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Côte d’Ivoire : Le pis-aller !

Publié le jeudi 8 décembre 2005 à 07h33min

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Charles Konan Banny et Seydou Diarra

Un mois après la date prévue pour sa désignation, la Côte d’Ivoire vient de « trouver » un Premier ministre en la personne de Charles Konan-Banny, ex-gouverneur de la BCEAO.

Une nomination qui nonobstant la carrure de l’homme ne va rien régler, au regard du climat sociopolitique et de l’esprit malsain qui prévalent en Côte d’Ivoire, esprit entretenu par le dernier carré des ivoiritaires « calamiteusement » parvenus au pouvoir en octobre 2000.

A scruter de près les évènements qui se succèdent en Côte d’Ivoire depuis septembre 2002, on a comme l’impression que les uns et les autres ont oublié l’essentiel. A savoir la manière anti-démocratique qui a permis l’avènement du régime GBAGBO, situation qui a entraîné par la suite, cette rupture définitive entre tenants de deux philosophies diamétralement opposées.

D’un côté donc, les tenants de l’ivoirité représentés par les pro-GBAGBO qui pensent que « n’est pas Ivoirien qui le veut, mais qui peut le démontrer papiers et villages à l’appui » et de l’autre ceux dont on peut dire qu’ils ont une vision plus républicaine de la nationalité, celle-ci se fondant avant tout sur la volonté de vivre en commun dans un espace géographique donné et d’en partager aussi bien les joies que les peines.

Cette vision citoyenne forgée par Houphouët BOIGNY a permis à cette mosaïque de peuples de vivre en harmonie, malgré quelques heurts, vite atténués il faut en convenir, par la manne cacaoyère qui permettait de panser bien de plaies. Houphouët avait donc le pétrole et il ne s’est pas privé de s’en servir chaque fois que le pays était au bord de la rupture d’équilibre, l’effet « anesthésiant » sur la conscience humaine étant bien connu.

Mais, il ne constituait pas l’essentiel pour le « bélier » de Yamoussoukro, politicien habile, bien au fait de l’histoire socioéconomique et politique de son pays et qui jouait conséquemment peu sur la fibre nationaliste, même si la politique d’ivoirisation des cadres entamée au début de la décennie 80 peut être considérée comme la première dérive dangereuse qu’a connu le pays.

Déjà, l’argent du cacao se faisait rare et il fallait contenir la grogne des couches moyennes habituées à manger gras, à boire et à dormir frais. Houphouët mort, aucun de ses héritiers n’a osé dire la vérité aux Ivoiriens préférant entretenir l’illusion d’un eldorado « victime » de l’afflux d’étrangers « mangeurs » des capitaux ivoiriens.

Une vision éloignée de la réalité, ces étrangers étant plutôt les « fourmis » besogneuses qui permettaient à l’économie ivoirienne de surnager malgré les difficultés. Et pourtant, c’est cette vision qui sera conceptualisée dans l’ivoirité avec les actuelles conséquences.

Une étroite marge de manœuvre

Entre les deux camps donc, Konan Banny doit jouer à la force centripède, aidé il est vrai par la communauté internationale, principale instigatrice de sa nomination. Les premières réactions des deux camps laissent augurer de la difficulté pour ne pas dire l’impossibilité de sa tâche. « Nous allons le juger aux actes », a dit Affi N’GUESSAN, le patron du FPI, parti au pouvoir.

Dans la bouche de cet « accroc » de l’ivoirité convaincu de la légitimité et de la légalité du pouvoir GBAGBO, cela veut dire que Konan Banny devra agir sur délégation de pouvoir du président GBAGBO. Ce, en vertu de la constitution qui n’a « jamais été abrogée » et qui fait du président de la République, le « maître » du jeu politique.

Une prise de position du camp présidentiel qui avait paralysé Seydou DIARRA, en vidant son poste de toute sa substance. La même galère pend au nez de Konan - Banny même s’il est dit expressément qu’il doit agir en vertu de la résolution 1 633 du Conseil de sécurité de l’ONU qui fixe une feuille de route claire pour la sortie de crise en Côte d’Ivoire. Si l’ex-gouverneur de la BCEAO a donc du souci à se faire du côté du camp présidentiel, il n’est pas non plus à l’abri de suspicions de la part des Forces Nouvelles.

Tout en notant que la situation « paradoxale » découlant de sa neutralité pouvait être un « atout » leur porte-parole, Sidiki KONATE a déclaré qu’eux aussi l’attendaient sur ses actes avant tout jugement. Quand on sait que sur le premier de ces actes avant tout jugement, à savoir le « désarmement des milices » les violons sont loin d’être accordés en Côte d’Ivoire, l’on se demande quelle direction il va privilégier.

Va-t-il voir les milices uniquement du côté des « rebelles » ou bien s’évertuera-t-il à démontrer au camp GABGBO que lui aussi entretient des milices à travers ces prétendues « structures d’auto-défense » qui pullulent en Abidjan et dans tout le sud du pays ? La réponse à cette question est fondamentale car elle augurera de la bonne suite du reste du processus.

Il ne saurait y avoir réconciliation sans désarmement, et le décompte des Ivoiriens ne saurait se faire à « l’ombre » des kalpa. La communauté internationale qui a opté de miser sur la carte Konan-Banny prendra-t-elle ses responsabilités en l’accompagnant dans sa tâche avec plus de volonté ? Une autre « équation » si tant est qu’elle jusque-là fait montre de plus de pusillanimité que de fermeté dans la gestion de la crise ivoirienne. Comme les protagonistes de la crise ivoiro-ivoirienne attendons donc les actes avant de juger. Même si force est de reconnaître que nous sommes dans une situation de pis-aller.

L’Opinion

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