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France - Côte d’Ivoire : La politique de l’autruche

Publié le lundi 17 octobre 2005 à 07h30min

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Dans le couscous politique presque indigeste de la Côte d’Ivoire, la France vient de mettre un gros grain de sable. A savoir, l’alignement de Paris sur les récentes décisions contestées par une partie des protagonistes de la crise qui n’ont jamais été consultés, de l’Union africaine et tendant à prolonger le mandat de Laurent Gbagbo pour un an jusqu’à la fin de la transition.

La France a même redigé et introduit un projet de résolution allant dans ce sens.

Membre permanent du Conseil de sécurité avec droit de veto, le comportement de Paris peut évidemment peser sur la direction que prendraient les débats autour du dossier ivoirien. La position de la France est-elle destinée à intimider et à dissuader à l’avance toute velléité de contestation de sa proposition ? On peut le penser.

Toujours est-il que l’attitude de la France dénote d’un parti pris inopportun et contreproductif en termes d’apaisement du climat plus que jamais explosif à l’approche de la date du 30 octobre. La France aurait dû se taire au regard de son parcours calamiteux dans la crise ivoirienne. Elle apparaît aujourd’hui disqualifiée pour jouer les pompiers.

En montrant sa partialité, elle perd en conséquence toute crédibilité face aux autres acteurs de la scène politique ivoirienne. Evidemment, Paris est forcée de faire la part belle à Gbagbo pour plusieurs raisons. D’abord, parce que les intérêts économiques de la France demeurent encore immenses en Côte d’Ivoire.

En plus, beaucoup de ressortissants français, après la vague des départs, résident encore dans le pays. D’où le souci de Paris de protéger non seulement ses derniers "Mohicans" restés sur place, mais également de briser les facteurs psychologiques qui enveniment ses rapports avec Abidjan.

En effet, Laurent Gbagbo, astucieusement, a compris l’âme française et a su innoculer dans l’inconscient collectif de certains de ses compatriotes, un sentiment antifrançais. Revers de l’histoire. Venue à la rescousse d’un régime impopulaire et vomi par une partie des citoyens ivoiriens, la France se trouve ainsi récompensée en monnaie de singe.

A tort ou à raison, la France pense que la meilleure façon de ne pas perdre une pièce essentielle de son précarré africain, c’est de composer avec le régime en place, même décrié par la majorité des citoyens ivoiriens. D’autant que la pierre angulaire de la diplomatie française en Afrique a toujours été de travailler étroitement avec les pouvoirs en place, quelle que soit leur couleur du moment : dictatoriale, totalitaire, fascisante ou génocidaire.
Aussi Paris ne craint-elle pas de pratiquer la politique de l’autruche.

La France refuse donc de voir la réalité en face. La réalité, c’est d’abord l’incapacité congénitale de Gbagbo, fût-il président d’une transition, de se dépouiller de ses attributs de chef d’Etat pour inaugurer des chrysanthèmes. C’est une constante en Afrique. Même en temps normal, rarement un chef d’Etat en fonction accepte de perdre des élections qu’il a organisées lui-même.

En conséquence, Gbagbo qui porte le dossard de président par qui le scandale de l’exclusion et de la xénophobie est arrivé, et qui a accumulé beaucoup de rancoeurs contre lui, peut-il faire violence sur lui-même et nommer un Premier ministre qui aura le profil d’un homme consensuel ? Peut-il surtout accepter que ce dernier ait réellement les prérogatives d’un chef de l’Exécutif, quitte à s’abstenir de se présenter à l’élection présidentielle ?

Il ne sert à rien, au stade actuel de l’évolution de la situation explosive en Côte d’Ivoire, de s’arc-bouter sur la légalité et la légitimité du reste contestées du pouvoir de Gbagbo. Peut-être que la situation de ni guerre ni paix en Côte d’Ivoire, cette sorte de statu quo, arrange tout le monde. Les chefs d’Etat africains qui craignent de se retrouver dans la même situation que Gbagbo et de se voir contraints à la démission.

