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Témoignages : Le Général Aboubacar Sangoulé Lamizana, un énorme héritage aux Burkinabè

Publié le mardi 11 octobre 2005 à 07h36min

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Le 26 mai 2005 s’éteignait à la clinique Notre Dame de la Paix à Ouagadougou, le général Aboubacar Sangoulé Lamizana à l’âge de 89 ans. Président de la Haute Volta de 1966 à 1980, le général Lamizana a incontestablement marqué, de manière significative, l’histoire du Burkina Faso. En témoigne le deuil national de trois jours décrété après son décès.

Sidwaya a échangé avec les professeurs Georges Enouyaba Madièga et Nurukyor Claude Somda, tous deux membres de l’Association des Historiens du Burkina qui a vu le jour en mai 2005 à Bobo-Dioulasso avec comme président, le Dr Moussa Bantinga. Avec les deux historiens, il a été question de la vie de l’illustre disparu et plus particulièrement de la contribution de Lamizana à l’enracinement de la démocratie au Burkina Faso.

Pour ces deux enseignants chercheurs au département d’histoire et d’archéologie de l’université de Ouagadougou, « Lamizana a été un grand témoin de l’histoire du Burkina Faso et de l’Afrique ». Le général Lamizana a publié ses mémoires en deux tomes intitulés : « Sous les drapeaux » et « Sur la brèche, trente ans durant ».

Sidwaya(S.) : Le 26 mai dernier disparaissait le général Aboubacar Sangoulé Lamizana qui a été président de la Haute Volta de 1966 à 1980. Que retenez-vous de cet homme ?

Dr Nurukyor Claude Somda(N.C.S) : Nous pouvons dire que c’est un baobab qui est tombé le lundi 26 mai à Ouagadougou. Lamizana était un géant et il a laissé un vide dans l’espace sous régional. Je pense que Lamizana, à plusieurs titres, reflète un certain nombre de valeurs de référence dans nos sociétés traditionnelles. Il a capitalisé l’essentiel des valeurs de référence de nos traditions et il a su les faire traduire dans la réalité concrète tout au long de sa vie.

Comme le disait quelqu’un, Lamizana a été recruté sous les arbres malgré lui, donc soldat malgré lui, volontaire malgré lui. Lamizana est devenu chef d’État malgré lui et il est devenu un héros peut-être malgré lui. Je pense qu’on ne peut pas mieux résumer la vie de cet homme. Dans la vie de tous les jours, il s’est révélé un père sans pareil et dans la vie politique bien qu’apparemment sans préparation, Lamizana a démontré de très grandes qualités qui ont étonné bien de politiciens avertis.

L’œuvre de Lamizana est immense et nous avons eu la chance d’avoir ce puits, cette source qu’il nous a laissée à travers ses mémoires. On disait que Lamizana était un homme suprêmement intelligent, souple, rusé, madré. Il a su tellement utiliser les hommes que très souvent des gens << le prenaient pour le cheval alors qu’il était en réalité le cavalier>>.

Lamizana était père à plusieurs niveaux. Au niveau de la nation burkinabè, Lamizana était père, il était père de famille, père de l’armée voltaïque. C’est l’un des rares chefs d’État à être resté pendant quinze ans au pouvoir dans la sous région sous le costume militaire tout en étant comme le disait un auteur, « le plus civil des militaires burkinabè ».

(S.) : Qu’est-ce qu’on doit retenir de l’arrivée de Lamizana au pouvoir le 3 janvier 1966. Est-ce à la suite d’un coup d’État ou d’un soulèvement populaire ?

Dr Georges Madiéga (G.M.) : Il faut peut-être voir d’abord l’environnement politique qui prévalait au moment de l’arrivée au pouvoir de Lamizana en 1966. Sur le plan international, l’environnement était dominé par la guerre froide entre l’Est et l’Ouest avec ce qu’elle avait comme représentations et répercussions dans nos pays. Aux lendemains des indépendances dans les années 1960, la tendance était qu’il fallait construire l’unité nationale sur la base de partis uniques autour d’un homme providentiel. Et cette tendance se vérifiait dans les gouvernements de gauche comme de droite. L’environnement politique interafricain était aussi dominé par des coups d’État avec les exemples du Togo, du Bénin, du Congo, de la Centrafrique, du Ghana.

C’était une atmosphère de coups d’État avec des militaires qui ont commencé à remplacer les intellectuels ayant conduit les pays à l’indépendance. Enfin, il y avait l’environnement politique national caractérisé par la gestion autocratique du pouvoir de Maurice Yaméogo qui s’était aliéné les syndicalistes, la chefferie traditionnelle, l’Église, et les partis politiques comme le Mouvement de libération national(MLN), le Parti africain de l’indépendance (PAI). Au sein même du Rassemblement démocratique africain(RDA), Maurice Yaméogo avait mené une lutte dure à l’encontre de ses opposants comme Joseph Ouédraogo.

L’environnement économique national était aussi caractérisé par une crise budgétaire et financière causée par une mauvaise gestion. C’est dans ce contexte que Maurice Yaméogo va tenter d’instaurer une politique d’austérité. Cette politique va être condamnée par les syndicats qui vont s’organiser pour mener une lutte contre les mesures d’austérité décrétées par le pouvoir. Les syndicats allaient ainsi déclencher des grèves à partir de décembre 1965 qui vont conduire à la fameuse journée du 3-Janvier 1966 et le départ de Maurice Yaméogo du pouvoir. Voilà très rapidement brossé les facteurs qui vont concourir à l’arrivée de Sangoulé Lamizana au pouvoir.

C’est contraint et forcé, avec les larmes aux yeux que Lamizana a pris le pouvoir

Il faut dire que Lamizana n’en voulait pas. C’est évident. Il le dit lui-même dans ses mémoires. C’est contraint et forcé, avec les larmes aux yeux parce qu’il n’était pas préparé, qu’il a pris le pouvoir. La situation était dramatique et quand la population criait « l’armée au pouvoir », Lamizana s’est vu contraint de prendre ses responsabilités. Maintenant, est-ce que Maurice Yaméogo a cédé pour éviter un bain de sang ?

Les avis divergent sur la question. Lamizana dit dans ses mémoires que Maurice Yaméogo ne lui a jamais donné l’ordre de tirer sur les manifestants. D’autres écrivains affirment le contraire. Ce qui est sûr, c’est que le 3-Janvier 1966 a été une journée historique dans la mesure où on a vu le peuple sympathiser avec l’armée. On avait l’impression que c’était l’armée du peuple qui était à la place d’armes et qui a refusé de réprimer la population. C’est cette atmosphère assez originale dans la prise du pouvoir qui était différente des coups d’État qu’on avait connus ailleurs et qui se caractérisaient par une prise du pouvoir par la force. Le 3-Janvier 1966, c’est le peuple qui a demandé à l’armée de prendre le pouvoir.

Et cela s’explique aussi parce que les syndicalistes qui avaient mené la lutte n’avaient pas pour objectif la conquête du pouvoir d’État.

S. : On ne doit donc pas parler de coup d’État en ce qui concerne les événements du 3-Janvier 1966 ?

G.M : C’est difficile de parler de coup d’État. En tout cas ce n’est pas un coup d’État classique. C’est un appel à l’armée. Évidemment le coup d’État va intervenir lorsque le 12 décembre 1966, l’armée refuse réellement de remettre le pouvoir et décide de le conserver pour quatre ans.

Dr N.C.S : Il ne faut pas oublier le contexte si on veut qualifier ce qui s’est passé le 3-Janvier 1966 de coup d’État ou pas. Est-ce que les militaires voltaïques en 1966 étaient préparés à un coup d’État comme nous l’avons vu ailleurs ? Je crois que c’est l’un des fondements qui pourraient permettre de répondre à cette question de coup d’État en janvier 1966. Plusieurs auteurs s’accordent à dire que ce qui s’est passé le 3-Janvier 1966 n’était pas un coup d’État. Etant donné que c’est le peuple qui a demandé à son armée qui était chargée de l’intégrité nationale, de prendre le pouvoir. Et d’après certains, les manifestants sont allés pour demander un régime plus ou moins intérimaire. C’est par la suite que les choses se sont précipitées. Le premier gouvernement de Lamizana était composé de militaires certes mais aussi de civils.

Lamizana, en prenant le pouvoir, a déclaré qu’il n’était d’aucune région, qu’il n’était d’aucune ethnie et qu’il était arrivé au pouvoir à son corps défendant. Ce sont les hommes politiques de ce pays qui, par leur conduite, ont offert le pouvoir à Lamizana. Il ne pouvait rien faire d’autre que d’accepter, en tant que l’officier le plus ancien dans le grade le plus élevé. Le 3-Janvier 1966 n’était pas un coup d’État, c’est par la suite quand les militaires ont décidé de garder le pouvoir qu’on peut parler de coup d’État.

G.M. : Ce sont les partis politiques qui l’ont qualifié de coup d’État parce qu’ils n’étaient pas contents. Les responsables politiques pensaient avoir confié de façon provisoire le pouvoir à Lamizana et ils s’attendaient à ce que le pouvoir leur soit restitué le plus rapidement possible.

Lamizana avait demandé aux différents protagonistes de s’entendre. Devant l’incapacité des partis politiques à s’entendre, il a décidé avec l’armée de prendre le pouvoir le 12 décembre 1966 et de le conserver pendant quatre ans après avoir créé le 9 décembre 1966, le Conseil supérieur des forces armées. Le 12 décembre 1966, il suspendait en même temps les activités politiques pour une durée de 4 ans.

