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France : La révolte des banlieusards

Publié le mardi 8 novembre 2005 à 08h43min

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Banlieues. Un mot qui véhicule la fracture sociale et la non intégration des immigrés en France, une réalité bien triste pour des milliers de personnes reléguées aux périphéries des grandes villes et dont le mal - vivre se traduit par des poussées de fièvre regulières, comme les violences nocturnes actuelles. Crise de la société ou de la démocratie françaises ?

Sans doute les deux, à la fois, puisque le progrès à la française n’a jamais pu apporter une réponse satisfaisante aux questions de sous-éducation, de manque de formation professionnelle et de chômage des jeunes des quartiers défavorisés.

Tant et si bien que pour se faire entendre, les banlieusards n’ont d’autres recours que la violence qui, malheureusement, est aveugle. Les casses et les incendies concernent d’abord les biens des habitants de ces quartiers abandonnés à eux-mêmes et donnent une image négative de ceux qui y résident. La preuve, en dépit des déclarations très dures de Nicolas Sarkozy, le ministre de l’Intérieur, qui a traité une frange des jeunes banlieusards de "racaille", sa cote de popularité demeure presqu’intacte. C’est dire que la France des Français, repue et en sécurité, se soucie peu du "blues" des habitants des banlieues.

Cette indifférence est en grande partie imputable à l’échec des différentes politiques sociales mises en oeuvre tant par la Gauche que par la Droite. D’où l’embarras que l’on observe au sein du Parti socialiste, dont certains ténors refusent de faire des accusations gratuites en prenant Sarkozy et la droite pour les bouc-émissaires. Ils sont bien conscients qu’ils ont, eux aussi, une part de responsabilité dans cette chienlit, pour avoir exercé le pouvoir d’Etat, sans pour autant parvenir à régler le problème. Les fondements de la crise sont profonds et reflètent une politique d’exclusion des populations immigrées des fruits de la croissance française.

Comme des pompiers qui accourent pour éteindre un incendie, la classe politique française fait des propositions tous azimuts. Une mobilisation générale est constatée et même Jacques Chirac est monté au créneau, avec la ferme intention de rétablir l’ordre. C’est sans doute la priorité absolue des dirigeants français. Mais après ce branle-bas de combat, quelles solutions durables seront-elles mises en oeuvre ?

Les Français tireront-ils toutes les leçons du ras-le-bol des jeunes banlieusards ? Les incendies qui ont détruit, il y a quelques mois des immeubles habités par des Africains et fait des morts, avaient suscité la même émotion. Mais, on se demande quelle suite a été donnée au manque de logement des habitants de ces immeubles délabrés.

Il apparaît, en tout cas, que le système démocratique français a montré une double défaillance non seulement en ne réduisant pas le fossé social que le président Chirac avant juré de combler mais aussi en étant incapable d’éviter les manifestations violentes. L’urgence est donc à la mise en place de mécanismes de dialogue entre l’Etat, les collectivités locales, les associations de quartiers et les jeunes. C’est le préalable pour instaurer un climat de confiance, pour un nouveau contrat social où les jeunes auront leur mot à dire et la maîtrise de leur avenir professionnel. Exclus du marché de l’emploi, avec des parents tout aussi désoeuvrés sinon aux revenus insufflants, ces jeunes se retrouvent sans repères. Et les plus faibles ne peuvent que succomber à la tentation de la délinquance.

Au contraire d’autres pays développés qui ont trouvé des ressorts pour éviter les crises à la fois entre générations et entre milieux sociaux, la France peine à trouver le juste chemin. A force de tâtonnements et de politiques peu hardies, souvent sous la pression d’une extrême droite toujours vivante, la classe politique a laissé pourrir la situation. Une démocratie, c’est aussi la capacité d’un pays à transcender certaines contradictions qui peuvent mettre en péril la cohésion et même la stabilité des institutions. Gageons que la France saura être à la hauteur des défis que lui opposent les banlieues, ces cités calmes en apparence, mais qui sont de véritables volcans endormis.

La France, patrie des droits de l’Homme et du citoyen, mérite mieux que ces spectacles horripilants.

Le Pays

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Vos commentaires

  • Le 8 novembre 2005 à 23:07 En réponse à : > France : La révolte des banlieusards

    L’article est intéressant car il propose une analyse que ne voit pas en France. Le fait qu’elle provienne d’un pays éloigné de la France y est pour beaucoup, tant on perçoit mieux les choses avec la distance. Merci à l’auteur dont, en tant que lecteur, j’aurais aimé connaitre le nom.

    Ici (en France donc) l’affaire est devenu une histoire de communication télévisuelle, mais à aucun moment on essait de prendre le problème dans son global, en considérant les racines, la teneur, mais aussi l’avenir. Il faut être réaliste. Qu’est-ce que les gouvernants peuvent apporter aux exclus des banlieues (et d’ailleurs..) ? Ce ne sont pas les politiciens qui controlent l’économie. Or dans le système occidental (quasi-mondial), c’est le secteur économique qui domine. Le marché fait et défait les emplois.. C’est la mondialisation, non ? Les gouvernements sont des intermédiaires chargés d’imposer la loi du marché à leurs populations. Celles-ci doivent comprendre désormais qu’il ne faut rien attendre des programmes politiques actuels, et qu’une alternative au système est nécessaire. Les jeunes (et moins jeunes) qui embrasent l’hexagone en ces jours ne sont pas les seuls révoltés.. Mais leur violence passe bien à l’antenne, devenant prétexte aux forces de l’ordre pour réprimer, et aux politiciens pour politiser. Et aux haines de s’exacerber.

    L’homme doit toujours se révolter contre le pouvoir qui l’oppresse, mais la violence et le vandalisme ne sont pas la meilleure solution. D’autres voies existent... De quoi seront faits les jours qui arrivent ?
    Je voudrais en profiter pour fêter un bon anniversaire à Faso.net, et saluer leur travail. Longue vie à l’équipe. Et le courage.
    Nono Billy.

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