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Liberia : L’ère Ellen Shirleaf Jonhson s’ouvre avec grand espoir

Publié le lundi 16 janvier 2006 à 07h38min

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Ellen Shirleaf Jonhson

Ellen Shirleaf Johnson, présidente élue du Liberia prête serment ce lundi à Monrovia. Pays exsangue livré à quatorze années de guerre civile, le Liberia aujourd’hui est l’âme de lui-même, pays pauvre parmi les pauvres. Un pays qui jadis aura fait la fierté du continent noir.

Première république indépendante dès 1847, le Liberia a participé avec d’autres nations à la formation de la Société des Nations (SDN) qui s’est par la suite muée en Organisation des Nations unies.

Le nom de sa capitale Monrovia est accolé à un groupe lors de la mise sur fonts baptismaux de la défunte Organisation de l’unité africaine en 1963 tout comme son rôle actif à la création de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et à celle de l’Union sous-régionale du fleuve Mano.

L’évènement de ce 16 janvier qui marque l’avènement d’un nouveau régime vaut tout son poids socio-historique au point de mobiliser des quatre coins du monde des sommités qui ont fait le déplacement de la capitale libérienne. Car bien qu’ancrer dans le modernisme depuis maintenant un demi siècle, il était jusqu’à ce 8 novembre hasardeux de pronostiquer une femme chef d’Etat dans un quelconque pays africain. « La femme c’est la maison », traduction littérale de la formule consacrée “pag la yri” bien usitée chez nous.

Conscientes de ce “tort” les femmes elles-mêmes d’ici et d’ailleurs ont parfois battu le macadam pour se faire entendre et surtout pour êstre bien positionnées dans les courses électorales. Ont-elles souvent été entendues ? Shirleaf fort heureusement capitalise la réponse à ce genre de questions. Et par là évoque d’autres questionnements. Comment est-elle parvenue à se hisser ou se faire hisser à une place de choix qui lui a valu aujourd’hui la consécration suprême donc de présider au futur de ses compatriotes ?

A scruter le cursus politique de celle que d’aucuns appellent la “dame de fer” ou la “passionariat” de la politique libérienne, il ne fait aucun doute que son chemin n’a pas toujours été parsemé de lauriers. Et oui celle qui “mobilise” ses pairs chefs d’Etat aujourd’hui a connu la prison et par deux fois au cours de sa carrière politique sous le régime du sergent-chef Samuel Kanyon Doe 1980-90. Elle a souffert le calvaire de ses Hommes engagés et convaincus de la justesse de leur lutte à un moment où le pouvoir libérien était des plus abominables.

Mme Jonhson diplômée de la Harvard University a également été ministre des Finances de son pays sous la présidence de William Tolbert et a exercé dans des institutions privées telles la City bank et pour les Nations unies. Aujourd’hui c’est tout ce capital d’expérience socio-professionnelle que les trois millions de libériens espèrent la voir mettre au service de son pays. La guerre civile qui y a fait rage de 1989 à 2003 n’a pas laissé de bons souvenirs.

Plus de 200 000 morts, 800 000 réfugiés dans les pays de la sous-région (Côte d’Ivoire et Guinée Conakry surtout), et plus d’un million de déplacés internes. A ce tableau sombre, il faut ajouter une économie quasi paralysée, une ambiance permanente d’insécurité. Un système éducatif néant avec moins de trente pour cent des enfants âgés entre 12 et 17 qui vont à l’école. De plus avec un taux de mortalité de 132 pour mille, ce pays est en tête de peleton des pays où le fléau est vraiment grave.

Le Liberia aujourd’hui est la somme de plusieurs chaos pour lesquels la communauté internationale devrait se mobiliser et aller à son secours. Si la très forte présence des grands de ce moment à Monrovia ce 16 janvier est également la marque d’un resserrement international autour de Ellen Sirleaf Jonhson, il est clair qu’elle aura gagné une partie de son combat. Celle de voir tomber tous les clichés et d’être acceptée comme présidente. Surtout par les leaders. Il ne fait aucun doute, le peuple l’a depuis belle lurette adoptée.

A l’investiture du président du Faso, le “standing ovation” à elle réservée, où l’accueil de ses sœurs Burkinabé qui ont “tenu” à la recevoir lors de sa visite officielle dans notre pays les 1er et 2 décembre derniers sont des preuves de cet attachement. De l’autre et de loin le plus important, il ne dépend qu’elle. Déjà la gestion de l’après 8 novembre où son challenger George Weah voulait coûte que coûte l’engager dans des prolongations est la preuve que les libériens peuvent faire confiance à Jonhson.

Epouse, et mère, elle a su opposer un sang froid aux turbulences de l’ancien international libérien. Toute chose qui montre qu’elle saura à coup sûr trouver les parades justes pour éviter au Liberia les affres que le pays a déjà subies. Elle est certainement consciente que tous les regards de ses sœurs sont tournés vers elle. Elle a en fait ouvert la voie, redonné confiance et certainement gonflé à bloc ses sœurs africaines. Et si cette hargne, en sourdine était le signe que les femmes ne doivent rien attendre surtout en politique, sauf s’engager et lutter, toujours lutter.

Ça aurait été la belle victoire des femmes sur la pseudo adversité basée sur des considérations égoïstes et macho. Car en fait de cette impossibilité de la femme à gouverner, des peuples africains avaient résolu la question. Autrement les Yennenga, Guimbi Ouattara, Pokou etc. n’auraient pas pu entrer dans la légende comme des héroïnes.

Si le Pape Jean Paul II a eu son “n’ayez pas peur” en pleine guerre froide, on peut dire que Johnson sans le dire a pour ses sœurs, “ne vous asseyez pas”. Du reste elle-même en déclarant “ils ne doivent pas se faire d’illusion parce que je suis femme. Je serai ferme” montre déjà son engagement à ne reculer devant aucun obstacle. Et les combats restent nombreux. A 67 ans et pour son premier mandat, les priorités de madame la présidente de la République touchent à des domaines telle que la réconciliation des Libériens, la lutte contre les violences et toutes formes de déstabilisation, les questions du chômage, de la pauvreté etc.

Tout le mal que ses sœurs du continent et tous les africains puissent souhaiter à madame la vingt troisième locataire de la Mansion House à Monrovia c’est qu’au soir de son mandat, la paix soit plus qu’un vœu, que les Libériens jouissent des bienfaits du développement. Parce que son exemple pourra servir, elle qui rejoint dans le gotha des femmes premières responsables de leur pays, l’Allemande Angela Merkel, et qui espère certainement la finlandaise Tarja Halonen et la chilienne Michelle Bachelet. Et si dans le grand silence c’était le Tafee fanga* qui se mettait en place ?

* Tafee fanga : film du cinéaste malien, Adama Drabo où les femmes exercent les pleins pouvoirs et où les rôles sont inversés.

Jean Philippe TOUGOUMA

Sidwaya

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Vos commentaires

  • Le 16 janvier 2006 à 13:17, par Jamal En réponse à : > Liberia : L’ère Ellen Shirleaf Jonhson s’ouvre avec grand espoir

    Bon courage à Ellen ! Et vive l’amitié libéro burkinabè ! C’est vraiment un espoir enorme qu’elle suscite dans le coeur de tous ceux qui sont épris de paix et de justice. Je ne peux que me joindre aux dire de M. Tougouma pour lui souhaiter de redonner le bonheur aux libériens qui ont trop souffert depuis 1989 et meme avant.

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