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Election de Ellen Johnson au Liberia : Consternation pour les uns, satisfaction pour les autres

Publié le jeudi 24 novembre 2005 à 07h54min

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Ellen Johnson-Sirleaf

La victoire de Mme Ellen Johnson Sirleaf pour les présidentielles au Liberia est à présent confirmée.
Après avoir obtenu 59,4 % des suffrages au second tour contre 40,96 % pour son adversaire, le « ballon d’or africain », Georges Weah, la « dame de fer » comme certains l’appellent devient la première présidente femme de ce petit pays ouest-africain de trois millions d’habitants.

Une première dans l’histoire du Liberia et de l’Afrique tout entière.

Que pensent les Burkinabè de l’arrivée d’une femme à la tête d’un pays ? Qu’est-ce que cela peut-il apporter au processus démocratique en cours en Afrique ? Des citoyen(ne)s commentent cette élection.

Awa Ouédraogo, Coordonnatrice nationale de marche mondiale des femmes du Burkina :

C’est une preuve palpable que nos luttes ne sont pas vaines. Cela veut dire que ce que nous proposons et défendons est bien fondé. Ellen Johnson a donné la preuve qu’une femme peut être appréciée du peuple. Elle s’est battue avec un homme et malgré tout ce qu’il y a eu comme tractations, elle a quand même gagné. Ce qui signifie que non seulement elle est capable, mais on lui fait confiance. C’est à elle de mériter cette confiance et de faire ses preuves.

Je ne doute point de ses capacités à gérer les hommes car c’est de là que les problèmes vont naître. Dès l’instant qu’une femme est au pouvoir toute sorte de peaux de bananes se met sous ses pieds. Elle est femme leader, elle doit le savoir. Je sais qu’elle prendra toutes ses dispositions pour essayer de marcher sur ces peaux de bananes. L’arrivée de Mme Ellen Johnson Sirleaf au pouvoir constitue alors un bel exemple qui doit donner le courage aux femmes de reconnaître leur valeur. Si je m’en tiens au Burkina, je dirai que les femmes n’osent pas. Tout simplement parce qu’elles ne croient pas qu’elles peuvent réussir.

L’exemple d’Ellen est palpable et cela doit pousser les femmes à être beaucoup plus présentes sur la scène nationale même si ce n’est pas pour être député, au moins pour accepter des postes de responsabilités, par exemple être dans les mairies ou dans les communes. Prenons notre Assemblée. Sur 111 députés il n’y a que onze (11) femmes. Ce qui veut dire que nous avons encore du travail à faire. Jamais elles ne gagneront en vote si elles n’ont pas l’adhésion de la grande majorité des hommes.

S’il y a au moins 30% des femmes comme nous l’avons demandé avec le plaidoyer, elles peuvent encore avoir des gens avec elles et on peut espérer que quelque chose peut changer. Tant qu’il n’y aura pas assez de femmes dans les instances de prises de décisions, nous aurons toujours des problèmes. Il faut que Mme Johnson se réfère aux femmes pour la soutenir, car je pense qu’il en existe qui sont compétentes et capables de l’épauler et l’encourager à aller de l’avant. Nous allons lui adresser une lettre de félicitations. Nous en ferons également pour les femmes du Liberia.

Mme Juliette Bonkoungou, ambassadeur du Burkina au Canada :

Je me félicite que les Libériens aient porté leur choix sur une femme. Je suis d’autant plus contente qu’il s’agit de Mme Ellen Johnson Sirleaf avec qui j’ai travaillé lorsqu’elle était au programme des Nations Unies pour le développement dans le cadre de l’élaboration de la mise en œuvre du programme d’appui à l’administration PAA, lorsque j’étais à la Fonction publique. J’ai également eu à l’apprécier lors de la dernière table-ronde des bailleurs de fonds tenue à Genève où elle a fait preuve de compétences, d’initiatives et surtout de disponibilité à l’endroit du Burkina.

C’est une africaine qui croit beaucoup à l’Afrique et est engagée pour que le continent sorte du sous-développement et acquiert toute sa place au niveau du conseil des Nations. J’ai confiance qu’à la tête du Liberia elle pourra faire un très grand travail. Si certains qualifient cela de sacrilège, je dirai plutôt que ce sont leurs pensées qui constituent un sacrilège. D’ailleurs je ne suis pas surprise de certaines réactions négatives. Cela signifie que la lutte, la bataille n’est pas encore définitivement gagnée.

