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Dialogue : Pour qui trichent les fraudeurs ?

Publié le samedi 12 novembre 2005 à 09h58min

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Ces derniers temps ont vu une succession d’événements qui attestent que la campagne électorale pour la présidentielle du 13 novembre prochain est entrée dans la dernière ligne droite : tout, pour le moment, semble avoir été vidé sur le plan judiciaire ; le Tribunal de grande instance de Ouagadougou vient de se déclarer incompétent pour se saisir d’une affaire introduite par l’UNDD de maître Hermann Yaméogo concernant le fichier électoral.

Moussa Michel Tapsoba, président de la Commission électorale nationale indépendante, a dû respirer un bon coup, lui qui aura usé de patience et d’énergie pour aboutir à une informatisation du fichier électoral au Burkina.

Ce n’est donc pas sans raison qu’il dit sa satisfaction à Drissa Traoré, président du Conseil constitutionnel, à qui des candidats à la présidentielle avaient refilé une patate juridiquement et politiquement chaude. L’homme s’en est sorti, au nom de la loi et de la Constitution...

Drissa : Félicitations pour le travail abattu !

Michel : Merci. Je regrette seulement le fait de constater qu’il existe toujours des gens qui persistent à croire que la perfection est de ce monde...

Drissa : Je m’attendais plus ou moins à cette déclaration du Tribunal de grande instance...

Michel : Ah bon ?

Drissa : Ben, oui ! Ces gens-là, où étaient-ils depuis ? Quelle a été leur part réelle dans la confection du fichier querellé ? Ce sont eux les premiers intéressés !

Michel : Il faut dire qu’il y a des gens qui ont craint le pire lors de ces récusations de maître Sankara...

Drissa : Normal ! Au Burkina, chacun veut une chose et son contraire...

Michel : Ah, ah, ah !

Drissa : Regarde, quand il y a un régime dit d’exception, on crie au loup et on réclame une Constitution. Lorsqu’on a la Constitution, non seulement on la lit mal, mais le plus drôle c’est que ce sont ceux-là même qui se disent éclairés qui prônent sa mauvaise application.

Michel : Tu sais, ici, pour ce qui est de la lecture et la compréhension des textes...

Drissa : Mais, c’est pas sorcier ! Les constituants ont essayé d’être le plus clairs possible ! Pour ce dont tu parles, que dit l’article 55 ? "Le président du Faso nomme aux emplois de la haute administration civile et militaire..." C’est pas moi qui ai dit ça ! Alors, en n’y tenant pas compte, on se tourne contre la Constitution ! Non, ces gens-là cherchaient autre chose. Ils voulaient simplement faire passer le Conseil pour le bouc émissaire d’une situation dont aucune responsabilité ne lui incombe...

Michel : Je pense qu’à présent tout le monde aura compris où se situent les responsabilités...

Drissa : Comment fais-tu avec tes doubles inscriptions et autres ? Il y en a qui pensent que c’est la CENI qui prépare la fraude !

Michel : Nous corrigeons au fur et à mesure que nous sont rapportées les erreurs. Cependant, j’ai dit et je répète qu’il appartient aux partis politiques de civiliser leurs militants afin qu’ils acquièrent des attitudes politiquement correctes !

Drissa : Un véritable casse-tête !

Michel : C’est une affaire qui demande du temps et beaucoup de patience. Or, il y en a qui sont plus pressés que leur ombre...

Drissa : Ah, ah, ah !

Michel : Quel intérêt aurait la CENI à organiser la fraude ? Aucun ! Si ce n’est à perdre de sa crédibilité à tous les niveaux...

Drissa : Surtout auprès des partenaires qui nous aident à asseoir la démocratie !

Michel : Alors, tu vois ! S’il y a fraude, c’est au niveau des partis politiques ! La CENI ne fraude pas, et s’il y a fraude, les fraudeurs ne le font pas pour la CENI ! Au lieu d’entretenir des faux débats, les partis politiques feraient mieux de se tourner vers l’éducation et la formation de leurs militants...

Drissa : Oh... sur la centaine de partis existant sur le territoire, combien sont-ils réellement à pouvoir tenir un bon meeting de militants ?

Michel : Ces temps-ci on en voit, du monde, à la télé...

Drissa : Oh... ne confond pas militants et badauds ! Si tu prends le cas de ces villages reculés qui voient rarement passer des véhicules, la présence d’une caravane de beaux parleurs attire forcément les spectateurs !

Michel : Ce dont j’ai peur, c’est cette rumeur d’appel à la désobéissance civile...

Drissa : Je vois... c’est encore là une trouvaille politique de l’UNDD !

Michel : Politique, pendant que ses partisans affirment que la Constitution le permet ?

Drissa : Sacrée Constitution, que ne fera-t-on pas en ton nom ! Tu vois, ces gens-là pourraient en référer à l’article 30, mais là encore il faut le lire entièrement !

Michel : Comment ça ?

Drissa : Eh bien, la loi n’empêche pas d’action collective, mais il faut que cela soit initié contre des actes spécifiques ; des actes qui lèsent par exemple les intérêts des communautés sociales, ce qui ne semble pas le cas ici...

Michel : Cela veut dire...

Drissa : Je n’insinue rien ! Je dis simplement ce qui est ! La loi est faite pour s’appliquer à tout le monde...

Michel : Il n’y a donc aucune inquiétude à se faire !

Drissa : A priori, non ! Enfin... sauf qu’il y aura
toujours, sous tous les cieux, des combattants pensant qu’il faut envers et contre tous effectuer ce qu’ils appellent ’’baroud’’ d’honneur... même à leurs risque et péril...

Propos recueillis en toute indépendance par le Journal du jeudi

P.-S.

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