L’ONU ensuite qui n’a jamais su réagir préventivement, se contentant de petits remèdes par doses calculées, en fonction des états d’âme des intérêts divergents des Etats membres. Dans tous les cas, la communauté internationale porte une grande responsabilité et ne pourrait indéfiniment se complaire dans son laxisme actuel dans la mesure où ailleurs, de par le monde, des transitions ont réussi en sacrifiant le président. Le cas le plus récent est celui du Liberia. La Côte d’Ivoire mérite elle aussi, ce remède de cheval.

En définitive, le dernier mot revient au Conseil de Sécurité. Il lui incombe de ne pas se laisser piéger par des querelles subalternes eu égard à la gravité de la situation. Malheureusement, en se rangeant derrière la position de la France qui prépare un projet de résolution en faveur du maintient de Gbagbo au pouvoir, le Conseil de Sécurité ne peut que mettre davantage de l’huile sur le feu en côte d’Ivoire.

Le Pays

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Vos commentaires

  • Le 17 octobre 2005 à 10:13, par ivoirebene En réponse à : > France - Côte d’Ivoire : La politique de l’autruche

    Excellent !

    N’ayant jamais été intéressée par la politique et surtout trouvant la situation en côte d’ivoire désespérante sinon ridicule voire pitoyable, je ne m’attarde jamais sur un article de presse relatif à la situation qui y prévaut actuellement (d’autant plus que les articles de presse ne sont pas vraiment objectifs et abondent pour la plupart en faveur du président actuel.

    Cependant, j’ai lu le votre jusqu’à la fin, et ayant été agréablement surprise par le contenu, je voulais juste vous féliciter pour votre objectivité, votre franc parlé et vos conseils avisés.

    Encore bravo et bon courage !

    • Le 17 octobre 2005 à 11:33, par Papa Logo En réponse à : > France - Côte d’Ivoire : La politique de l’autruche

      De toutes les manières, la France ne se fait que défendre ses intérêts et ses compatriotes.
      Elle a raison sur ce point. Et quoi qu’il arrive, il y aura toujours un camp pour dire que c’est le mauvais choix ou qu’il fallait ne rien dire. Laissons faire les élections qui de toutes manières seront trucquées et on verra ensuite.
      Papa logo

    • Le 17 octobre 2005 à 20:12, par tokos En réponse à : > France - Côte d’Ivoire : La politique de l’autruche

      Si vous voyez l’objectivité dans cet article alors je crois effectivement qu’il faut un débat sur l’histoire de la naissance de la côte d’ivoire. Je vous conseille de lire Aminata Traoré (Lettre au Président des Français à propos de la Côte d’Ivoire et de l’Afrique en général). Au moins vous apprendrez à pondre un article de façon chronologique en y inscrivant les faits posés par les différents acteurs, sans utiliser à l’emporte pièce des adjectifs qualificatifs qui ne démontrent rien.

      Au fait, Compaoré - grand ami de la France - est il un exemple de dirigeant respectueux des droits humains fondamentaux ?
      Vous mentez quand vous écrivez que Gbagbo est à l’origine de la crise que vous attribuez à l’ivoirité. Cette dernière a été mise sur pied par Bédié sans que la France y trouve quoi que ce soit à dire ! Elle a été générée entre autres par Ouattara, oui vous avez bien lu, par Ouattara par introduction de la carte de séjour à une frange de la population que je vous laisse le soin de nommer puisque vous êtes si objectif .

      Comme quelqu’un l’a écrit la France défend ses intérêts un point c’est tout et n’a rien à foutre du devenir des africain(e)s. Elle soutient tous les corrompus de sa sphère d’influence car c’est par ce moyen qu’elle a accès au pillage des ressources, étant incapables de lutter dans un cadre concurrentiel. C’est la raison d’être des Compaoré, Biya, Bongo, Sassou, Déby etc... Et Gbagbo ayant été récalcitrant, c’est la raison d’être de la crise. Aujourd’hui elle compose parce qu’elle est assez futée pour savoir que cette fois elle peut tout perdre. Pendant ce temps dans un coin de son esprit elle n’a pas renoncer à tuer Gbagbo politiquement et physiquement.

