éclipsé de la scène musicale. Après Silmandé, beaucoup se demandaient ce que vous étiez devenu. Quelque chose est donc la cause fondamentale de ce repli ?

Pascal Kaboré (P.K) : Comme je l’ai toujours dit, il ne faut pas sortir un album parce qu’il faut le sortir. Il faut réellement être prêt. Et si nous avons mis un long temps, c’est parce que nous sommes un artiste du terroir. Pour cela, donc il a fallu mener des recherches au niveau de la culture burkinabè afin de concevoir une œuvre originale et à l’image de l’artiste que nous sommes. Beaucoup de personnes croient en moi et je ne dois pas les décevoir. J’ai fait ce silence pour travailler, bien sûr, dans l’ombre. C’est pourquoi vous aurez bientôt sur le marché, un album riche en couleurs folkloriques essentiellement tirées du terroir national. Il s’intitule " Boin ben bala"

S. : "Silmandé" signifie tourbillon, mais quel est le sens de "boin Ben bala" et pourquoi ce titre ?

P.K. : Boin ben bala veut dire "quelle culotte sale !" en mooré et traite de la plaisanterie entre nos ethnies. Ce titre se justifie par le fait que notre pays doit sa tranquillité à ce phénomène de société dont les ancêtres en sont les artisans. Je me suis fait parent à plaisanterie de toutes les ethnies du Burkina. J’ai provoqué tout le monde et j’espère être compris.

S. : Quelle est la configuration générale de cet album ?

P.K. : Soulignons simplement qu’à la différence de mon premier opus, j’ai travaillé pour "Boin ben bala" avec une équipe de professionnels et non avec un seul programmeur et synthétiseur. C’est un album qui a douze (12) titres enregistrés en grande partie en live, ce qui donne plus de vie et d’authenticité à la création. Je compose mes chansons à la guitare avec mes fausses notes pour qu’elles soient corrigées et jouées par le groupe "Koudoum Kieta". Ces textes sont de façon générale, engagés socialement et politiquement avec la plus grande comédie possible.

S. : Des thèmes politiquement et socialement engagés, dites-vous. Quel en est exactement leur contenu ?

P.K. : Vous savez que nous sommes dans un continent "sous développé". Alors la tâche qui incombe à nous autres porteurs de paroles, c’est de dénoncer, de sensibiliser et d’éduquer le peuple. Je suis un enseignant et je tenais une classe autrefois ; mais aujourd’hui, j’enseigne un peuple. C’est donc une tâche plus noble. Et ce qui compte pour un musicien, c’est le message au-delà de l’aspect esthétique. Dans cet album, j’ai parlé des difficultés auxquelles nous sommes confrontés dans notre situation de pays moins avancé. C’est pourquoi, j’ai chanté sur la solidarité nationale à travers la parenté à plaisanterie, le mariage forcé, le Sida, l’intégration africaine les conditions de vie des enseignants.

S. : Dans quelles conditions pratiques, avez-vous travaillé cet album tant il est communément admis que l’argent est le nerf de la guerre ?

P.K. : Effectivement, j’avais des textes à revendre mais les moyens m’ont fait un peu défaut. La collaboration avec tous ceux qui sont intervenus était donc à tisser. C’est dans le studio "Djembé" que nous avons travaillé depuis fin 2002 nuit et jour pour aboutir à ce produit. Plusieurs fois, nous avons dû recommencer, jugeant certains points insatisfaisants. Bien sûr que tout cela demande beaucoup de fonds ; ce qui démontre que nous nous sommes largement saigné. Je peux même avouer que je suis redevable à des structures financières. J’espère que ces efforts seront récompensés à leur juste valeur ; Inch AllaH !

S. : Silmandé a eu comme un effet de "bombe" dans le milieu musical burkinabè. Nombre de mélomanes ont fredonné avec beaucoup de bonheur, à ce titre. Alors qu’allez-vous apporter comme innovation dans "Boin ben bala" pour répondre toujours aux attentes de vos fans ?

P.K. : Nous savons que nous avons un défi à relever : prouver que "Silmandé" n’était pas un fait du hasard. Alors, nous avons travaillé en conséquence pour que le nouvel album ne soit pas seulement une œuvre pour les enfants, mais un produit plus mature, plus professionnel et plus engagé pour le développement du Burkina. Cela signifie donc que nous avons mis plus de moyens dans la recherche artistique et thématique. De six (06) titres pour "Silmandé" nous en sommes passé à douze (12) pour cet album. Je peux affirmer qu’il y a eu beaucoup plus de sérieux dans la réalisation.

S. : Quelles ambitions poursuivez-vous avec ce nouvel album ?

P.K. : Nous ambitions étaient fixées avant notre entrée en studio. Nous avons travaillé de sorte à produire un album qui va nous conduire au-delà de nos frontières. Notre objectif, c’est d’imposer un rythme purement burkinabè à toutes les nations d’Afrique et d’ailleurs comme il en est du N’dombolo, du mapouka et bien d’autres. Pour ce faire, nous devrons œuvrer à ce que les Burkinabè eux-mêmes l’acceptent. En conclusion, c’est un travail de longue haleine qui va nécessiter beaucoup de patience.

S. : Ne souhaitez-vous pas être le meilleur artiste du Burkina ?

P.K. : (Eclats de rires). Voulez-vous faire allusion aux Kundé ? Vous savez, je ne travaille pas dans l’espoir d’être récompensé ainsi. Seulement, je veux qu’au rendez-vous des cultures du monde, la création de Pascal Kaboré soit vue comme un moteur de la promotion de la musique burkinabè, notamment celle du terroir. Etre meilleur artiste est une fin en soi. Etre l’un des meilleurs, c’est aussi une bonne finalité, dans tous les cas, le premier ou le dernier a la même mission : celle culturelle.

Arsène BATIONO

PARTAGER :                              
 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique