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« Alternance 2005 » : La perte des illusions

Publié le vendredi 7 octobre 2005 à 08h21min

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L’air du temps était encore aux regroupements circonstanciels de partis quand des formations politiques qui se sont trouvées des atomes crochus ont décidé de créer « Alternance 2005 ». Le consensus minimal qui est de « faire partir Blaise COMPAORE » « pour un changement à la tête de l’Etat n’a pourtant pas empêché le regroupement de progressivement se dégraisser avec le départ de quelques ténors.

« Alternance 2005 » peut-elle aujourd’hui provoquer cette alternance qu’elle pense le salut du Burkina ?

Si à sa naissance, tel un foudre de guerre, « Alternance 2005 » par le fait même du nom pouvait provoquer des insomnies dans certains milieux politiques, surtout de la majorité présidentielle, la composition hétéroclite et les ambitions inconciliables des mentros de ce regroupement présageaient des lézardes dans le corps. Une situation qui n’était pas pour déplaire aux camps adverses.

Et le prévisible se fit jour avec la défection du PDP/SP parti sur la pointe des pieds. En effet, le parti de KI-ZERBO qui disait préparer son congrès « historique » devant consacrer la retraite du vieux leader, avait suspendu sa participation aux activités mais n’a plus regagné les rangs. L’OBU du Professeur BADO et son « alter ego », Emile PARE, s’étaient aussi gentiment débiné parce que sa proposition de candidature unique n’a pas recueilli l’assentiment des présidentiables du groupe.

Ainsi donc, deux grandes forces qui abandonnaient le navire, il faut dire que les gaz auraient du mal à donner la puissance souhaitée. L’hémorragie ne s’arrêtera pas outre mesure avec le RDEB de Ram OUEDRAOGO qui claquera violemment la porte après que celui-ci eu été « injustement » recalé au choix des trois candidatures qu’a décidé de présenter « Alternance 2005 ».

Depuis sa création, beaucoup de choses se sont passées et « Alternance 2005 » va au scrutin du 13 novembre avec trois candidats que sont Me Bénéwendé Stanislas SANKARA (UNIR/MS), Me Hermann Hector Magloire YAMEOGO (UNDD) et M. Philippe OUEDRAOGO (PDS). Ces derniers qui entendaient se donner l’étoffe nécessaire pour présider aux destinées du peuple burkinabè ont récemment jugé nécessaire d’entreprendre un périple hors du pays. Chose qui semble s’être plus vite terminée que prévue, seuls le Niger et la Côte d’Ivoire ayant été visités. Et cela, en rang dispersé.

Des tares congénitales qui annihilent l’ambition
Au soir du 13 novembre, « Alternance 2005 » ambitionne remplacer Blaise COMPAORE par un de ses candidats. De la profession de foi à la réalisation de l’ambition, le chemin est long et pas du tout balisé d’autant que la candidature du président sortant qu’elle conteste a été validée par le Conseil constitutionnel. C’est dire que le schéma à l’ivoirienne en 2000 est à exclure car personne n’aura le « plaisir » d’être mal élu comme le président GBAGBO.

Le Conseil constitutionnel a en tout cas retenu 13 candidatures dont celle redoutée par « Alternance 2005 ». Maintenant, elle est fixée sur ses chances même s’il reste probable qu’elle introduise un recours contre la candidature qu’elle a décrétée illégale.
Si la peur de la candidature de Blaise COMPAORE est un handicap pour ce regroupement, il faut dire que lui-même traîne avec lui depuis le départ des tares individuelles de ses mentors et des tares collectives qui amènent la machine à se gripper.

Individuellement, on a vu comment chacun de ses candidats a dirigé sa propre formation politique. Tous imbus de leur personne et animés d’un autocratisme à toute épreuve, ils ont conduit ces formations à l’implosion, empêtrées qu’ils les ont mises dans des feuilletons politico-judiciaires.
Bénéwendé S. SANKARA après des épisodes cocasses de joutes oratoires, s’est judiciairement empoigné avec son « ami » Hubert BAZIE et autres sur l’appropriation du sigle de son parti, l’UNIR/MS ; ce qui a amené le départ de ces derniers pour la création de la « Convergence de l’Espoir ». Hermann YAMEOGO qui est le prototype de l’inconstant politique a perdu son énième parti, l’ADF/RDA, qui l’a viré comme un malpropre après un congrès qu’il a « boycotté ». Il a dû son « salut » politique à l’exhumation du défunt parti de son père, l’UNDD.

Là encore, les tares qu’il traîne comme un boulet à la cheville ont provoqué « l’effritement » du parti avec son abandon par son propre frère Salvador Maurice YAMEOGO puis d’amis de longue date, fidèles parmi les plus fidèles. Quant à Philippe OUEDRAOGO, l’imbroglio politico-judiciaire dans lequel il a plongé le PAI est un cas d’école que le marxiste « pur et dur » aurait pu peut-être éviter s’il n’avait eu les réflexes émoussés par une longue période de parti clandestin qui faisait fi de la légalité. Ayant perdu les rênes de ce parti, il a été obligé de se présenter d’abord aux législatives de 2002 puis à cette présidentielle sous la bannière d’une autre formation politique, le PDS.

C’est dire que leur expérience de la gestion du parti ne milite pas en faveur des candidats de « Alternance 2005 ». Par leurs méthodes de gestion et de direction désapprouvées par leurs militants et leurs compagnons de route politique, ils ont sapé leur base électorale.

Quid de la situation d’ensemble du regroupement ? Trois candidats, trois couleurs politiques ou idéologies dont l’ambition commune de chasser Blaise COMPAORE du pouvoir ne suffit pas à gommer les oppositions de principes.

Qui du Sankariste, du marxiste ou du libéral bon teint verrait d’un bon œil le succès de l’autre ? En tout cas, les discours et les actes cachent mal le malaise qui semble être le lot quotidien à « Alternance 2005 ». D’ailleurs, pendant que le Sankariste Bénéwendé prétend qu’il « déposera ses valises » à la présidence après le 13 novembre, et que le marxiste Philippe OUEDRAOGO prédit un « autre Burkina possible » avec lui, le libéral Hermann fait de sa fixation sur la candidature de Blaise COMPAORE son cheval de bataille.

On a même cru un instant que l’homme du « Tékré » dont les « préalables » pour la tenue de cette élection n’ont pas reçu d’écho ne s’alignerait pas pour le départ. Il aura en tout cas fait durer le « suspens » puisqu’à quelques heures de la clôture des dépôts de candidatures au Conseil constitutionnel, il ne s’était pas encore exécuté, s’étant imposé un long temps de réflexion. Une attitude pour le moins équivoque quand on sait que sa candidature est portée par une coalition qui devait décider de la conduite à tenir. Voulait-il exprimer sa différence ? En tout cas, c’est bien là un signe qui montre que chaque candidat de « Alternance 2005 » roule pour sa seule personne.

Du reste, l’observateur aura noté que le « périple » qui devait apporter de l’énergie nouvelle aux trois candidats les a plutôt émoussés et rendus distants l’un de l’autre. Si SANKARA semble avoir le moral solide et travaille à occuper son terrain, on ne peut dire la même chose des deux autres candidats même si Philippe se manifeste sporadiquement dans la presse qui semble se délecter de la situation qu’il vit avec son ex-camarade Soumane TOURE du PAI.

Avec toutes ces difficultés objectives et subjectives qui pavent le chemin de « Alternance 2005 », l’espoir est-t-il toujours permis ?

Par Fatogoma Doussé
L’Opinion

P.-S.

Lire aussi :
Présidentielle 2005

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