      Au nom de quoi Gbagbo ne devrait plus être président ?

      Pour préparer une transition avec des collabos moins regardant. Ces collabos sont ces pseudo rebelles qui servent de paravent partout en Afrique pour la recoloniser. Mais cette fois les choses sont plus compliquées, et le seront davantage je l’espère dans toute l’Afrique pour les colons et leurs collabos, autrement appelées forces nouvelles dans ce cas.

      Apprenez à analyser, plutôt qu’à être éternellement partisant.

      D’après vous pourquoi Sankara a t’il subit un processus de rectification dont Compaoré lui même ne fait plus état tellement la corruption, l’enrichissement illicite et l’assassinat (Zongo) sont le lot quotidien des citoyen(nes).
      Le jour au Un ou Une BURKINABE intègre retrouvera le pouvoir et posera le problème du colonialisme que la France croit éternel, vous aurez vos forces nouvelles...

      • Le 17 octobre 2005 à 21:47, par Yves Sangaré l’ivoirien (Abidjan Cocody) En réponse à : > France - Côte d’Ivoire : La politique de l’autruche

        Merci Tokos pour ta reponse à ivoirebene qui le mérite.

        • Le 20 octobre 2005 à 09:52, par ivoirebene En réponse à : > France - Côte d’Ivoire : La politique de l’autruche

          Comme toujours, tout ce que certains savent faire, c’est envenimer les choses, provoquer des querelles de personne ... En l’occurrence il ne s’agit pas ici d’une quelconque réponse à ivoiredebene mais d’une autre analyse et d’une autre vision des conflits en Afrique.

          Alors au lieu de perdre votre temps en polémique et en agression verbale visant à échauffer les sangs et engendrer des échanges enflammés et au final, stériles, proposez des solutions et ne vous noyez pas dans un verre d’eau.

          Ceci sera mon ultime courrier concernant cet article et toutes vos réponses et réflexions à venir, j’ai en effet d’autre "chats à fouetter" plutôt que de vous suivre dans vos divagations et constats qui par ailleurs, n’engagent que vous.

          Bonne journée et bon courage dans votre combat.

      • Le 18 octobre 2005 à 10:15 En réponse à : > France - Côte d’Ivoire : La politique de l’autruche

        Je partage dans les grandes lignes votre analyse. L’heure a sonné pour la renaissance africaine. Tant pis pour les canards boiteux comme l’auteur de l’article et la maffia qu’il défend. Un nationaliste africain

  • Le 17 octobre 2005 à 10:33, par DR B Yaovi (Bruxelle) En réponse à : Reveillons nous, peuple d’Afrique

    Vous devez vous rendre compte avec un peu d’intelligence que vos analyses sur la situation en CI sont en porte a faux avec la realite.Pourquoi le Pr Gbagbo peut-il gagner toutes ces batailles au niveau international s’il a tort sur toute la ligne selon vos analyses et s’il est impopulaire dans son propre pays qu’il dirige.Il est peut etre temps que vous realisiez qu’il est un digne fils de l’Afrique et qu’il a la raison de son cote. Raison qu’on finit par lui reconnaitre malgre les mensonges vehicules par medias interposes et orchestres par la France et ses satellites en Afrique. Reveillons nous tous ensemble pour mieux apprehender la realite des choses. Pour ma part ,malgre mon hostilite de depart liee a mon ignorance et amplifiee par les media francais, j’ai fini par reconnaitre la haute carrure du Pr Gbagbo et le sens de son combat pour son pays et donc pour l’Afrique.
    Que son exemple de courage inspire nos dirigeants politiques pour mieux travailler pour leur peuple au lieu d’etre a la solde de la France qui ne fait que piller nos ressources.
    Reveillons nous des a present pour le futur de notre cher continent.