S. : Comment Lamizana a-t-il géré le pouvoir de la période du 3-Janvier 1966 au 12 décembre 1966 ?

N.C.S. : A son arrivée au pouvoir, Lamizana a dit qu’il ne venait d’aucune région et qu’il n’était d’aucune ethnie et que sa volonté était de faire en sorte que tous les Burkinabè, Voltaïques à l’époque, soient conscients des responsabilités que chacun devait assumer. L’habileté de Lamizana a été telle que tout ce que les Voltaïques avaient refusé comme sacrifices avec Maurice Yaméogo, ils ont accepté par la suite des sacrifices beaucoup plus grands. Lamizana avait fait comprendre aux uns et aux autres que les difficultés ne pouvaient être vaincues par un seul homme mais par tous les Burkinabè avec la contribution des militaires qui étaient venus pour aider à réorganiser le pays. Jusqu’en décembre 1966, Lamizana n’a pas affiché d’ambitions. C’est d’ailleurs l’une de ses grandes qualités. Ne jamais avouer ses intentions de façon précise.

G.M. : Lamizana n’était pas un homme politique mais un militaire qui arrivait au pouvoir un peu contraint et forcé. C’est un militaire qui arrive au pouvoir un peu paniqué dans la mesure où il ne s’attendait pas à un tel niveau de responsabilité. Il le confesse lui-même dans ses mémoires.

Il avait donc en face les syndicats d’une part et les partis politiques d’autre part. C’était souvent les mêmes hommes politiques qui animaient les syndicats. Lamizana devait donc examiner les revendications des syndicats et des hommes politiques. Dans la stratégie des partis politiques, il devait s’agir d’une transition rapide qui allait leur permettre d’accéder au pouvoir. Les hommes politiques n’ont pas su surpasser leurs divisions pour s’entendre dans la perspective de la gestion du pouvoir. Il n’y a pas eu d’entente vraie entre les partis politiques et on peut penser qu’il y a eu déception de la part de Lamizana et de l’armée.

L’analyse qu’il en a faite, c’est que les partis politiques sont sources de division, de désunion et que lui en tant que militaire avec l’armée pouvait œuvrer à l’union du pays. Les militaires ont dû aussi donner de la voix et pousser Lamizana à prendre le pouvoir face à l’incapacité des civils à s’unir.

N.C.S. : Les hommes politiques s’étaient disqualifiés et c’est ce qui a conduit aux événements de janvier 1966. Quand Lamizana est arrivé au pouvoir, il ne connaissait pas le terrain. Il a tâté le terrain et au fur et à mesure qu’il découvrait les points faibles des hommes politiques, il posait des actes concrets. Comme quelqu’un qui joue à la corde en tirant au fur et à mesure. Il a pu tirer sur la corde pendant quinze ans avant qu’on ne le déboute par un coup d’État militaire cette fois-ci. Sinon, si le jeu était politique, Lamizana serait resté au pouvoir pendant plus longtemps. Lamizana et les militaires avaient bénéficié d’un contexte et d’un environnement très favorables qui leur ont permis de poursuivre leur expérience.

S. : Quel a été le caractère dominant de Lamizana pendant cette période. Était-ce le côté militaire ou le côté civil avec un penchant pour la démocratie ?

G.M. : C’est quelqu’un qui avait un esprit démocratique de par sa formation. Je me demande s’il n’a pas été influencé par l’armée coloniale qui était l’armée de la République française. C’était une armée républicaine qui est soucieuse de respecter les institutions en principe. Lamizana a été recruté en 1936. Il a suivi l’expérience démocratique sous la IVe République française et le jeu démocratique qui a prévalu avec les différentes élections pour les assemblées constituantes jusqu’aux indépendances. Il a été sans doute influencé par ce contexte colonial qui fait qu’il y avait un jeu démocratique. Je pense qu’il y a dans son esprit l’idée qu’il faut défendre une armée de la République, qu’il faut se comporter comme un militaire d’une armée républicaine. Cela a dû l’influencer tout au long de son parcours.

Un trait de caractère de Lamizana, sa courtoisie... Il n’a jamais croisé le fer directementavec quelqu’un.

N.C.S. : Le général Lamizana a un trait de caractère qui a traversé toute sa carrière, c’est sa courtoisie. On l’a même qualifié de débonnaire. Lamizana n’a jamais croisé le fer directement avec quelqu’un.

S. : Était-ce par peur ?

N.C.S. : Ce n’est certainement pas par peur étant donné qu’il a démontré son courage en tant que militaire dans toutes les campagnes qu’il a faites. Que ce soit au Vietnam ou en Algérie. Mais il a un trait de caractère qui est essentiel pour la carrière qu’il a eue à vivre, c’est que même quand il est vexé dans son for intérieur, il reste un type très courtois. Lamizana a toujours su garder la mesure des choses. Dans la gestion de l’État, on l’a même accusé d’être complaisant et paternaliste. Justement parce qu’il laisse le temps venir. Lamizana réfléchit toujours en profondeur sur les problèmes avant de poser les actes.

