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Côte d’Ivoire : Fiction ou réalité ?

Publié le lundi 5 décembre 2005 à 08h14min

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On ne connaîtra peut-être jamais, l’identité des assaillants qui, dans la nuit
du jeudi 1er décembre 2005, ont attaqué, selon la version officielle, le camp
militaire d’Agban, situé dans le nord-ouest d’Abidjan. D’autres tirs
sporadiques auraient également été entendus dans le quartier résidentiel
des Deux Plateaux mais seraient sans aucun rapport formel, dit-on, avec
l’attaque de la caserne.

La source militaire qui a donné l’information se
contente d’affirmer que les attaquants dont l’action n’aurait duré qu’une
dizaine de minutes, auraient été repoussés par des éléments de l’armée
nationale. Toujours est-il qu’en Côte d’Ivoire, les coïncidences sont rarement
fortuites. Chaque fois que les fils du drame sont en passe de se dénouer,
comme une sorte de malédiction, la machine se grippe.

L’on se rappelle que
du 23 au 24 juillet derniers, toujours selon les autorités, quelques dizaines
d’individus armés de Kalachnikovs avaient attaqué les villes d’Anyama, dans
les faubourgs d’Abidjan, faisant 24 morts et d’Agboville au Nord. Ils seront
identifiés par le pouvoir, comme étant pour la plupart des étrangers (Maliens
et Burkinabè).

Dès lors, les accusations mutuelles sont allées bon train,
gouvernement et Forces Nouvelles se rejetant la responsabilité de ces
attaques. Depuis, deux enquêtes, l’une ouverte par le procureur du
gouvernement ivoirien, l’autre diligentée par l’ONU, pour établir l’identité de
ces mystérieux envahisseurs, n’ont pas encore fourni la lumière sur ce
dossier. Mais au-delà de ce scénario, à l’époque, se profilait l’échéance du 30
octobre, date de l’élection présidentielle et la mise en application effective du
programme DDR (Démobilisation, Désarmement, Réinsertion).

A tort ou à
raison, certains adversaires de Gbagbo n’avaient pas manqué l’occasion de
l’accuser ouvertement d’avoir provoqué cet incident pour brandir le prétexte
de l’insécurité et de la menace à la stabilité des institutions républicaines
pour soustraire ses milices surarmées au programme DDR.

Vrai ou faux,
après ces supposées attaques, le dossier semble avoir été classé par pertes
et profits tandis que les "Jeunes Patriotes" en ont profité pour se radicaliser
en tenant des propos guerriers et en s’en prenant violemment à des jeunes
du PDCI après l’interdiction par Gbagbo, de tout rassemblement politique
dans Abidjan.

Cette fois-ci, c’est au moment où le Conseil de sécurité de
l’ONU s’apprête enfin à imposer un Premier ministre à la classe politique
ivoirienne, incapable de surmonter ses contradictions internes et ses combats
de leadership, pour le grand malheur de l’immense majorité des Ivoiriens,
que ce coup du "sort" est arrivé.

On peut donc accréditer l’hypothèse selon
laquelle ce coup n’est qu’un cirque, un de plus, monté par Gbagbo pour
prouver que l’embargo sur les armes n’est que pure fiction et que le pays est
menacé. Du reste, dans les jours qui viennent, le pouvoir va certainement
porter ses accusations sur les Forces Nouvelles, comme il l’a fait lors des
attaques d’Anyama et d’Agboville.

Par cet incident, Laurent Gbagbo pourrait
aussi faire accréditer la thèse selon laquelle la présence de la Munici,
(Mission de l’ONU en Côte d’Ivoire) et des éléments du Licorne ne sont pas
une garantie suffisante pour la sécurité de la Côte d’Ivoire et que la meilleure
façon de protéger le pays serait de continuer à contourner l’embargo. En
définitive, la récente opération militaire sur le camp d’Agban ne serait-elle pas
une simple simulation pour tester la capacité de l’armée ivoirienne à faire
face à toute éventualité ?

De recul en recul dans la concrétisation de tous les
accords et des résolutions sur la Côte d’Ivoire, Laurent Gbagbo qui est déjà
en campagne, donc en avance sur ses adversaires et qui est bénéficiaire
d’un nouveau quinquennat par défaut, peut toujours rêver de rebelotter en
octobre 2006. Cependant, l’hypothèse inverse, celle d’une attaque d’éléments
extérieurs, ne peut être totalement rejetée. Dans ce bourbier ivoirien où
certains officiers supérieurs, et non des moindres, sont en cavale, tous les
ingrédients d’un coup de force ne relèvent pas du domaine de l’utopie.

Cela
pourrait signifier que le pouvoir de Gbagbo, en dépit des assurances de ce
dernier, est lézardé. On peut alors se demander quelle est l’efficacité d’une
armée nationale qui se laisse surprendre dans son fief par quelques dizaines
d’éléments venus de l’extérieur. Abidjan et ses environs n’ont-ils pas été
érigés en région militaire ? Toujours est-il que Gbagbo a exploité cette
situation pour ne pas se rendre au sommet Afrique-France à Bamako.

