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Présidentielle 2005 : "Et si Blaise Compaoré avait échoué ?"

Publié le mercredi 28 décembre 2005 à 07h06min

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"Que serait-il advenu si le jour de l’élection présidentielle, la tendance était
en défaveur du candidat du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP),
Blaise Compaoré ? Dans l’écrit qui suit, Jonas Hien, citoyen de son état, émet
des hypothèses et parvient à une conclusion : "Le quinquennat présidentiel
risque d’être difficile pour le premier occupant de la nouvelle présidence de
Ouaga 2000".

C’est le 15 octobre 1987 que Blaise Compaoré arriva au pouvoir à la suite
d’un coup d’Etat militaire. A partir de 1991, le Capitaine révolutionnaire au
pouvoir devient militaire démocrate en disponibilité afin de continuer à
exercer les fonctions de Chef d’Etat. Comme système de gouvernance, le
Président Blaise Compaoré gouverna de deux manières. La première
manière est marquée par un laisser aller tandis que la deuxième se
manifestait par une violence inouïe exercée sur ses compatriotes.

Le laisser
aller s’expliquait par l’impopularité de son régime. L’assassinat du Capitaine
président Thomas Sankara en était la raison. Son pouvoir était donc
fortement boudé tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays. Le président
Compaoré développa alors une politique ploutocratique pour faire du monde
autour de lui. La conséquence directe et inévitable d’une telle politique reste
aujourd’hui les nombreux cas de détournements de deniers publics, de
nombreux nouveaux riches, arrogants et insolents.

Sur la gestion
économique et financière du pays, le président Blaise Compaoré et son
peuple auront beaucoup de choses à se dire s’il n’est plus au pouvoir.
Sur le plan de la violence qu’ont subie de nombreux Burkinabè, l’explication
est difficile à trouver. En effet, après les tueries du 15 octobre 1987 que
certains pourraient mettre sur le compte de feu de l’action, rien ne peut
expliquer autant de morts d’hommes du fait de la politique du président
Compaoré.

Le contentieux humain entre le président Compaoré et le peuple
est donc aussi énorme. L’organisation de la journée nationale de pardon
avec sa commémoration annuelle ne rassure pas le président Compaoré. Il
sait que depuis que la vérité a cessé d’être révolutionnaire au Faso, ça ne va
plus. L’honnêteté est devenue un délit. On se ment toujours avec une
proportion importante et inquiétante en politique. Et la signification profonde
de ‘’Yelkayé’’ au Burkina Faso, Blaise Compaoré la comprend et la
comprend.

"Son entourage ne lui inspire plus confiance"

Dans un tel contexte, il était difficile de convaincre le président Compaoré
que l’article 37 de la Constitution n’est pas en sa faveur. Il le sait, mais il se
cherche, pour parler vulgairement. Blaise Compaoré n’a pas l’assurance
qu’une fois hors du cœur du pouvoir, il ne subira pas la pire des humiliations.

Même son propre entourage ne lui inspire plus confiance. Le comportement
des Burkinabè ne fait pas aussi transparaître cette confiance à donner au
président du Faso. C’est donc un homme perturbé par ses propres pratiques,
animé par l’instinct de survie qui est allé à l’élection présidentielle de
novembre 2005.

Dans un tel contexte également, l’échec du candidat Blaise Compaoré n’était
pas envisageable. Mais que serait-il advenu si le jour de l’élection, la
tendance était en défaveur du candidat du CDP ? Si une telle hypothèse avait
vu jour, je parie que depuis le 13 novembre 2005, le pays était plongé dans
une crise politico sociale plus aiguë que celle consécutive à l’assassinat du
journaliste Norbert Zongo en décembre 1998.

Mes convictions sont formelles
et voici comment allait se dérouler le scénario : dans un bureau de vote
donné, on met à contribution des jeunes à la recherche du gain facile. Sur
quelque motif que ce soit, ils agressent un membre du bureau de vote ou les
militaires assurant la sécurité dans le bureau de vote (dans tous les cas,
aucun de ces militaires ne possédait des munitions ce jour-là). On crée donc
des troubles dans un bureau de vote.

L’alerte est ensuite donnée à travers
l’ensemble du pays. On crie à l’agression des militants du CDP et on appelle
à une riposte conséquente pour protéger ses militants. Dans la foulée, on
profite huiler la stratégie avec l’enlèvement des urnes dans de nombreux
bureaux de votes par "des individus inconnus et fortement soupçonnés
appartenir à l’opposition".

"La victoire écrasante n’en est vraiment pas une"

Face à une telle situation, on fait lire des déclarations fracassantes à la
radiodiffusion nationale et à la Télévision nationale, condamnant l’attitude de
l’opposition et appelant le peuple au calme face à la provocation des
dirigeants des partis d’opposition.

La déclaration conclut en ces termes : « au
regard de nombreuses urnes emportées dans la presque totalité des bureaux
de vote sur l’ensemble du territoire, faussant ainsi le jeu de l’élection
présidentielle et en application de l’article X de Y, le président du Faso
décrète : l’élection présidentielle du 13 novembre 2005 est suspendue ». Et le
tour est joué. On met le pays en état de siège et on prend le temps pour
peaufiner la "victoire" à l’avenir.

Voici ce qui se serait passé si l’Opposition était très bien organisée et les
possibilités de fraudes réduites au maximum. C’est dire que pour rien au
monde, Blaise Compaoré ne pouvait échouer à cette élection présidentielle
de novembre 2005. Il n’est pas prêt à quitter le pouvoir. Autant le peuple ne
lui fait pas confiance, autant il n’a confiance au peuple. Malgré tout le tapage
médiatique sur sa prétendue victoire, le président Compaoré n’est pas
encore tranquille.

Même cette victoire lui fait peur. Oui, il a l’intention de se
faire peau neuve dans l’espoir de bénéficier de la confiance du peuple. Faire
peau neuve signifie aussi se débarrasser de certains de ses anciens
compagnons en terme de ‘’gros calibres’’. Mais comment ? Prisonnier de son
propre système, il lui faut une stratégie novatrice pour ne pas compromettre
sa ‘’victoire’’.

Il sait que les 80,35% obtenus à l’élection présidentielle ne
représentent pas 80,35% des Burkinabè mais 80,35% de ceux qui ont
effectivement voté auxquels il faut ajouter les cas de fraudes comme ceux
vécus ‘’en direct’’ à Ouahigouya. Et quand on sait que c’est seulement à peu
près deux millions de Burkinabè qui sont censé voter, la victoire ‘’écrasante’’
de Blaise Compaoré n’en est vraiment pas une.
Le quinquennat présidentiel risque donc d’être difficile pour le premier
occupant de la nouvelle présidence de Ouaga 2000.

Jonas Hien

Le Pays

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Vos commentaires

  • Le 28 décembre 2005 à 07:59, par Thomas Ouédraogo En réponse à : > Présidentielle 2005 : "Et si Blaise Compaoré avait échoué ?"

    Bel exercice de politique-fiction. Voilà qui ferait peut-être un joli succès comme trame à un roman policier. Mais comme analyse politique d’un opposant, je trouve que c’est totalement dans le décor. On comprend pourquoi notre oppsition passe tout le temps à côté de la plaque. Il y en a qui seraient mieux en librairie que dans l’arène politique

    Il ne faut pas confondre ses cauchmars avec la réalité. Touchons du bois pour que vous en soyez le seul "bénéficiaire" !!!

    T. Ouédraogo

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