C’était l’une de ses armes principales pour désarçonner aussi bien les militaires que les civils. Ceux qui le connaissaient bien ont affirmé que Lamizana savait toujours où il allait. Il ne posait pas ses actes au hasard. Il faut savoir qu’il avait quand même l’expérience dans la gestion des hommes. Il a connu une brillante carrière militaire quand on sait qu’il a été pratiquement recruté sous les nérés et qu’il est devenu un officier en un temps trois mouvements. Il a été formateur, interprète et a servi dans l’administration en Côte d’Ivoire. Il a appris à connaître les hommes, à gérer les hommes.

G.M. : C’est quelqu’un qui a appris vite, qui était pragmatique. Or en politique, ceux qui sont pragmatiques finissent par l’emporter quelquefois. C’était un homme de dialogue, il écoutait les autres personnes, se faisait une idée avant de prendre une décision.

Quand il se rendait compte qu’une décision ne peut pas passer, il reculait. Quant à savoir si on ne l’a pas contraint à la démocratie, je dirai qu’effectivement les syndicats l’ont contraint à plusieurs reprises à reculer. Il a surtout beaucoup appris. Lorsqu’il prend le pouvoir en 1966, il avait des difficultés à s’exprimer mais très vite, il a appris et était à l’aise devant les journalistes. Il était très intelligent.

N.C.S. : L’une des facultés de Lamizana, c’est de pouvoir utiliser les erreurs de ses adversaires politiques. L’un des premiers actes politiques que Lamizana a posé à son arrivée au pouvoir a été de revaloriser la chefferie traditionnelle étant donné qu’il savait que c’était la pomme de discorde entre Maurice Yaméogo et le pouvoir traditionnel. Le Mogho Naba a été fait commandeur de l’Ordre national en 1968. Une des forces de Lamizana était aussi de se créer des amitiés dans tous les milieux. Quand il était en difficulté, il a toujours su utiliser ce volet humain pour pouvoir retourner les situations en sa faveur.

G.M. : Autre trait de son caractère, c’est quelqu’un qui est honnête. Cela est très important dans les rapports qu’on entretient avec les différents groupes sociaux.

S. : L’homme devait quand même avoir des faiblesses ?

G.M. : Oui ! Il avait des défauts et des qualités. Quand on est évidemment très tolérant, quand on veut écouter tout le monde avant de prendre une décision, cela peut se révéler négatif, cela peut être une faiblesse en politique. Une de ses faiblesses, c’est qu’il n’a pas eu de formation politique mais, comme il apprend vite, il a su surmonter cette faiblesse. Il a compris ce que c’est que la politique, que gérer les hommes était un art.

Si on a accusé Lamizana d’être débonnaire, laxiste et tout, c’est justement parce qu’il voulait contenter tout le monde.

N.C.S. : Dans un certain nombre de situations où Lamizana devait trancher de façon rapide, on a trouvé qu’il tergiversait. Il y a des situations où il n’a même pas oser affronter les difficultés. Quand il a par exemple parlé de la création du Mouvement national pour le renouveau (MNR) et qu’il y a eu une vive réaction des hommes politiques et des syndicalistes, il a battu en retraite. Si on a accusé Lamizana d’être débonnaire, laxiste et tout, c’est justement parce qu’il voulait contenter tout le monde. Or on ne peut pas faire des omelettes sans casser des œufs.

S. : Est-ce que finalement Lamizana n’a pas été contraint à l’ouverture démocratique ?

N.C.S. : Le 3-Janvier 1966 comportait déjà les germes de la démocratisation de la vie politique au Burkina. La base du pouvoir de Lamizana en 1966 est venue des mouvements syndicaux, des élèves et des étudiants. Tout au long de sa carrière, Lamizana se savait redevable à ceux qui lui avaient confié le pouvoir. Cette concertation permanente qu’il a toujours voulue pouvait être perçue comme une expression de démocratie.

G.M. : C’est un déficit démocratique qui a chassé Maurice Yaméogo du pouvoir. Ayant reçu le pouvoir des syndicats et des partis politiques, le général Lamizana était obligé tôt ou tard de restituer le pouvoir au peuple. Dans la gestion du pouvoir de Lamizana, on peut déceler deux moments : les années de doute sur l’instauration de la démocratie en Haute-Volta de 1966 à 1970 et de 1974 à 1977. On a vu dans quelles circonstances il a pris le pouvoir, on a vu aussi que le 12 décembre 1966 l’armée a décidé de conserver le pouvoir pour une durée de quatre ans.