Mais,
sans surprise, l’ombre de la crise ivoirienne a largement plané sur ce
sommet. Les participants ont dû prendre la mesure de la gravité de la
situation décrite par le représentant spécial de l’ONU en Côte d’Ivoire. C’est
une véritable sonnette d’alarme qu’il vient de tirer en estimant que toutes les
conditions d’une guerre ethnique et d’un génocide étaient réunies.

En
pratiquant la politique de la chaise vide, Gbagbo a évité d’être dans le
collimateur de ses pairs. Il convient cependant de se demander si une telle
absence n’arrange pas certains Etats dont la position a toujours été ambiguë
dans le dossier ivoirien. C’est le cas de la France qui, depuis fort longtemps,
et selon des rapports confidentiels, estime que Laurent Gbagbo est "le seul à
même de mieux défendre les intérêts français en Côte d’Ivoire".

Dans un tel
contexte, l’on imagine la difficulté qu’auront Obasanjo, Mbeki et Tanja pour
convaincre le manoeuvrier Gbagbo de les écouter. En fait, toute la
gouvernance de Gbagbo se résume à colmater des brèches, à développer
des stratégies et à monter en épingle des scénarios qui ne font que plonger
la Côte d’Ivoire et la majorité des Ivoiriens dans les ténèbres.

Tout se passe
comme si la République était une balle de ping-pong que les différents
acteurs se renvoient au gré de leurs humeurs. L’ONU qui devait siffler la fin
de la récréation, tarde à jouer son rôle d’arbitre en se perdant en conjectures
sur le sexe des premiers ministrables. Que signifie la notion de Premier
ministre consensuel dans un pays où tout le monde est mouillé ?

C’est
peut-être révolté contre cette incurie, ce manque d’imagination et cette
hypocrisie qu’un parti politique ivoirien, l’Union des sociaux - démocrates
(USD), vient d’exiger la mise sous tutelle de l’ONU de la Côte d’Ivoire. Pour le
leader de ce parti, Jérôme Coulibaly Climanlo, "il n’y aura pas de solution
ivoiro-ivoirienne à la crise parce que nous connaissons les différents acteurs.

La Côte d’Ivoire est installée dans le désordre, l’indiscipline et la mauvaise
foi". Et de conclure "qu’il faut un administrateur onusien," pour veiller au
processus en cours. Malheureusement, la sincérité a depuis longtemps
déserté la Côte d’Ivoire au point que l’on se demande si ce responsable
politique ne prêche pas dans le désert.

"Le Pays"

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Vos commentaires

  • Le 6 décembre 2005 à 20:13, par L’EBURNEEN En réponse à : > Côte d’Ivoire : Fiction ou réalité ?

    Chers frères du Faso.net,
    Votre support d’information qu’est le Faso.net est particulièrement virulent à propos de la crise ivoirienne. Cela découle d’une vérité historique car nos pays sont liés de tous les points de vue. En effet,vu le nombre de nos soeurs et frères burkinabés qui depuis la colonisation sont nos hotes,vous ne pouvez naturellement pas restés insensibles aux bouleversements que vit ce pays.Mais tous vos articles revêtent une tendance bélliqueuse à l’image des actions de votre président dans la sous région.Le Faso serait-il devenu une puissance économique et militaire ? Ou les burnabées seraient ils devenus les instruments de survie d’une France-Afrique à l’agonie ?
    A la première question,l’affirmatif releverait de l’utopie car le Burkina reste et restera pour des siècles encore l’un des pays les plus pauvres de quart monde et vivra en partie des subsides de la Côte d’ivoire dont il est le satellite.
    A la deuxième question,je repondrai que la non clairvoyance des dirigeants burkinabés à l’image de leur presse(dont vous faites partie) ne perçoivent pas les bouleversements importants qui s’opèrent aujourd’hui dans le concert des nations.Bouleversements qui sont des opportuinités pour se defaire des chaines du néo-colonialisme qui appauvrit de façon exponentielle des peuples assis sur des mines d’or pour n’en nantir que les chefs illuminés.Ce sont ces opportuinités que les actuels dirigeants ivoiriens ont voulu saisir.Mais non,voilà que ressurgit le spectre du" père fouettard"(La France) dans son schema classique:Quand un président ne fait plus l’affaire on organise un coup d’Etat.On arme une autre tribu contre la sienne(spécialté du père Foccart).Ou dans le cas de la Côte D’ivoire,on mais à contribution un pays frère un peu belliqueux et le tour est joué.Malheureusement,cette fois-ci,la mayonnaise n’a pas pris car les mentalités dans biens de pays ont évoluées.
    Alors, chers frères du Faso prenons ensemble le train du combat de la liberté d’être par nous même et pour nous même.La liberté de choisir nos partenaires économiques à l’instar des pays d’Asie qui sont regardés comme des égaux à part entière et non de grands enfants manipulables à corvée comme nous le sommes aujourd’hui et vous encore plus.
    C’est tout le sens du combat de GBAGBO.

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