Il faut que les femmes continuent et poursuivent leur combat pour l’admission de l’égalité des droits et des chances. Ellen Johnson a les compétences et l’expérience nécessaires pour conduire la destinée du peuple Libérien. Les qualités qui sont nécessaires pour être à la tête d’un Etat ne sont pas seulement que des qualités et des aptitudes intellectuelles. Il faut en plus avoir une vision et une sensibilité pouvant se mettre à la mesure de la moyenne. Mme Ellen Johnson Sirleaf, pour avoir été ministre des finances de son pays (c’est d’ailleurs à partir de ces fonctions gouvernementales qu’elle est rentrée dans le système des Nations unies comme économiste) est une personne expérimentée et a les compétences requises.

Avec sa sensibilité de femme et de mère, elle est la personne la mieux indiquée pour pouvoir remettre le Liberia sur le chemin de la paix et de la stabilité, de la démocratie et du développement.

Mme Béatrice Damiba, ambassadeur du Burkina en Autriche :

J’applaudis cette élection de Ellen Johnson Sirleaf à la présidence du Liberia, car les électeurs qui l’ont choisie n’ont pas vu en elle la femme, mais un Homme capable de diriger le pays. Pour un pays comme le Liberia qui a connu des années de guerre, le choix d’une femme est une bonne chose, la femme aime la paix et j’espère qu’Ellen Johnson réussira. Dans les pays qui connaissent des conflits, il n’y a pas de femme chef de guerre. Je pense que la femme naturellement est une personne pacifique et paisible.

M. Boukary Zombré, commerçant :

Une femme présidente, c’est un sacrilège. Rien ne marchera dans ce pays. Cette femme ne pourra pas gérer les affaires courantes du Liberia. Elle ne pourra non plus défendre les intérêts du peuple. C’est vrai qu’elle a été soutenue par la communauté internationale, mais à la longue, le pays tombera dans le cercle infernal des crises.

K. Iliassé Ouédraogo, commerçant :

Pour un pays comme le Liberia qui a connu des années de crise, il faut une femme pour changer la donne politique. A mon avis, cette femme mérite son fauteuil. Un homme à la tête de ce pays fera renaître les vieilles tensions qui amèneront des vengeances. Si un tel événement arrivait au Burkina, ce serait une bonne chose.

Mohamed Compaoré, commerçant :

J’aurai souhaité l’élection de Georges Weah, car il n’est impliqué ni de près ni de loin aux différentes guerres qu’a connues le pays. Il aurait pu mettre fin aux différentes tensions. Maintenant que la communauté internationale a préféré la femme à Weah, on ne peut qu’accepter. Seulement cette communauté oublie que Mme Ellen Johnson était proche de l’ancien président Charles Taylor. De nouvelles tensions naîtront certainement.

Brice Charles Go, assistant technique :

Je ne suis pas dans les débats de genre. Faire la différence entre une femme et un homme, je ne suis pas pour ce principe. Si madame Ellen Johnson est compétente pour assurer la présidence du Liberia, où se trouve le débat.

Elle s’est présentée aux élections, elle a été élue quoi qu’on dise, c’est qu’elle mérite sa place. Je pense qu’il n’y a pas à être complexé. Si depuis la nuit des temps la nature a donné une certaine faveur aux hommes leur permettant d’être au devant des choses, il faut qu’ils acceptent le changement des événements et l’évolution du monde. Une femme présidente, c’est à saluer, car ne dit-on pas que derrière un grand homme se trouve une grande femme ? Encore cela est une première en Afrique, vraiment bravo à Mme Ellen Johnson et félicitations à elle.

Mohamed Ghorbel :

C’est une bonne chose pour le Libéria parce que Mme Ellen Johnson a beaucoup plus d’expérience. Georges Weah doit accepter la situation et se rallier à la dame. Ceci constituerait un plus pour le pays.

Seydou Coulibaly, informaticien :

L’élection d’une femme à la tête d’un pays africain est une victoire pour notre démocratie. C’est rare qu’en Afrique on ait des élections où c’est le peuple qui choisit son Homme, homme avec grand H, puisque cette fois-ci c’est une femme. Cela représente une victoire et une matière à réflexion pour les femmes Africaines. Et le sort de la femme dans le milieu politique dépendra du succès ou de l’échec de Ellen Johnson.

Propos recueillis par A. Verlaine KABORE
Sidwaya

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