C’était comme pour dire aux civils « puisque vous ne vous entendez pas, nous vous donnons 4 ans pour réfléchir et pendant ce temps, nous allons assainir la situation ». Cela a été une période de doute. La 2e période de doute va de 1974 à 1977. Avec l’instauration de la deuxième République, une crise éclate au sein du RDA, le parti qui était majoritaire et qui, finalement, a bloqué le fonctionnement normal des institutions. Devant cette situation, est-ce que Lamizana ne s’est pas dit qu’il ne pouvait rien faire que de prendre le pouvoir.

Et c’est là qu’intervient le véritable coup d’État lorsque le 8 février 1974 il décide, déçu par les partis politiques, de prendre le pouvoir. Dans les régimes d’exception qu’il a dirigés, il a toujours été soucieux des libertés individuelles et collectives, de la liberté d’expression, de la liberté syndicale. Il ne manquait en réalité que les libertés politiques. C’est pour cela que dans l’imaginaire politique, on a l’impression que tout le régime de Lamizana a été un régime démocratique. Il y a eu ensuite ce que j’appellerai un doute sur la démocratie avec la tentative avortée de la création du MNR en 1975.

Les grèves célèbres des 17 et 18 décembre 1975 contraignent Lamizana à battre en retraite et à retirer son projet de Mouvement national pour le renouveau (MNR). L’éminence grise du régime à l’époque, Garango Marc Tiémoko, a tenté de justifier à la face du peuple la nécessité de créer un tel mouvement dans le but de rassembler tous les fils du pays, pour éviter la désunion.

Il y a eu ensuite les années de conversion à la démocratie de 1970 à 1974 et de 1978 à 1980, cela toujours sous la pression syndicale.

A partir de 1970 il tente la création d’un pouvoir démocratique avec la deuxième République (1970-1974). Sous la deuxième République, il y a eu donc un régime démocratique même s’il est surveillé par l’armée. Il ne faut donc pas isoler Lamizana de l’armée voltaïque.

Les autres officiers supérieurs sont tout aussi comptables de ce climat démocratique. On a proposé une démocratie surveillée par l’armée. C’est-à-dire que le président était obligatoirement l’officier le plus gradé. Ensuite, et parce qu’on doute des civils, on impose les miliaires dans le gouvernement pour surveiller. C’était aussi une période de doute.

La période de 1978 à 1980 correspond à une conversion totale. Lamizana, peut-être parce que les militaires ne le suivent plus, décide de quitter l’armée et de se convertir totalement à la démocratie. Jouant des querelles à l’intérieur des partis, il se fait élire grâce au soutien du RDA surtout. Cette période est celle d’une conversion à la démocratie. A-t-elle été réelle ou forcée ? C’était tout de même une démocratie. Mais l’expérience va tourner court, à partir du 25 novembre 1980, suite, là aussi, à des grèves syndicales.

Voilà en gros ce qu’on peut déceler dans cette gestion du pouvoir par Lamizana. Des années de doute sur la démocratie, puis ensuite des années de conversion forcée plus ou moins par les syndicats à un moment donné et d’autre part par un certain nombre de militaires qui ne voulaient plus que l’armée continue dans ce contexte-là et qui lui ont retiré leur confiance. On se rappelle qu’à l’époque l’armée s’était divisée sur cette candidature. Lamizana aux élections de mai 1978 a été mis en ballottage. C’était du jamais vu en Afrique à cette époque !

Lâché par l’Armée, Lamizana a décidé tout de même de se présenter à l’élection présidentielle de 1978.

Malgré le fait que Lamizana ait été militaire avec toutes les conditions favorables réunies, il n’a jamais fait un véritable coup d’État, à l’image de ceux des pays voisins.

N.C.S : Effectivement, selon l’analyse du Pr Madiéga, il y eu des périodes de doute, mais aussi des périodes qui attestent que Lamizana a pris goût à la politique. La preuve, c’est que lâché par le Conseil supérieur de l’Armée pour sa candidature à l’élection présidentielle de 1978, il a tout de même décidé de se présenter, réussissant à se rallier un certain nombre d’hommes politiques. On peut lui faire cette concession que malgré le fait qu’il était un militaire confirmé, Lamizana a été un démocrate depuis les événements de janvier 1966 jusqu’à son renversement en novembre 1980.

G.M : Lamizana progressivement s’est converti. De 70 à 74, le contexte n’était pas favorable à la démocratisation en Afrique. Mais Lamizana a gagné le pari même si c’est sur injonction plus ou moins des syndicalistes. A l’époque, le Burkina apparaissait ramer à contre-courant. Il a été quelqu’un qui croyait qu’il pouvait instaurer la démocratie. Même s’il a été déçu par ses compatriotes qui n’ont pas su conduire correctement la démocratie en Haute Volta, il reste qu’il a instauré le multipartisme intégral . Il y avait trop de partis et il fallait les limiter pour que ce jeu démocratique ait un sens. Les trois partis qui sont arrivés en tête des élections ont été les partis retenus avec des options idéologiques bien précises.