  • Le 17 octobre 2005 à 20:59, par Yves Sangaré l’ivoirien (Abidjan Cocody) En réponse à : > France - Côte d’Ivoire : La politique de l’autruche

    L’auteur de l’article fait parti de ceux qui aimeraient que la Cote d’ivoire reste dans cet etat de guerre à defaut de voir de le President Gbagbo parti du pouvoir.L’auteur est encore encré dans le mensonge distillé par les ennemis de la Coted’ivoire dépuis 3 ans si bien que son analyse perd son objectivité et sa credibilité.En Cote d’ivoire il aurait travaillé pour le Patriote.
    La politique d’exclusion et de xénéphobie ne vient pas de Gbagbo.Ce dernier etait encore dans l’opposition quand le président Bédié pour ecarter le mossi Allassane Dramane Ouattara de la course du pouvoir a du concocté un plan qui a eu une repercussion néfaste sur la communauté
    sous regionale et en particulier ceux du BF.La guerre en Cote d’ivoire est la guerre entre les 3 heritiers du defunt president Houphouet que sont :Guei , Bédié et Ouattara .
    Bédié est renversé par le tendem Guei - Ouattara. Guei ecarte Ouattara une fois installé.Gbagbo qui n’avait rien à avoir avec ces heritiers est venu leur ravir le pouvoir.Voici le probleme en Cote d’ivoire.Ouattara qui a vu le pouvoir lui echaper par 3 fois a commencé sa grande campagne de denigrement contre "son" pays adoptif la Cote d’ivoire.
    La France tout comme certains pays de la sous region se rendent compte du mensonge des ennemis de ce pays. En fait la vérité commence par réssurgir et comme un pays a des interets et non des amis c’est le plus normal qu’elle s’evertue maintenant à mettre un trait sur la rebellions soutenue par votre gouvernement.
    C’est dommage que l’auteur de l’article voudrait mettre sur le meme pieds d’égalité une rebellion sanguinaire qui fait un traffic illicite des ressources ivoiriennes vers le Burkina enrichissant les chefs de guerre et un pouvoir légal qui n’a fait que defendre son peuple et lui meme.Vous burkinabés qui savez comment se font les coups d’etat,pourriez vous me dire depuis quand un coup d’etat prend près de 3 ans pour s’accomplir ???.Un coup d’etat se fait en 3 jours au maximum.
    Je vais terminer pour dire à l’auteur que nous ivoiriens nous en avons assez de cette guerre. Nous voulons reprendre notre place de leader dans l’UEMOA.Quand 40% de la masse monetaire est généré par l’economie ivoirienne dans la sous region un pays comme le Burkina ,le Niger ou le Mali devraient œuvrer pour que la paix reviennent en Cote D’ivoire que d’ecrire des articles qui tendent à entretenir le climat guerre.
    Merci

    • Le 28 novembre 2005 à 22:50, par MA MER A PERDU SON CLITO En réponse à : > France - Côte d’Ivoire : La politique de l’autruche

      "A tort ou à raison, la France pense que la meilleure façon de ne pas perdre une pièce essentielle de son précarré africain, c’est de composer avec le régime en place, même décrié par la majorité des citoyens ivoiriens." vous ne cessez de parler de majorité ; or c’est cette majorité qui refuse Depuis 2003 ( après le ’raccorci macaroni’ )d’aller à la consultation populaire. vous avez tergiversé pour faire échouer les élections d’oct.2005, car vous connaissez la cinglante giffle que la "minorité " vous réserve.si l FPI était minoritaire, cette crise aurait pris fin il y a longtemps.De toutes façons vous et vos rebelles votre sort est déjà scellé. Quand GBAGBO DIT : " la guerre est finie", vous croyez qu’il joue, c’est bien des paroles prophétiques, car l’hommest oint de Dieu Lui-même. Envoyez-nous toutes les armées du monde, KOUDOU et sa "minorité" seront toujours debout ; c’est DIEU qui combat à notre place. vous ne le savez pas encore ???DIEU BENISSE GBgbo et la côte d’Ivoire.
      100% ATTIE

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