Au regard des résultats partiels en notre
possession (ceux de 45 bureaux de vote sur 81), les deux protagonistes ne
se sont pas fait de cadeau et ont enregistré des fortunes diverses selon les
localités du département. Ainsi, si Philippe a dicté sa loi à Selbo, les électeurs
de Yakouta n’ont fait que plébisciter le programme de Blaise Compaoré.

Yakouta et Selbo sont deux villages du département de Dori. Le premier est
situé à 13 km de Dori, et le second à 7 km. Rien, apparemment, ne les
distingue des autres hameaux du département. Mais à y regarder de près, ils
constituent des enjeux pour deux des 12 candidats de ce scrutin présidentiel.
Situés à une vingtaine de kilomètres l’un de l’autre, ils symbolisent en effet
tout le duel auquel se livrent, à distance et par personnes interposées, Blaise
Compaoré du CDP et Philippe Ouédraogo du PDS, pour l’obtention des
suffrages des Sahéliens.

Yakouta représente un enjeu électoral énorme pour
le CDP dans le Sahel car il abrite l’un des plus grands barrages de notre pays
qui porte d’ailleurs son nom : "le barrage Yakouta". Celui-ci a été réalisé, on
le sait, sous la houlette du directeur de la campagne présidentielle du
candidat du CDP, en l’occurrence Salif Diallo, ministre d’Etat, ministre de
l’Agriculture, de l’hydraulique et des Ressources halieutiques ; et également
influent dans le Sahel.

Salif Diallo étant l’incontestable patron des opérations
de défense et de protection des intérêts électoraux du candidat Compaoré
dans la région, son souhait, sans doute, est que l’ouvrage de Yakouta
apparaisse aux yeux des Sahéliens comme la preuve de l’engagement du
candidat du CDP à leur côté pour le développement de la région. A ce titre,
un revers de Blaise Compaoré à Yakouta ce 13 novembre 2005, aurait été un
mauvais signe.

Blaise Compaoré s’impose à Yakouta

Quant à Selbo, il est capital dans la stratégie électorale de Philippe du PDS
au Sahel, car il est le village natal de Hamma Arba Diallo, influent, lui aussi,
dans la région.

Ex-député du PDS à l’Assemblée nationale, il demeure,
malgré son départ pour le Programme des Nations Unies pour le
développement (PNUD), la force du PDS dans cette partie du Burkina, donc
un soutien inestimable dans cette candidature de Philippe Ouédraogo dans
le cadre de ce scrutin. Conscient de l’importance de son apport et surtout de
la valeur symbolique de son village, Hamma Arba Diallo s’est rendu à Selbo
dans la matinée du 13 novembre 2005.

Et c’est là-bas qu’il a accompli son devoir civique ; Ainsi, Yakouta et Selbo
revêtaient une importance pour Blaise Compaoré et Philippe Ouédraogo. Et
une victoire de l’un ou l’autre sur la chasse gardée de son adversaire
procurerait un avantage psychologique au vainqueur. Mais aucun d’eux ne
s’est laissé battre dans sa zone stratégique.

Ainsi, Blaise Compaoré s’est
imposé à Yakouta en raflant 155 suffrages sur 171 exprimés, soit un taux de
succès de plus de 90%. Il n’y a concédé que 16 votes aux 12 autres
présidentiables.
En revanche, à Selbo, le président sortant s’est nettement incliné avec un
retard de 134 suffrages par rapport à Philippe Ouédraogo.

En effet, le
candidat du PDS y a fait un raz-de-marée en recueillant 195 suffrages en sa
faveur sur 288 exprimés, soit un taux de réussite de plus de 67%. Blaise
Compaoré, pour sa part, n’a gagné que 21% des votes. Mais sur l’ensemble
des résultats en notre possession, le candidat du CDP dispose d’une avance
notable sur son challenger du PDS. Ainsi, sur 45 urnes dépouillées sur 81
dans le département de Dori, Blaise Compaoré comptabilise, selon nos
calculs, 4 092 voix, contre 1 513 pour Philippe Ouédraogo.

Philippe Ouédraogo est suivi respectivement de Ram Ouédraogo (196),
Laurent Bado (192), Gilbert Bouda (120) et Me Stanislas Sankara (113). Par
ailleurs, il faut noter que Me Hermann Yaméogo, non partant à ce scrutin, a
été voté à 60 reprises par des Sahéliens, se classant même 9e.

Par Grégoire B. BAZIE, envoyé spécial à Dori
Le Pays