En 1978, ce fut vraiment l’apothéose. Pour la première fois en Afrique, un chef d’État en fonction était mis en ballottage par le jeu des élections transparentes et équitables. Il n’a pas tenté comme les autres chef d’État de truquer les élections de façon à être élu à 99 % des suffrages exprimés. En rappel, Maurice Yaméogo avait été élu avant sa chute à 99,99% des suffrages exprimés. Les chiffres aux législatives du 30 avril 1978 sont éloquents : UDV-RDA : 28 députés, UNDD : 13 députés, UPV : 9 députés, PRA : 6 et UNIR : 1 député. Les trois premiers partis ont été retenus comme des partis constitutionnellement reconnus. Et pour le premier tour du 14 mai 1978, Lamizana ne passe pas, il est mis en ballottage. Le 28 mai 1978, il passe tout de même au second tour avec 56,27 % des suffrages exprimés.

Si les hommes politiques avaient été responsables, s’il n’y avait pas eu de crise à l’intérieur du RDA, on aurait pu peut-être continuer l’expérience.

S. : La conversion de Lamizana n’était-elle pas perçue comme une trahison aux yeux de l’Armée ?

G.M. : Les militaires l’ont lâché. Et dans la mesure où la constitution prévoyait que le militaire qui voulait se présenter devrait quitter l’armée, Lamizana ne pouvait plus bénéficier du soutien de cette armée. Il devait s’en douter. Mais ce qu’il a oublié c’est que les générations avaient changé. Lui, il est de la génération des anciens combattants, de ceux qui ont gagné leurs galons sur les différents champs de batailles. Avec la génération des militaires universitaires qui, eux, avaient quelques formations politiques, une autre vision va naître. C’est pour ça que l’armée ne pouvait pas soutenir un civil de façon institutionnelle.

N.C.S. : La réponse des colonels a été claire : « s’il veut aller en politique, qu’il dépose la tenue ». Les militaires de la Haute-Volta à l’époque, se sont dit que le général Lamizana les entraînait dans des aventures. C’est probablement ce qui a expliqué leur position. Et le coup d’État de novembre 1980 est intervenu.

G.M. : En ce qui concerne ce coup d’État du 25 novembre 1980, il y a là aussi une sorte de responsabilité de la classe politique qui a mal géré, me semble-t-il, le conflit social. Si le conflit avait été bien géré, les militaires n’auraient peut-être pas eu de prétexte pour intervenir dans la vie politique. C’est là aussi un gros problème de la classe politique.

N.C.S. : C’est toujours la classe politique qui est à la base des problèmes. En témoignent les grandes grèves, les affirmations gratuites des hommes politiques et leurs comportements. Contrairement à Lamizana le président, les responsables du gouvernement n’étaient pas du tout dans les mêmes dispositions d’esprit pour discuter, pour négocier et essayer de trouver une solution à l’amiable.

A l’époque, le Premier ministre Issouf Joseph Conombo disait ceci : « confiance d’abord, efficacité ensuite ». Donc on rentre dans une gestion népotiste de l’État. C’est d’abord à ceux qu’on connaît, même s’ils sont incompétents, qu’on confie les responsabilités. Ce n’est pas à ceux qui sont efficaces ! Effectivement, les militaires assistant à cela ne pouvaient rester indifférents. Les principaux responsables sont les hommes politiques. Et comme disait un homme politique français, tant que les hommes politiques ne s’entendent pas, gouverner, gérer le pays semble difficile ; c’est ce qui est arrivé à la Haute-Volta. D’où le coup d’État de novembre 1980.

Au point de vue démocratique, il faut saluer l’esprit démocratique dans lequel le peuple a vécu tout au long des années Lamizana ; même s’il y avait des années d’exception. Dans l’imaginaire collectif, on a l’impression que c’était l’une des périodes les plus démocratiques de notre pays. Les libertés individuelles et collectives étaient respectées. On a essayé de mettre en oeuvre ce qu’on peut appeler l’État de droit. Car il n’y a pas eu d’arrestations, de liquidations physiques, etc, contrairement aux périodes postérieures.

S. : Quel héritage doit-on aujourd’hui garder de Lamizana ?

G.M : Ce qu’on peut noter comme héritage, c’est l’état d’esprit, l’État démocratique, cette volonté de croire que c’est possible d’instaurer la démocratie dans nos pays. A noter également l’héritage d’une armée républicaine. Parce que dans l’esprit de Sangoulé, l’armée doit être républicaine, une armée qui ne s’ingère pas dans la vie politique de façon intempestive, en évitant des coups d’État. C’est sous Lamizana que l’armée a été vraiment impliquée dans la construction nationale (construction de barrages, aménagement de périmètres en vue de la production agricole). Ces héritages vont être repris sous quelques formes par Sankara avec le fameux slogan : « L’armée doit produire ». Autres héritages légués par Lamizana, c’est son attachement à la démocratie, son sens du dialogue et du compromis, sa conviction qu’on peut organiser des élections transparentes.

