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Election présidentielle 2005 : De la brutalité à la sophistication

Publié le mardi 15 novembre 2005 à 09h16min

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Au moment de lire ces lignes les états major des candidats à la présidentielle
seront en train de faire leur bilan de la campagne qui vient de se dérouler du
22 octobre au 11 novembre 2005. Un seul candidat, en plus de faire son
bilan, sera en train de sabler du champagne à la vue de quelques résultats
qui laisseront transparaître sa victoire.

De manière globale que retenir de
cette campagne présidentielle en tant que citoyen lambda qui souhaite
participer au débat public avec certainement ses limites. Loin de s’enfoncer
dans les débats partisans, nous voulons tout juste jeter un regard critique sur
les faits et gestes des principaux acteurs de la scène politique.
Premièrement nous avons constater et vérifier cette affirmation selon laquelle
"tous les moyens sont bons pour atteindre son objectif en politique".

En effet
durant les trois semaines les treize candidats, moins un, ont effectivement
utilisé tous les moyens pour convaincre l’électorat burkinabé, cela dans les
limites du code électoral. Est-ce que le code a été respecté ? ça c’est une
question qui est bien sur réservée aux candidats eux et surtout à la CENI et
au conseil constitutionnel. En tout cas en termes de moyens matériels,
humains et logistiques. Les candidats se sont suffisamment déployés pour
conquérir l’électorat. Cependant tous n’avaient pas malheureusement les
mêmes ressources tant intellectuelles que matériels. Les Burkinabé ont vu les
écarts incroyables entre les différents candidats.

Deuxièmement malgré les énormes écarts entre les candidats il y a eu la
volonté, l’envie, la soif de s’exprimer et la hargne de s’exprimer. Cette
situation a été constatée à travers les signes de fatigue qui marquaient les
visages lors des meetings et des rencontres de proximité avec les militants.
Cette volonté n’est elle pas une caractéristique noble du burkinabé qui a
envie d’un changement de sa situation. Les burkinabés malgré tout ce qu’on
peut dire ont la volonté de changer leur environnement, de transformer leur
pays.

Troisièmement presque tous les candidats ont évoqué dans leur message à
tord ou à raison le manque de ressources et la pauvreté du Burkina. Un pays
qui est déclaré presque dernier de la planète, qui manque de ressources
pour soutenir son économie, comment un candidat peut se permettre de
promettre monts et merveilles à son peuple si il était élu dans ce contexte ?
Aura t il un bâton magique ?

Cela, nous l’avons trouvé contradictoire entre le
discours volontariste des candidats et l’état actuel du Burkina. Nous l’avons
trouvé plus contradictoire au niveau du candidat à sa propre succession qui a
évoqué sur les antennes d’une radio internationale le manque de ressources
du Burkina (qui ne lui est pas imputable). Mais est ce qu’il peut évoqué l’état
de pauvreté de misère du peuple burkinabé pour faire des propositions
crédibles pour sortir son peuple de cet état ? Lui qui été au pouvoir pendant
longtemps.

Pour les autres candidats l’équation est encore plus compliquée
parce que leur analyse sur la situation du Burkina est à la limite
catastrophiste et très alarmiste et imputable à l’autre. Eux, lorsqu’ils vont
arriver certainement en Zorro dans ce contexte auront-ils des solutions
miracles aux problèmes des burkinabés.

Cette campagne nous aura révélé surtout entre autre que le Burkina regorge
des potentialités humaines énormes. On note la volonté de transformer les
choses et l’intelligence pour convaincre l’électorat. Tous les candidats ont
essayé d’esquisser un plan de développement, une stratégie pour y arriver.

De la Fasocratie, au grégarisme, les burkinabés ont entendu, écoutés. Qui va
changer réellement le quotidien des burkinabé dans une situation
économique des plus précaires du monde que tous ont décrié, même ceux
qui ont eu des occasions à le changer ?

De cette campagne, la leçon qu’on peut tirer est que chaque burkinabé doit
compter d’abord sur ses propres forces que de compter sur les magiciens de
tous ordres qui ont passé leur temps à nous convaincre que la politique qui
devait être un champs noble est un champs ou tous les moyens sont bons.


ou les burkinabè attendaient le débat afin de mettre leurs énergies, les
candidats ne sont pas allés sur ce terrain ou du moins se sont contentés de
déclaration. Ce sont les points sur la mise en œuvre d’une démocratie qui
préserve la liberté et la sécurité des individus, la mise en œuvre d’une justice
qui n’est pas aux ordres mais proches du justiciables, la question des droits
des citoyens et les questions cruciales telles que l’éducation et la santé.

L’ombre de Norbert, David, Sankara, de l’impunités et de causes profondes
de cette impunité, de la réconciliation des cœurs pour la construction de la
maison commune ont été occultés. Or que le problème fondamental de ce
pays n’est pas son sous développement et ces corollaires de misère et de
pauvreté, c’est la question fondamentale de la mise en œuvre de la
démocratie, de justice, d’égalité de chances à l’emploi et aux richesses de ce
pays.

La démocratie au Burkina reste à construire. Le fonctionnement des
institutions, l’organisation des élections, la diversité et la "liberté" de la presse,
la stabilité et la paix relative... qui sont souvent cités en exemple ne sont pas
suffisante. Car tout cela est très loin du quotidien de la grande majorité des
burkinabés.

Très récemment il est paru dans la presse quelques écrits qui ont
plus ou moins abordé la question : "le pauvre est né pour voter et mourir", ou
encore lorsqu’on évoque la sophistication des stratégies du régime au
pouvoir. C’est très illusoire de croire que dans cette ambiance électorale le
peuple a fait un choix. L’analphabétisme, l’ignorance, la misère et la pauvreté
sur lesquels s’appuient tous les hommes politiques ne sont ils pas des biais à
cette démocratie ?

Cette volonté de tout accaparer, de réduire les adversaires
au néant, n’est elle pas un signe de refus de débat et de contradiction donc
de refus de construire une démocratie viable ? Le peuple burkinabé va-t-il se
laisser diriger cinq ans dans une ambiance d’insécurité, d’injustice et
d’incertitude ?

Evariste ZONGO

Le Pays

P.-S.

A lire aussi :
Présidentielle 2005

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