Lamizana a prouvé qu’on pouvait gérer de façon honnête, de façon transparente...

La bonne gouvernance.

C’est un héritage qu’on doit pouvoir consolider au niveau du Burkina actuel. Après lui, les dérapages ont été de mise sous les régimes qui se sont succédé comme le Comité militaire de redressement pour le progrès national(CMRPN), le Conseil de salut du peuple(CSP), le Conseil national de la révolution(CNR), le Front populaire. Tous ces régimes ont attenté aux libertés.

En termes de gestion rigoureuse des deniers de l’État, Lamizana a prouvé qu’on pouvait gérer de façon honnête, de façon transparente. De Lamizana, on peut donc hériter de sa bonne gouvernance.

A la faveur de ce renouveau démocratique, l’héritage de Sangoulé Lamizana peut servir au Burkina, à l’armée burkinabè, aux hommes politiques.

En ce qui concerne la culture, il faut noter la contribution essentielle de Lamizana à la création du FESPACO. Il a accompagné toutes les initiatives culturelles de son pays. Pour lui, la culture, c’était essentiel. C’est un Africain de la tradition.

N.C.S : Effectivement, le Burkina était un exemple dans la sous région en matière de cinématographie. C’est l’un des tout premiers pays où les autorités politiques ont eu le courage de nationaliser les salles de cinéma pour mettre à la disposition des cinéastes des outils suffisamment performants.

Certes, il faut cependant atténuer un peu les propos laudatifs en ce qui concerne le général Sangoulé. C’était un grand homme, c’était un pionnier sur le plan des valeurs de référence humaine. C’est certainement, un vide qui s’est créé. Mais il y a un certain nombre de reproches qu’on peut faire au général.

Le fait de n’avoir pas perçu l’évolution des esprits dans l’armée burkinabè. Peut-être que s’il avait eu une certaine perspicacité dans son analyse, on n’aurait pas abouti aux événements, ni au coup d’État de 1980, surtout pas à ce que nous avons vu par la suite comme dérapages au niveau du Burkina. Heureusement que les choses apparamment sont rentrées dans l’ordre depuis un certain temps.

Lamizana n’a pas toujours su imposer ses décisions à ceux qui étaient sous ses ordres. Mais il avait confiance aux Burkinabè. Il les appelait tous à la construction de la Nation.

La création de son Mouvement national pour le renouveau a été rejetée avec tant de virulence certes, mais l’homme a toujours loué les Burkinabè.

Il avait fait confiance aux hommes. Son esprit de dialogue a été une très grande qualité. C’est une valeur de référence dans le cadre politique. Certains de nos hommes politiques auraient été à la place de Lamizana, qu’on aurait connu une évolution beaucoup plus violente que ce que nous avons connu. Organiser des élections transparentes est un héritage dont nous pouvons aujourd’hui nous approprier. Sa bonne gouvernance révélée lors de son TPR(Tribunaux populaires de la Révolution) et ses qualités ont fait de lui un père de la Nation burkinabè, un exemple dont on prône la probité et l’éthique. Il a géré le pays pendant 15 ans et, au sortir, il n’était pas mieux nanti que quiconque au Burkina. Il faut lui reconnaître cette qualité d’honnêteté.

Lamizana par son exemple interpelle les Burkinabè. Malgré le peu de moyens, malgré le fait que nous ne soyons pas gâtés par la nature, il y a eu quand même des démonstrations que nous avons des choses à revendre. Ceci, nous le tenons un peu du Général Lamizana.

S. : Mais est-ce que les acteurs politiques actuels ont des attitudes, des habitudes, des aptitudes à même de mettre cet héritage à profit ?

N.C.S. : Il ne faut pas isoler un individu pour juger ses actions. Il faut les mettre aussi au compte de tous les acteurs. Les anciens présidents brillent par l’exemple qu’ils donnent aujourd’hui.

Un exemple de cohabitation, de tolérance. Ce sont des qualités que les uns et les autres ont partagées avec le président Lamizana.

Sommes-nous nantis pour exploiter au mieux le patrimoine que nous a laissé le Général ? C’est un point d’interrogation que tout Burkinabè doit être aujourd’hui en mesure de se faire.

Saurons-nous en tirer profit au mieux ? C’est là également une interrogation. Répondre aujourd’hui par l’affirmative ou par la négative serait une gageure.

G.M. : Tout à fait ! C’est difficile de répondre. Est-ce qu’aujourd’hui nous avons la possibilité de mettre en œuvre cet héritage ? Pourquoi pas ! On a une armée qui, si elle s’en tient à l’héritage de Lamizana, peut devenir une armée républicaine, une armée qui n’intervient pas dans les institutions de la République de façon péremptoire. Pouvons-nous gérer mieux les deniers de l’État ? C’est aux hommes politiques de prendre leurs dispositions pour que la gestion soit faite de façon correcte. C’est vrai que le contexte n’est plus le même mais il n’en demeure pas moins que c’est un problème de citoyenneté, de formation citoyenne.

Avons-nous aujourd’hui des hommes de la trempe de Lamizana ? Difficile de répondre !

Là aussi, il faut former, informer, faire des séminaires pour aider petit à petit à une sorte de transparence dans la gestion des deniers publics.

Il nous faut des hommes de la trempe de Lamizana. Avons-nous aujourd’hui des hommes de cette trempe ? Difficile de répondre. L’argent a pris beaucoup le pas sur les idées.

Alors il faudrait désormais miser sur la citoyenneté, la formation et peut-être aussi sur la lutte contre la pauvreté pour arriver petit à petit à corriger les excès.

Un grand combat n’est-ce pas ! Lamizana a lutté contre le népotisme, le favoritisme et bien d’autres tares de la société. Aujourd’hui, c’est contre ces maux que nous luttons encore pour une meilleure démocratie. Le combat doit se poursuivre et les Burkinabè devraient pouvoir gagner la partie.

Le respect de la vie humaine était sacré pour Lamizana.

La classe politique doit donner l’exemple en matière de transparence de gestion des deniers de l’État. Il reste que tous les citoyens sont interpellés.

C’est essentiel, sinon la démocratie va être bloquée.

Le respect de la vie humaine était sacré pour Lamizana. En effet, il n’a jamais donné ordre d’exécuter ou faire du mal à qui que ce soit. C’est un héritage de la civilisation traditionnelle où il faut évidemment protéger la vie humaine conçue comme l’élément le plus sacré. A cela il faut ajouter son esprit de solidarité, de gestion paternaliste, de chef de famille.

La première richesse d’un pays, c’est d’abord les hommes dont les contributions évidemment participent de l’enracinement de la démocratie, de l’État de droit. Pour tenter de sortir le pays de la situation, l’intégration sous régionale est d’importance.

N.C.S. : Pour vous donner un exemple de l’humanisme de Lamizana, des témoins affirment que, quand Maurice Yaméogo a tenté plusieurs fois de se suicider en 1966, Lamizana a donné des instructions fermes :»Faites tout pour sauver Maurice ». Tout le monde sait aussi que Lamizana a développé ces valeurs de référence traditionnelle qu’est la parenté à plaisanterie.

Le Général Lamizana est mort à la tâche. Lamizana n’a jamais baissé les bras. Tout le temps, malgré les difficultés qu’il trouvait, il était présent aux cérémonies.

C’est là aussi une leçon que nous pouvons tirer de la persévérance de cet homme qui a vécu d’une façon particulière et qui est parti d’une manière tout aussi particulière.

S. : Certains de vos étudiants ont-ils méné des recherches sur la période Lamizana ?

N.C.S. : Il y a eu beaucoup de monographies que les étudiants ont tentées sur Lamizana. On a tenté même dans certains cas de les en dissuader. Car Lamizana venait de publier ses mémoires. A quoi donc servirait le travail d’un étudiant sur cet homme ? Mais l’étudiant a eu une approche et une analyse particulières des périodes Lamizana.

Au final, il a eu une mention quand il a soutenu son mémoire de maîtrise.

Avec la mort de Lamizana, c’est un baobab qui s’est écroulé

G.M. : Avec la mort de Lamizana, c’est un baobab qui s’est écroulé et nous en sommes tous affectés tout en sachant que le destin de l’homme c’est de mourir.

Je souhaite qu’on renforce évidemment cet héritage et tenter peut-être de le populariser de façon à ce que l’histoire récente soit connue par les générations futures.

Les années Lamizana sont des années très intéressantes dans la mesure où Lamizana lui-même en a laissé le témoignage à travers ses mémoires.

Pour l’historien, c’est important. C’est une source que nous lisons avec intérêt.

Donc nous rendons hommage à Lamizana de nous avoir laissé ce témoignage pour l’Éternité.

Tous ceux qui peuvent écrire et qui peuvent donner des témoignages qu’ils se mettent à la tâche. Ça sera autant de sources pour les historiens.

Joseph Conombo a écrit beaucoup. Gérard Kango Ouédraogo a écrit un livre, un petit fascicule. Mais ce n’est pas suffisant. Il y a d’autres qui peuvent le faire. Alors, qu’ils se mettent à table !

Propos recueillis par Sita Tarbagdo et
Hamado Nana

Sidwaya

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